NETFLIX – Godzilla: Planet of the Monsters de Seshita Hiroyuki et Shizuno Kobun : Kaijoups

Posté le 27 janvier 2018 par

Le premier volet de la trilogie produite par Netflix sur le célèbre monstre, intitulée Godzilla: Planet of the Monsters, avait tout pour être une réussite. Il est pourtant l’un des films d’animation les plus inspires de ce début d’année.

Et si 2018 était l’année où Netflix devenait un acteur principal de l’animation japonaise ? Après avoir produit la série Devilman Crybaby adaptation de Go Nagai ayant reçu un certain succès d’estime, la firme californienne enfonce le clou avec l’annonce de Godzilla: Planet of the Monsters. Première apparition du kaiju en animation depuis la série des années 90 basée sur l’adaptation de Roland Emmerich, cette nouvelle trilogie avait tout pour être un énorme succès. Non seulement le dernier film de la série, Shin Godzilla, est peut-être le meilleur de la franchise depuis très longtemps et a recommencé à faire parler du monstre dans les cercles cinéphiles, mais l’équipe du film laissait imaginer un excellent résultat.

On retrouve en effet au scénario Urobuchi Gen, responsable de l’incroyable Puella Magi Madoka Magica et à l’animation Polygon Pictures, studio ayant travaillé sur de nombreux films de Oshii Mamoru dont Skycrawlers et Ghost in the Shell 2. Si le CV du duo de réalisateurs est moins impressionnant, on retrouve la participation de Shizuno Kobun, réalisateur de nombreux films Detective Conan. Le synopsis du film avait aussi de quoi intéresser le spectateur potentiel : après l’apparition de kaijus sur Terre, l’humanité est obligée de s’exiler dans l’espace. Grâce à l’aide d’extraterrestres, ils arrivent à survivre pendant des dizaines de milliers d’années sans pourtant trouver de planète où s’installer. Le dos au mur et en danger d’extinction, ils décident de revenir sur une Terre à l’écosystème lourdement changé depuis leur départ, les humains ayant étés remplacés par les monstres et l’environnement s’étant adapté à ces nouveaux habitants.

Le premier souci du film est la façon dont il utilise cette idée au potentiel pourtant réel. Gen Urobuchi décide de ne pas utiliser les possibilités offertes par un concept aussi génial. En faisant subir au film une introduction longue de presque une heure et composée quasi uniquement de dialogues techniques aussi creux qu’opaques, il empêche autant son univers de se constituer que le spectateur de s’intéresser au film. Même une fois cette épreuve passée, la récompense est minime, le concept d’évolution de l’écosystème terrestre est évacué en deux phrases au profit de combats classiques sans intérêt ni particularité. Godzilla est quasiment absent de la plus grande partie du film, concentrée sur l’histoire et les relations entre les personnages principaux. Si en théorie, ce choix aurait pu payer, le film original de Honda Ishiro faisant bien plus lumière sur les protagonistes que sur le monstre, l’absence d’un seul personnage intéressant empêche le parti-pris de fonctionner. Les héros du film ne se targuent même pas d’être des clichés, ils sont des coquilles vides au développement inexistant. Encore pire, l’idée pourtant intrigante d’ajouter à la mythologie Godzilla des races alien partageant leur technologie avec les humains pour combattre le kaiju ne fait rien d’autre que boursoufler la première partie du film et est totalement oubliée dès que l’action démarre. Les scènes d’action en elles-mêmes n’ont d’ailleurs rien de particulier et font même pâle figure face à d’autres films ou séries animées récents en 3D.

La 3D d’ailleurs confirme son statut polémique dans le monde de l’animation et son potentiel pour le meilleur ou pour le pire. Si au meilleur, comme le montre la récente série Houseki No Kuni, elle permet aux créateurs d’ouvrir un potentiel dans la mise en scène inatteignable par l’animation classique, elle est ici mal utilisée et ne fait que desservir le film, le remplissant de décors approximatifs et de personnages statiques mal modélisés. Quand on pense au passé du studio, on se retrouve vraiment déçu par l’absence quasi totale d’évolution, voire la régression depuis des films comme Ghost in The Shell 2 : Innocence. L’animation manque de consistance, de vision artistique et surtout de dynamisme, une grande partie des scènes dialoguées n’étant même pas vraiment animées et se contente de placer dans le cadre des silhouettes statiques dont seule la bouche bouge. Si l’animation des scènes d’action est évidemment meilleure, on est tout de même loin des sommets proposés par d’autres œuvres contemporaines

Godzilla: Planet of the Monsters est non seulement un très mauvais film n’ayant aucune idée du concept de rythme, mais c’est avant tout un film totalement dépassé. Dans sa franchise, Shin Godzilla l’écrase totalement. En tant qu’anime d’action, sa première partie et le manque d’originalité des scènes de combat arrivent à le rendre encore moins intéressant que des séries pourtant déjà moyennes comme Terra Formars ou Attack on Titan. Enfin, du point de vue de l’animation, les CGI sont dépassés et les récentes séries ou films faisant enfin une utilisation complète de la 3D ne font que mettre en lumière le retard technique total du métrage. S’il était sorti il y a cinq ans, il aurait pu passer inaperçu comme un énième film moyen et inoffensif. Une sortie en 2018, dans l’état actuel de la franchise et au vu des CV des personnes impliquées, le film devient honteux. Que l’on soit amateur ou non du genre et de la franchise, on ne peut que souligner l’échec d’un projet semblant avoir été monté de toute pièces par la société de VOD et n’ayant eu droit ni à la passion de l’équipe ni aux moyens techniques pour en faire autre chose qu’un petit rectangle sur lequel quelqu’un cliquera peut-être entre deux épisodes de sitcom.

Elias Campos.

Godzilla : Planet of the Monsters de Seshita Hiroyuki et Shizuno Kobun. Japon. 2017. Disponible sur Netflix le 17/01/2018.

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