L’Image manquante de Rithy Panh enfin en salles

Posté le 21 octobre 2015 par

Il suffit de regarder notre tableau des étoiles (ici) pour constater que l’événement cinématographique du mois est la sortie en salles du documentaire de Rithy Panh, découvert à Cannes en 2013 avant une diffusion trop confidentielle sur Arte et en vidéo.

L’enfance est au centre de L’Image manquante de Rithy Panh, qui poursuit son combat artistique sur la mémoire de génocide khmer rouge, en se focalisant cette fois-ci directement sur ses propres souvenirs. « Le cinéma prime sur la volonté de destruction, il est un rempart », avait dit le réalisateur avant la projection cannoise du film. Ce rempart, il décide de le créer de toutes pièces, avec des petites figurines taillées dans le bois qui viennent figurer ce que l’on ne peut pas figurer, nous aider à imaginer l’inimaginable.

L’Image manquante finit donc d’inscrire l’œuvre de Panh dans un geste lanzmanien, au sein duquel les images présentes témoignent de ce qui s’est passé en recréant ce passé sans recourir à une reconstitution mensongère qui se substituerait à la réalité. Par une image qui s’affirme artificielle, le passé n’est pas mimé mais recomposé, re-imaginé. Quelques bouts de bois, un texte lu en voix-off, et l’horreur des années khmers nous parvient par l’écran de cinéma, tout en servant de rempart à celle-ci, et à l’oubli de la réalité. Créer d’autres images pour se souvenir autrement de la réalité qu’à travers les images officielles du régime khmer, qui enregistrait la réalité pour eux-aussi documenter et endoctriner. Se substituent à celles-ci les images personnelles de Rithy Panh, qui nous livre, tel un exorcisme ou une psychanalyse, les images qu’il voudrait ne plus voir pour ne plus avoir à les contempler. On les accueille avec émotion.

Victor Lopez.