Il est des métrages dont le titre même est un poème, porteur de tous les espoirs et de toutes les craintes. Dancing Ninja, sorti en 2010, arrive enfin chez nous (étrangement retitré Street Dancing Ninja) grâce à Factoris Films. Le film, disponible en DVD en octobre, est déjà sur East Asia.
Difficile d’aborder un métrage comme Dancing Ninja en terme d’analyse objective, d’étude des qualités et des défauts de l’oeuvre. Mitchel Klebanoff livre ici son premier long-métrage, qu’il scénarise tout autant qu’il le co-réalise. L’homme, amateurs des films de ninja décalés, est aussi le scénariste d’un Beverly Hills Ninja dont le titre sent bon la comédie nanar. Il est aidé de Kelly Sandefur, autre réalisateur habitué des comédies un peu particulières, puisqu’on le retrouve à la réalisation de séries comme La Vie de famille, qui fut longtemps multi-diffusé sur RTL9.
Sans surprise , Dancing Ninja est, de prime abord, une comédie adolescente graveleuse, mélangeant humour en dessous de la ceinture, séquences de danses à base de rock, r’nb ou autres musiques de jeunes (tendance ringard). A cela s’ajoute un peu de combats, une prophétie, et un adolescent qui part dans une quête initiatique, tout autant pour devenir un homme que pour comprendre qui il est, ainsi que pour se venger et défaire tous ses ennemis.
Tous les ingrédients d’un film donnant des coups de coudes aux adolescents sont donc présent. Et à cela s’ajoute un acteur quelque peu has-been, venant rajouter une pointe de prestige tout en jouant avec son image : David Hasselhoff. Ce dernier est le grand méchant de l’histoire (Ansel Ladouche, ça ne s’invente pas) et cabotine délicieusement, semblant vouloir s’amuser avec son personnage tout autant que de prendre plaisir à jouer les vilains. Il alterne ainsi les phases où il ricane tel un méchant de dessin-animé, et celles où, terrifié, il sent la montée en puissance du Dancing Ninja.
Le film, en optant pour un certain nombre de choix « artistiques » se révèle cependant autant adapté aux adolescents qu’un vélo pour un poisson rouge.Les jeunes risquent en effet de se montrer perplexe face à ce déferlement de ringardise. Chorégraphies aussi douloureuses pour les yeux que la musique l’est pour les oreilles, héros tête à claque comme il a rarement été vu dans l’historie du cinéma, et scénario tenant autant la route que les dialogues, rendent la vision de Dancing Ninja potentiellement difficile.
Et pourtant, l’amateur de nanar, au seuil de résistance élevé, sera aux anges. Déjà par le scénario, Dancing Ninja est un poème. Il envoie notre héros lutter contre Ansel Ladouche qui, après avoir tué son ancien mentor (que le Dancing Ninja veut venger) pour lui voler sa machine d’entrainement magique, décide de planifier l’assassinat de Jean-Claude Van Damme et de Steven Seagal, pour devenir le seul héros de films d’action restant. Chaque apparition de David Hasselhoff est ainsi magnifique ! Ricanant, le regard fou, l’acteur d’Alerte à Malibu semble s’amuser au plus haut point, entre personnage pathétique, et fou digne des savants voulant contrôler le monde (qui, pour se défendre, castagne des affiches en carton de Chuck Norris), le héros de K-2000 mérite à lui seul de découvrir ce métrage. Le summum est atteint dans une séquence flash-back où l’on apprend les liens que Ladouche entretient avec l’ombre du Dancing Ninja, et où David Hassehoff incarne la mère de son personnage.
Il est cependant loin d’être le seul point « positif ». En effet, les chorégraphies et combats, sans parler de la découverte du sexe par notre Dancing Ninja (chaque fois qu’il caresse une paire de seins, il devient plus puissant) provoquent une fascination déstabilisante.Il ne faut pas oublier les passages de comédies musicales. Entre la scène de séduction où « le ninja-boy recherche sa ninja-girl » et celle où David Hasselhoff chante ses plans de conquêtes en peignoir de bain, difficile pour le spectateur de ne pas être déstabilisé. Street Dancing Ninja est un film qui surprend et qui ne plaira pas à tout le monde. Mais l’explorateur des tréfonds du cinéma, le courageux aventurier, pourrait voir en cet Objet filmique non-identifié, une pépite comme on en voit rarement.
Factoris Films, hélas, nous offre ce métrage sans aucun bonus. Il aurait été très intéressant de se pencher sur un making-of, voir un commentaire audio de David Hasselhoff. En l’état, Dancing Ninja est cependant un film qui s’oublie difficilement.
Yannik Vanesse
Street Dancing Ninja, disponible en DVD et Blu-ray à partir du 7 octobre chez Factoris Films