VIDEO – Après la tempête de Kore-eda Hirokazu : Plus profond que l’océan

Posté le 16 décembre 2017 par

Découvert au Festival de Cannes en 2016 dans la catégorie Un Certain Regard, Après la tempête de Kore-eda Hirokazu nous avait mis le sourire aux lèvres. Ce bien-être a été de nouveau ressenti en salles en avril 2017 et la douceur du film remplira votre maison grâce à la sortie en DVD et Blu-Ray, par l’éditeur Le Pacte, de ce petit bijou !

après la tempête

Kore-eda Hirokazu poursuit ses chroniques familiales avec Après la tempête. Ryota, malgré un début de carrière d’écrivain prometteur, accumule les désillusions. Divorcé de Kyoko, il gaspille le peu d’argent que lui rapporte son travail de détective privé en jouant aux courses, jusqu’à ne plus pouvoir payer la pension alimentaire de son fils, Shingo. Malgré tout, il essaye de regagner la confiance des siens et de se rapprocher de son fils. Cette tentative, bien vaine, connaît une évolution lorsqu’un typhon contraint la famille à passer une nuit ensemble.

Nous l’avions déjà dit, lorsque nous avons découvert la première bande annonce, le scénario d’Après la tempête est simple. Simple comme un film de Kore-eda. Et c’est pour cela qu’on l’apprécie. Le cinéaste sait traiter des sujets de la vie quotidienne avec poésie sans que ses films ne deviennent pédants, bien au contraire.

Les personnages d’Après la tempête sont tous attachants. Ryota, interprété par Abe Hiroshi, déjà vu dans I Wish et Still Walking, est un écrivain raté en plus d’être un détective privé pour le moins peu scrupuleux. Son seul intérêt est de parier aux jeux et d’espionner son ex-femme, jouée par Maki Yoko (Tel père, tel fils) qui fréquente un nouvel homme. Un tel personnage pourrait être agaçant. Mais chez Kore-eda, il devient touchant car terriblement humain. Sa sœur, jouée par Kobayashi Satomi (Pale Moon), le considère comme le boulet de la famille. Sa mère, interprétée par la divine Kiki Kirin (Les délices de Tokyo), n’en pense pas mieux. Ce trio fonctionne à merveille, notamment grâce à Kiki Kirin, qui représente la mère et la grand-mère idéale. Hyperactive, drôle, avec un sens acéré de la répartie, le spectateur se prend d’amitié pour elle au bout de trois minutes de film. Il faut dire que Kore-eda a l’habitude de reprendre les acteurs d’un film sur l’autre, ce qui donne aux spectateurs l’impression qu’il tourne en famille. Cette famille, c’est aussi un peu la nôtre.

après la tempête

Kore-eda prend le temps d’installer ses personnages et sa non-intrigue avant l’événement fatidique : le typhon. Le climax n’intervient qu’en fin de film, ce qui pourrait surprendre. En réalité, cette tempête en elle-même n’a pas tellement d’importance. C’est pas elle que le cinéaste veut filmer mais l’effet qu’elle peut provoquer sur cette famille. Ryota et son ex-femme sont en froid et le fils est ballotté d’un côté à l’autre. La tempête n’est pas un deus ex machina et ne va pas régler tous les problèmes de cette famille mais elle a le pouvoir d’apaiser les tensions et les cœurs. Après une nuit de typhon, les émotions sont nettoyées de toute négativité, comme le sol est balayé de ses feuilles mortes.

Drôle et touchant, Après la tempête est un petit film doux, qui met du baume au cœur.

La sortie vidéo du film (Édition spéciale Fnac blu-ray) est accompagnée d’un bonus pour le moins intéressant : un making of réalisé par Nishikawa Miwa, la réalisatrice de The Long Excuse, superbe film projeté à Kinotayo 2017 et sorti depuis en salles. La relation professionnelle entre les deux cinéastes japonais remonte à 2001, date à laquelle Nishikawa a été l’assistante de Kore-Eda sur After Life. Puis, ce dernier a produit le premier film de Nishikawa en 2002, Wild Berries. Cette jolie relation se voit de nouveau dans ce making of d’une durée d’1h10, qui suit le projet d’Après la tempête du début, le stage de travail de Kore-eda Hirokazu pendant lequel il quitte la ville pour se ressourcer, à la fin, le doublage voix en postproduction. La caméra de Nishikawa suit tout le processus créatif et d’élaboration du film, sans être pour autant intrusive. Une longue partie du film est dédiée aux repérages des lieux de tournage : la cité où a vécu Kore-eda de ses 9 à 28 ans, et qui a nécessité une autorisation de tournage assez longue à obtenir, ainsi que le toboggan en forme de pieuvre, lieu de climax du métrage. Ces passages sont extrêmement touchants car nous y voyons un Kore-eda revenant sur ses souvenirs d’enfance ou croisant de vieilles connaissances de ses parents qui le félicite de la réussite de sa carrière. Puis le projet s’accélère, les petites mains – sans aucun sens péjoratif – de la décoration s’activent, telle une fourmilière, faisant leur possible pour rendre palpables les images enfouies dans l’esprit du cinéaste. Toute l’équipe du film s’implique à son maximum, y compris les acteurs. D’ailleurs, c’est le petit Yoshizawa Taiyo, qui a bien grandi depuis, qui commente en voix off ce making of. Ce film nous permet également de voir le cinéaste à l’action, dirigeant ses acteurs avec patience et gentillesse dont la grande Kirin Kiki, très à l’écoute. Le point d’orgue de ce making of est le tournage de la scène que Kore-eda avait noté 3 ans auparavant sur un petit carnet : celle où Abe Hiroshi, assis par terre, nettoie les bâtons d’encens utilisés pour rendre hommage à son défunt père. Cette scène, qui a nécessité beaucoup de prises car Kore-eda n’arrivait pas à se décider sur les déplacements de Kirin Kiki, est émouvante car le cinéaste ne cache pas son trouble : il considère comme l’accomplissement de plusieurs années de réflexion et de travail. Et nous aussi, du coup.

On remercie donc Le Pacte d’avoir choisi ce bonus qui prolonge l’ambiance douce d’Après la tempête !

Elvire Rémand.

Après la tempête de Kore-eda Hirokazu. Jap. 2016. En vidéo le 15/11/2017.

 

 

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