Il nous aura fallu une semaine pour nous remettre du Festival de Cannes, du soleil, des soirées, des pizzas et des pots de glace avalés devant l’ordinateur. Et il est temps de faire un bilan des films asiatiques projetés sur la Croisette !
Sur 15 films sélectionnés et (co)produits en Asie, toutes catégories confondues, 7 ont reçu un prix, soit quasiment la moitié. On peut donc affirmer, sans trop se tromper, que le bilan asiatique du Festival de Cannes 2016 est positif. Zoom sur le palmarès.
COMPÉTITION
Dire qu’on a été déçu du palmarès de la compétition serait un peu fort. Bien que, comme beaucoup, nous ne soyons pas tout à fait du même avis que le jury, on a quand même été surpris (en bien évidemment) de voir trois films asiatiques récompensés !
Celui qui a emporté le plus de prix lors de la cérémonie de clôture n’est autre qu’Asghar Farhadi avec Le Client, ajouté à la liste des films sélectionnés au dernier moment. Il a, en effet, reçu le prix du scénario ainsi que le prix d’interprétation masculine. Que dire… Rien, puisque nous n’avons pas vu le film. On se rattrapera !
Le prix d’interprétation féminine a été remis à Jaclyn Jose pour son rôle dans Ma’ Rosa du réalisateur philippin Brillante Mendoza. On s’attendait à beaucoup d’actrices récompensées, tant les portraits de femmes étaient légion cette année, mais pas elle. Ce fut une agréable surprise ! Même si Jaclyn Jose avait beaucoup de concurrentes, des actrices plus brillantes et convaincantes les unes que les autres, elle nous a touchés dans son rôle de mère courage se démenant pour faire sortir sa famille de la tyrannie policière dans les bidonvilles de Manille. On aimerait voir plus souvent des personnages féminins représentés ainsi dans le cinéma asiatique !
Enfin, dernier film asiatique sélectionné et en compétition et récompensé : Mademoiselle de Park Chan-wook ! Son prix est passé sous les radars car il s’agit d’une récompense technique : le prix Vulcain de l’artiste technicien. C’est donc Ryu Seong-hie qui a été récompensée et non directement le cinéaste coréen. Ce prix est amplement mérité. On attendait beaucoup de Mademoiselle mais quand on est sorti de la projection, on savait très bien qu’il ne recevrait rien ou, au mieux, le prix de la mise en scène. Cette dernière, superbe, mérite de se déplacer au cinéma pour voir le film. La photographie, les jeux de caméra et la mise en scène en général sont un bonheur pour les yeux. Mais, malgré toutes ces qualités techniques, on est loin du chef-d’oeuvre. Il manque le fameux « supplément d’âme ». Dommage car Park Chan-wook, on l’aime bien !
UN CERTAIN REGARD
Dans la catégorie Un Certain Regard, cinq films asiatiques avaient été sélectionnés et deux ont été récompensés. C’est déjà pas mal !
Le Prix du Jury a été remis à Harmonium de Fukada Koji, qui fait partie de nos coups de cœur du festival. Fukada Koji prouve par Harmonium qu’il fait désormais partie du clan très fermé des réalisateurs japonais contemporains qui pèse dans le cinéma. Un subtil mélange de genres, une mise en scène brillante, des acteurs bluffants, de l’émotion… Il reste évidemment quelques défauts mais Fukada Koji a encore beaucoup de temps devant lui. Nulle doute qu’on sera très surpris par son prochain long-métrage !
Le Prix Un Certain Regard a, quant à lui, été remis à La Tortue rouge réalisé par le Néerlandais Michael Dudok de Wit. Le film n’est pas donc pas totalement asiatique. Mais puisqu’il a été coproduit par le célèbre studio japonais Ghibli, on ne peut qu’en parler et s’y intéresser. Qui plus est, Takahata Isao a endossé le rôle de producteur artistique. La Tortue rouge est un joli poème muet d’1h20, qui met en avant l’harmonie entre l’homme et la nature. Très joli, le film peut parfois sembler radoter. A sa décharge, nous l’avons vu en plein milieu de festival, quand il commence à devenir difficile de se concentrer. Promis, on le revoit vite et on changera peut-être d’avis !
