Starry Starry Night de Tom Shu-yu Lin (Paris Cinéma)

Posté le 20 juillet 2012 par

Starry Starry Night, le nouveau film d’un réalisateur jeune et affirmé, réinvente la vie adolescente, inspiré par les illustrations de Jimmy Liao. Par Alexandra Bobolina.

Mei est une fille de treize ans,  frange épaisse et regard triste. Jay est silencieux et timide et vit ses émotions à travers les dessins qui l’accompagnent dans sa vie instable. Main dans la main, ils affronteront le monde des adultes qui souvent les blesse et les laisse incompris et incompréhensifs. C’est en très peu de mots l’histoire que Tom Shu-yu Lin a mise en mouvement à partir du livre illustré du fameux auteur taïwanais Jimmy Liao. Le reste, ce sont des couleurs, des musiques, des animations virtuelles et beaucoup de larmes. Les larmes sont sur les yeux de tous les personnages, comme des scènes intemporelles où les barrières de l’âge se lèvent et rapprochent les âmes fragiles.

Il y a quelque chose d’à priori très triste qui se passe lors de la rencontre d’un adulte avec le monde enfantin. C’est la nostalgie, le deuil de quelqu’un, d’une partie de soi,  qui connaissait des passages vers l’au-delà et qui, un jour n’est tout simplement pas revenu. Starry Starry Night essaye de nous rendre ces instants évaporés, ce qu’a aussi voulu Jimmy Liao quand il a contacté Tom Shu-yu Lin pour lui demander d’adapter à l’écran le monde fantastique de Mei.

Le réalisateur a déjà démontré sa tendance pour le monde adolescent avec son premier long métrage Winds of September (2008). Le succès critique de ce dernier a valu à son auteur le titre de jeune espoir du cinéma taïwanais. S’agissant ici d’un monde plus proche de l’enfance, le réalisateur a voulu garder de nombreux éléments-images du livre de Jimmy Liao. Et c’est bien là dessus que le résultat reste douteux.

Tom Shu-yu Lin explique ne même pas avoir pensé à faire cette adaptation en animation parce que la prise de vue réelle lui laissait l’espace pour une interprétation personnelle, alors que l’animation aurait signifié tout simplement donner du mouvement aux dessins de Jimmy Liao. Pourtant, le film est bien rempli d’épisodes animés, mais qui échappent complètement à l’unité qui s’installait dans le livre entre le monde réel et celui fantastique. Les instants avec ces effets spéciaux sont bien placés et bien choisis : un lac envahit la chambre de Mei, l’eau de l’aquarium brisé par terre, le poisson rouge mourant alors que les parents se disputent, les animaux en papier coloré pleins de vie qui marchent aux côtés des jeunes personnages, les ombres qui se transforment en monstres-protecteurs, etc. Visuellement, les scènes s’insèrent de manière très fluide dans les événements de la vraie vie. Néanmoins, elles n’arrivent pas à construire un monde uniforme qui touche et appelle l’enfant « qui dort dans chaque adulte ». Parce que, pour se différencier du livre, Tom Shu-yu Lin a attribué une charge sentimentale des personnages, et exclusivement à celui de Mei, qui dépasse la sincérité et la pureté de la fantaisie. Sa présence donne une nuance mélodramatique et peu naturelle, comme par exemple dans une scène (en larmes, toujours) où lors de la recherche d’une pièce du puzzle « Starry Night » (copie du tableau de Vincent Van Gogh) montrée en ralenti, Mei se livre à la douleur et jette partout ses jouets. Tout est tellement plein de sentiments mais laisse pourtant le spectateur insensible. C’est aussi l’une des scènes qui illustrent le mieux l’état d’esprit qui anime Mei pendant la plupart du film. Heureusement à la fin, la sagesse triomphe et elle a écarté sa frange épaisse pour regarder le monde franchement et sans peur.

Les illustrations de Jimmy Liao, l’histoire originale et la régie maitrisée et visuellement rayonnante de Tom Shu-yu Lin sont des ingrédients qui ont beaucoup de qualités. Il est très dommage qu’ils restent étrangers aux spectateurs quel que soit leur age, dû à une dose excessive d’artifices.

Alexandra Bobolina.

Verdict :

Starry Starry Night de Tom Shu-yu Lin, présenté dans le cadre du Festival Paris Cinéma.