VOD – Outrage Coda de Kitano Takeshi : OUTRAGE CADEAU (e-cinema.com)

Posté le 1 décembre 2017 par

C’est directement en VoD, sur la nouvelle plateforme e-cinema.com, que l’on pourra découvrir le 1er décembre l’ultime volet de la trilogie de Yakuza Eiga signée Kitano Takeshi : Outrage CodaStephen Sarrazin nous livre sa réflexion sur le dernier film du réalisateur de Sonatine.

Ce dernier volet de la trilogie Outrage (Outrage – 2009, Outrage Beyond – 2012), dans lequel on retrouve Kitano tenant le rôle de l’incorruptible yakuza Otomo, permet au cinéaste de renouer avec son sens de l’épure, sa pratique de l’ellipse, qui en fait un film construit à partir de blocs narratifs ciselés dans un nombre restreint d’espaces : une île et sa plage, des bureaux de clans, des chambres d’hôtels. Mais aussi les trajets qui les relient, qui nous ramènent à Sonatine dès le premier plan, dans lequel on découvre Otomo et son lieutenant Ichikawa (Omori Nao), à la pêche sur un quai sur l’île Jeju en Corée du Sud. Les deux hommes échangent quelques plaisanteries, Kitano en chemise qui rappelle celles d’Okinawa, regard caméra avec lunettes de soleil. Un film qui lance Otomo vers un destin semblable à celui de Murakawa dans Sonatine.

Ceux familiers avec les volets précédents se souviendront de la guerre entre les clans Sanno et Hanabishi, ce dernier émergeant victorieux de Outrage Beyond. Les années ont passé, Otomo s’est fait discret en travaillant pour Monsieur Chang, riche homme d’affaires coréen, discret, d’une élégance pernicieuse, qui entretient des liens avec les milieux du crime coréen et japonais.

Un membre du clan Hanabishi, Hanada, tabasse deux hôtesses dans une chambre d’hôtel appartenant à Chang. Otomo s’y rend, Hanada est sommé de s’excuser, payer pour les dégâts et pour l’affront, avant de rentrer au Japon. Au lieu de quoi il tue le lendemain un des hommes d’Otomo.

Outrage Coda s’appuie sur une idée de mise en scène nourrie de mythologie cinématographique et de conséquences géopolitiques sur la spécificité du modèle yakuza japonais, dont Otomo, ‘exilé’ en Corée du Sud, serait ici la dernière incarnation. Cela se joue au moment où Hanada et le chef du clan Hanabishi, Nomura (Ohsugi Ren), venu lui aussi du monde des affaires, découvrent qu’ils devront traiter avec Otomo, fantôme d’une ère intraitable, et ce Chang, qui se révèle fin stratège n’existant qu’à travers secrets et murmures.

Au sommet de son art dans les années 90, Kitano s’inventait comme suite fin de siècle d’une représentation du yakuza intègre, teintée du cynisme de celui qui voit venir la fin de ce monde (1). L’Été de Kikujiro annonçait un premier retrait, un adieu au genre. Otomo, de la trilogie Outrage, vient hanter l’oeuvre du cinéaste, traînant un acharnement à s’indigner des querelles internes, de prises de pouvoir, tandis que l’aura du yakuza s’éteint, qu’il sera confronté à une autre définition qui souligne sa fragilité face à ses voisins d’Asie qui se sont investis dans le Japon. Le héros de Kitano montre de quel côté s’est déplacé l’honneur, combien il peine à exister chez les clans japonais. Dans Sonatine, Murakawa mettait fin à ses jours sur l’île d’Okinawa ; dans Outrage Coda, le même geste à Jeju. Il y a près de vingt-cinq ans, Sonatine réinventait le genre sur une musique de Joe Hisaishi. Avec Outrage Coda, sur un air de Suzuki Keiichi, moins mémorable, Kitano l’achève et l’abandonne au bitume.

Stephen Sarrazin

1- Les clans Yakuza au Japon vont de 240 membres à plus de 5000, à l’image du célèbre Yamaguchi-gumi, de Kobe et Hyôgo, qui en 2016, à la suite de conflits entre ses membres, se séparait en trois groupes distincts.

Outrage Coda de Kitano Takeshi. Japon. 2017. Disponible le 01/12/2017 sur e-cinema.com.

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