La Légende du Phoenix (Peacock King) de Nam Nai Choi (DVD)

Posté le 17 février 2011 par

Nam Nai Choi est un génie. Mieux, Nam Nai Choi est un messager du cinéma du 3e type. Si les treize films de Kubrick ont imposés son œuvre comme l’une des plus précieuse de l’histoire du cinéma, les treize métrages de Nam Nai Choi marqueront eux aussi le 7e art à leur manière. N’ayons pas peur des mots, Nam Nai Choi est le Kubrick de la série Z hongkongaise, et il mérite décidément bien ce titre. Démonstration avec La Légende du Phoenix ( Peacock King) ! Par Anel Dragic.

Peut-être que “film” n’est pas le terme le plus juste pour qualifier les œuvres de Nam. Peut-être devrait-on dire qu’il est le metteur en scène d’ovnis du cinéma, soit quasiment toute sa filmographie à l’exception de ses quatre premiers films, tournés pour la Shaw Brothers. Le réalisateur n’ayant d’ailleurs aucun film à jeter à son actif (à part peut être Three Stooges Go Undercover, mais ça, on ne peut pas le dire avec certitude, le film étant toujours invisible à l’heure actuelle). Jugez un peu: dans Killer’s Nocturne, l’homme filme un combat entre Chin Siu-Ho et un kangourou, dans Story of Ricky, il surpasse toutes les limites cinématographiques pour pondre un manga live ultra-sanglant et très trippant (dans tous les sens du terme), dans The Cat, il raconte l’histoire d’un chat extra-terrestre maîtrisant le kung fu avec une scène de combat mettant en scène l’animal contre un molosse. Nam Nai Choi est donc un homme qui à son échelle aura su donner ses lettres de noblesse au cinéma de Hong Kong, et ce n’est pas Peacock King (La légende du phœnix chez nous), qui nous fera dire le contraire.

Yuen Biao contre les vampires

La Légende du Phoenix
Yuen Biao, actor studio !

Yuen Biao est un gentil moine tibétain, chasseur de vampires et de démons de son état (mais surtout de vampires, comme il aime s’en vanter), qui parcours le monde afin de sceller des portails infernaux. Il croise la route du moine japonais Lucky Fruit ( Mikami Hiroshi) qui va l’aider à accomplir sa plus importante mission jusqu’ici: veiller sur Asura ( Gloria Yip), la fille du roi des enfers afin d’empêcher le retour de celui-ci sur Terre, mais également la protéger de Kubira ( Gordon Liu) et sa bande qui œuvrent pour l’affreux démon.

la légende du phoenixMieux qu’Alien, le… machin !

Avec un tel point de départ, il ne fallait pas s’attendre à une dissertation sur le sens de la vie, et le maître du bis made in HK nous plonge dans un voyage fantastique qui nous transportera du Tibet à Hong Kong en faisant un détour par le Japon. Faisant preuve d’une générosité de tous les instants, Peacock King est l’exemple même du film de genre, un peu kitsch mais extrêmement attachant. Adapté du manga Kukaju-Ô, le film tient le parti pris de rester fidèle à un univers visuel très graphique. Les prodigieux effets visuels déployés posent une brique à l’édifice du manga live dans l’œuvre de Nam Nai Choi, qu’il parviendra à transcender au travers de son chef d’œuvre, Story of Ricky.

Avec sa mise en scène typiquement eighties et sa musique estampillée bontempi, les aventures du moine Peacock ne pourront rebuter que les allergiques au genre. Assez rythmé, le métrage dissémine régulièrement les scènes d’action. Très câblées, celles-ci laissent libre court aux fantaisies du duo de chorégraphes, Tung Wei (à qui l’on doit entre autre les gunfights de A Better Tomorrow, mais aussi, dans un genre plus délirant, jetez un œil à ceux de Magic Cop et Pom Pom and Hot Hot), ainsi que Philip Kwok (l’un des célèbres Venoms et directeur des combats d’ Hard Boiled).

L’armée des ténèbres

Ce qui touche à la vision du film, c’est bien évidemment le caractère artisanal de l’entreprise et particulièrement de ses effets spéciaux, rappelant les créations et techniques employées par Ray Harryhausen, tout autant que ses émules, notamment les premiers films de Sam Raimi. Que dire devant l’univers créé par le film ? Chaque nouvelle créature est un émerveillement pour les yeux nous ramenant au bon vieux temps. Monstres en plastiques animés en stop motion, gros monstres en latex, géant incrusté, effets spéciaux cartoonesques, tout est là pour nous plonger dans un univers délirant usant des procédés les plus minimalistes mais non moins efficaces.

La Légende du Phoenix
Un savoir faire digne des meilleurs sentai!

Si Nam Nai Choi fût par certains appelé le maître du nanar HK, il est temps de remettre les pendules à l’heure. Non, les films de Nam Nai Choi ne sont pas des nanars (pas tous en tout cas), mais de véritables séries allant du B au Z (mais restant généralement dans les dernières lettres de l’alphabet). Car Peacock King n’est pas une mauvaise œuvre attachante, mais un bon film réalisé avec peu de moyens. Et si la maladresse des effets spéciaux laisse encore certains spectateurs dubitatifs, le film laisse pour sa part entrevoir un vrai sens de l’image et du montage qui n’a rien à envier à la plupart des séries B de l’ancienne colonie.

Sans être le meilleur film de son réalisateur, Peacock King est un bon film et un sympathique manga live, représentatif des films les plus délirants créé à Hong Kong au cours des années 80. Avec son casting attachant et ses effets spéciaux à l’ancienne, c’est une petite œuvre culte que livre Nam Nai Choi. Une suite sera par ailleurs produite l’année suivante, Saga of the Phoenix, toujours avec Yuen Biao dans le rôle titre. Si cette séquelle n’est pas annoncée en France, on peut penser qu’une bonne vente de ce premier volet boostera les intentions de Metropolitan concernant l’édition de la deuxième partie des aventures du Peacock King.

Anel Dragic.

Verdict:

La Légende du Phoenix (Peacock King) de Nam Nai Choi, édité en DVD par Metropolitan Filmexport. Disponible le 15/02/2011