QUINZAINE DES RÉALISATEURS
On quitte la sélection officielle et on se dirige vers la Quinzaine des Réalisateurs. Malheureusement, seuls deux long-métrages asiatiques étaient au programme. Heureusement, il y en a un qui a été récompensé !
L’Art Cinema Award de la Confédération internationale des cinémas d’art et d’essai a été remis à Wolf and Sheep de la réalisatrice afghane Shahrbanoo Sadat. Sur la papier, le film a tout pour plaire à un jury : réalisé par une femme, afghane qui plus est, Wolf and Sheep se déroule dans les montagnes afghanes et suit un peuple de bergers. On peut comprendre l’intention du jury de vouloir encourager et récompenser un tel projet, qui a été très difficile à mettre en oeuvre. Cependant, Wolf and Sheep souffre d’une réalisation maladroite et d’un non-scénario. Les paysages sont beaux et le film permet de découvrir une nouvelle culture. Cela mérite-t-il un prix ? On vous laisse juge !
SEMAINE DE LA CRITIQUE
La Semaine de la Critique avait également sélectionné deux films asiatiques. Et comme pour la Quinzaine des Réalisateurs, un seul long-métrage sur les deux a été récompensé.
C’est notre chouchou Davy Chou qui a reçu le prix SACD (Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques) pour son film Diamond Island. On aurait bien sûr aimé qu’il reçoive le prix Nespresso (non, nous ne rigolons pas) mais c’est déjà pas mal ! Dans ce film, Davy Chou traite de l’adolescence malmenée par ses rêves de façon subtile et délicate. Une jeunesse cambodgienne qui est balancée entre la modernité et les traditions. Evidemment, on vous conseille d’aller voir Diamond Island lors de sa sortie. Elle n’est pas annoncée mais on vous tiendra au courant !
COUPS DE CŒUR
Quid des autres films projetés qui n’ont rien reçu, ou alors, qui ne concourraient dans une aucune catégorie du festival ? Les films asiatiques étaient de bonne facture, même si très peu d’entre eux ont réussi à se dégager du lot. Il y en a quand même deux, heureusement.
Le premier est Après la tempête de Kore-eda Hirokazu sélectionné à Un Certain Regard. Soyons honnête : Après la tempête n’est pas le meilleur film de Kore-eda, loin de là. C’est un « petit » film. Et pourtant, il laisse une empreinte assez forte sur les spectateurs. Doux, comme son réalisateur, Après la tempête est un joli moment de cinéma. Sans prétention, le film embarque le spectateur dans cette énième histoire de famille, thème cher à Kore-eda. On ressort de la salle le sourire aux lèvres, reposé et serein. Peu de réalisateurs ont ce talent ; il faut donc le signaler.
Le véritable coup de cœur ou coup de poignard nous vient de Corée et du réalisateur Na Hong-jin, qui nous avait déjà surpris avec The Chaser et The Murderer. Pour la 3e fois, il est venu présenter à Cannes son nouveau film, The Strangers. Sélectionné en hors compétition, The Strangers est simplement extraordinaire, au sens propre du terme. Cette descente aux enfers de plus de 2h30 ne peut que secouer le spectateur, même si ce dernier est habitué au cinéma de genre. Revoir The Strangers est une obligation, ne serait-ce que pour mieux savourer ce petit bijou mais aussi pour comprendre ce qui nous a échappé. Au contraire de The Chaser et The Murderer, The Strangers semble moins abordable. Le spectateur se perdra peut-être un peu pendant le film mais qu’importe. Une oeuvre aussi forte a bien le droit d’avoir un petit défaut. Le 6 juillet, vous savez quoi faire et on sera à vos côtés !
Elvire Rémand.
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