À l’heure où Dreamworks est poursuivi pour plagiat par Jayme Gordon, Kung Fu Panda 2 n’a jamais été aussi populaire. Après avoir explosé le box office chinois, il persiste et signe, en s’attaquant maintenant au notre. Les enfants adorent, les adultes aussi, oui mais pourquoi ? Par Vanessa Harnay.
Po a faim de justice
« Il va mettre les bouchées doubles ! »
Impossible de rater cette accroche ! Elle est présente sur toutes les affiches du film qui nous agressent à presque chaque station de métro, et qui a de quoi laisser sceptique les plus réfractaires. Et pourtant…
Plus d’action, plus d’humour : voilà comment on pourrait qualifier le dernier né de Dreamworks. De quoi réjouir les fans du premier volet à qui cela manquaient. Tous ? Pas certain.
Car si l’action et l’humour sont bel et bien au rendez-vous, la légèreté du premier scénario a complètement été supplanté par une trame beaucoup plus noire et sanguinolente qu’on a tôt fait d’oublier, si bien qu’on ne sait plus si on doit rire ou pleurer.
Passée la première aventure toute mignonne où Po voyait son rêve réalisé en rencontrant les Cinq Cyclones et devenait le Guerrier Dragon, ce second opus voit arriver un nouvel ennemi, toujours avide de vengeance, mais qui cette fois, ne s’en prend pas à Shifu, mais à la Chine tout entière ! Et pour accomplir ce qu’il pense être sa destinée, Lord Shen se dote d’une arme redoutable : un canon.
Avec une telle différence de forces, on aurait pu pensé que l’accent serait mis sur le courage, la cruauté, l’insulte à l’art de la guerre, avec une belle leçon de morale sur l’honneur – souvenez-vous des samurais décimés par l’introduction des armes à feu ! Bien au contraire, le film se contente de mettre en exergue la relation entre les Cinq Cyclones et notre ami Panda, démontrant leur complicité sous couvert d’une quête d’identité assez mal amenée – Non les oies, ça ne donnent pas des naissances à des pandas.
Vous y trouverez donc : des révélations où vous apprendrez qu’elle fût le pire moment de la vie de Shifu et que, non, les Pandas ne naissent pas dans des œufs ; de l’action – superbement mis en musique par Hans Zimmer -, avec des courses poursuite en pousse-pousse et de joyeuses explosions, des vilains, vraiment vilains – en plus d’être moche, bêtes et méchants – mais aussi des lapins, beaucoup de lapins, trop de lapins…. Tout comme que de nombreux clins d’œil au précédent film, ainsi qu’à d’autres tels que Les 3 Royaumes, Le Seigneur des Anneaux, voire Pirates des Caraïbes, pour ne citer que ceux-là, sans oublier quelques renvois à la culture geek (Pacman, Les Lapins Crétins).
Les âmes sensibles verseront leurs petites larmes dans les rares moments un peu trop sentimentaux, que l’humour quasi-constant viendra presque gâcher.
Si l’histoire en elle-même n’est pas mirobolante, on ne peut pas en dire autant pour l’animation, qui, rien que pour les plaisirs des yeux, se doit d’être vue.
L’introduction, réalisée sur le modèle des spectacles de marionnettes chinoises, nous plonge directement au cœur du folklore asiatique.
Un folklore présent sur toute la continuité du film – notamment grâce à ses superbes décors (répliques de la Cité Impériale, pagodes et villages) mais aussi grâces à de nombreux symboles comme les feux d’artifice, le mythique dragon géant, le Ying et le Yang – qui curieusement, n’est pas sans nous rappeler les couleurs de notre ami Po, le panda – et ce, jusqu’au méchant Lord Shen, le paon, emblème de la dynastie Ming.
On ne pourra évidemment pas passer à côté du code couleur qu’est le rouge, dont les scènes avec Shen regorge. Rouge couleur de la Chine, mais aussi couleur de la colère et de la guerre. Un saisissant contraste dont on ne saurait faire abstraction, comparé à la palette que nous offre les séquences avec nos six héros.
Chose étonnante aussi : l’emploi de la 2D lors des flashbacks, venant ainsi casser l’animation pour mieux en renforcer la sensibilité et faire jouer la corde de l’émotion. Cela aurait effectivement pu être le cas si le placement avait été judicieusement fait. Au lieu de ça, c’est toute la dynamique du film qui en pâtit avec une perte de vitesse et un effet lourd et redondant dans l’apparition de ces souvenirs. Enfin, la fin du film, prémices du 3, achèvera de vous peser autant par sa prévisibilité que son manque d’originalité.
Verdict:
Au final, Kung Fu Panda 2 a un humour de grands sur fond d’histoire nianiante pour les petits, morale à la clé. On pleure rarement, on rit beaucoup, même trop, si bien qu’on en oublie la véritable histoire et la véritable cruauté de Lord Shen, comme si tout n’était que prétexte au gag et à l’animation. À trop vouloir en faire et satisfaire tout le monde, on ne sait plus sur quel pied danser. Cest à se demander si Dreamworks n’aurait pas voulu faire un film pour les grands enfants que nous sommes avant de se rétracter pour finalement surfer sur la vague commercial qu’est Kung Fu Panda, premier du nom.
VanessaHarnay.
Kung Fu Panda 2 de Jennifer Yuh, en salle depuis le 15/06/2011.