La 7ème malédiction de Nam Nai Choi (DVD)

Posté le 1 juin 2011 par

La découverte d’un cinéma est parfois une opération périlleuse. Équipé d’une pelle, il faut souvent s’enfoncer profondément à travers les strates cinéphiliques… Et là, tout au fond, dans un endroit où ne brille aucune lumière, on fait parfois d’étranges découvertes. Croiser le chemin de La 7ème Malédiction fait cet effet là ! Par Yannik Vanesse.

Il est parfois difficile de comprendre comment un film peut être édité en DVD. Si certaines maisons d’édition se sont faites les spécialistes des DTV à bas prix de nanars abyssaux – qui a dit The Asylum ? – tous autant prévus pour une sortie rapide en DVD dans les bacs à solde des supermarchés que pour des diffusions sur Sy Fy, NRJ 12 ou RTL 9, les éditeurs partant à la recherche de films plus anciens se disent rarement qu’ils vont sortir un gros nanar. Non, souvent ils sont motivés par le succès d’un autre film. Par exemple, il est peu probable que l’éditeur de Pompoko ait visionné le métrage avant de l’acheter et de le diffuser. S’il ne s’agit pas d’un nanar, loin s’en faut, il est probable que l’éditeur français aurait réfléchi à deux fois avant de proposer aux têtes blondes françaises cette histoire de tanukis tuant des policiers à coups de roubignoles géantes avant de se suicider. On peut sans risque penser qu’il a suffit de voir « Studio Ghibli » pour que le film soit acheté. De même, sans le succès de Wild Side avec sa collection Shaw Brothers, aurait-on vu TF1 vidéo éditer ce nanar merveilleux qu’est Super Inframan ?

Il ne serait donc guère étonnant que Metropolitan ait décidé de sortir ce film parce que le scénario, mélange d’aventure et de fantastique, l’apparente à Indiana Jones. De plus, le film étant produit par la Golden Harvest, grande rivale de la Shaw Brothers, l’éditeur devait penser qu’il ferait plaisir aux fans de films d’action et de wu xia pian. Et la présence au générique de Chow Yun-Fat et de Maggie Cheung ne pouvait que leur plaire…

Mais Nam Nai Choi, réalisateur de cette pépite, a procédé comme bon nombre de réalisateurs de nanars, en demandant à quelques noms connus de venir jouer dans leur film, pour pouvoir être mis en gros sur l’affiche. Ainsi, Chow Yun-Fat, contre la promesse d’un joli chèque et d’un temps de tournage assez court, se prête au jeu, n’apparaissant que dans quelques scènes – cela dit, les scènes en question valent leur pesant de cacahuètes. Maggie Cheung, quant à elle, incarne un des personnages principaux, mais il est probable que, quand elle détaille sa filmographie, elle évite de citer La 7ème Mlédiction et son rôle de journaliste (travaillant avec un appareil jetable) nunuche et tête à claques, le genre de personnage que tout spectateur sain d’esprit souhaite voir périr le plus rapidement possible. Nous sommes loin des personnages plus intéressants, comme celui du Syndicat du crime 3 par exemple.

Le film commence comme un polar d’action hong-kongais assez classique, avec une prise d’otages, et des flics dépassés demandant au héros, docteur et grand pratiquant de kung-fu, de les aider. Quelques jolies scènes mélangeant fusillades (les impacts de balles sont les traditionnels pétards) et combats à mains nues (avec ces si jolis bruitages exagérés chers à la Shaw Brothers et la Golden Harvest), laissent présager une sympathique bisserie parsemée d’humour lourdingue amené grâce à une journaliste aussi agaçante que jolie et incompétente – Maggie Cheung, donc.

Mais cette logique est vite brisée. Le héros rentre chez lui pour surprendre sa nouvelle conquête, en une scène de douche possédant une similitude troublante avec celle de Zombie Island Massacre. Troma se serait-elle inspirée de ce nanar merveilleux ? Ou est-ce un hommage ? Toujours est-il que les roucoulades du héros sont interrompues par un mystérieux personnage lui donnant rendez-vous en Thaïlande et le prévenant qu’il doit pratiquer l’abstinence – comme dans le comic book The Darkness. N’écoutant pas, notre héros déclenche donc la malédiction et n’a plus que quelques jours à vivre…

En parlant des roucoulades du personnage principal, il est important de préciser que le film possède un certain niveau de nudité, avec quelques jolis plans nichons, d’une utilité scénaristique assez limitée, mais, vu la beauté des dits plans, on ne saurait s’en plaindre.

Revenons à la malédiction. Le héros a donc été en Thaïlande, où il a sauvé une jeune femme d’un sacrifice en s’aventurant sous la grotte d’une sorte de temple maya. Et que ceux qui se demandent ce que les Mayas ont bien pu faire en Thaïlande, il convient de rappeler que d’après Steven Seagal, il y a des ruines mayas en Uruguay (Piège en eaux profondes) et que Bastia est un petit village près de Bordeaux (Attack Force). Et Stonehenge apocalypse place même une pyramide dans le Maine, alors… Évidemment, le méchant sorcier est très mécontent. Le sorcier, Aquaman, est campé par Elvis Tsui, un homme qu’il convient de remercier car son apparition propulse le film à des sommets de nanardise. Comme si le réalisateur attendait un signal, il oublie alors toute retenue, s’autorisant tous les débordements scénaristiques. Le méchant sorcier, espèce d’indien au maquillage blanc et au look indescriptible, est tout un poème. Il cabotine comme un beau diable, lâchant, à chaque apparition, un rire démoniaque d’une voix de fausset délectable en prenant des postures de grands méchants. Mais cela ne saurait suffire à propulser l’amateur de nanar dans la stratosphère. Le film est ainsi très généreux en gore mal fait – on se croirait dans un film de cannibales italien – et les créatures invoquées sont fabuleuses… Entre le zombie aux yeux fluo et le bébé démoniaque bêlant comme une chèvre en volant, difficile de croire ce que le spectateur a sous les yeux… Sans parler du combat final, entre le zombie se transformant en ptérodactyle ninja pratiquant le kung-fu et le bébé lui faisant des prises de catch. Le résultat est carrément hypnotique ! À cela s’ajoute des aberrations dans le scénario complètement magnifiques, comme le héros qui fait brûler ses liens en faisant refléter le soleil sur une loupe, alors qu’il est au fond d’une grotte et qu’il fait nuit !

Il aurait été bien triste qu’un tel film disparaisse dans les limbes cinéphiliques. Un film merveilleux qui comblera l’amateur de nanar le plus exigeant.

Yannik Vanesse.

Verdict :

La 7ème malédiction de Nam Nai Choi, disponible en DVD , édité par Métropolitan depuis le 01/06/2011