A Man, film d’Ishikawa Kei aux multiples récompenses lors des Japan Academy Prize 2023, sort dans nos salles chez le distributeur Art House. Alors, verdict ?
Rie apprend que son mari disparu n’est pas celui qu’il prétendait être. Elle engage Kido, un avocat d’origine coréenne, pour connaître la véritable identité de celui qu’elle aimait.
A Man est un film de bonne facture qui bénéficie d’une écriture dramatique solide comme le cinéma japonais nous l’a démontré de si nombreuses fois ces dernières années. Il est néanmoins difficile de saisir ce qui le ferait sortir du lot par rapport à d’autres productions dramatiques récentes. Ce n’est pas un mauvais film, loin de là, et les amateurs du genre y trouveront plus que leur compte, mais en termes de cinéma, rien de nouveau sous le soleil. A Man reste très classique aussi bien dans le fond que sur la forme.
Sur le traitement de son sujet, la question de l’identité, on reste très en surface et cela manque même parfois de subtilité. On y souligne assez lourdement, par des dialogues sur-explicites, les moindres questionnements des individus pour bien signaler que les personnages sont tous habités par cette même quête d’identité, sous des modalités différentes (familiale, migratoire, etc.), sans pour autant que se dessine de véritable propos sur ce thème.
Le long-métrage essaye aussi de tirer son épingle du jeu en versant dans le thriller pour développer ces thématiques familiales et sociales autour de l’identité. Cependant le ton régulièrement froid et l’absence de rythme efficient dans la narration empêchent pleinement d’aller puiser dans les ressources de ce genre. Le mystère autour de l’identité de l’ex-mari de Rie, enjeu central du récit, peine à nous accrocher et les révélations font l’effet d’un coup d’épée dans l’eau.
Il y a toutefois deux points positifs à noter et qui sont intéressants et remarquables dans A Man. Premièrement, les rôles sont campés par de solides prestations, principalement celle d’Ando Sakura, de plus en plus présente dans le cinéma japonais. Le public l’avait découverte il y a quelques années aux côtés de Sono Sion dans Love Exposure, puis l’a suivie pleinement en 2023 dans L’Innocence de Kore-eda Hirokazu, Bad Lands de Harada Masato et Godzilla: Minus One de Yamazaki Takashi. Une figure montante qui est à suivre de très près.
Les séquences autour de la boxe sont également réussies car, au-delà du fait qu’elles dénotent du reste du métrage, elles recèlent peut-être le plus de sens vis-à-vis du thème du film. Les tourments identitaires s’expriment par le combat. L’identité est un pugilat intérieur permanent et pas seulement quelque chose que l’on acquerrait en achevant sa quête. Intégrer la boxe dans A Man est une très bonne idée qui apporte autant de fraîcheur que de signifiant dans un film qui, dans son ensemble, est un peu trop conventionnel, codifié, voire cadenassé. Et c’est finalement lorsque le film lâche la parole et aborde son sujet autrement que par le dialogue qu’il est le plus pertinent.
En bref, A man de Ishikawa Kei est un film que nous recommandons aux amateurs de drames japonais car il en maîtrise parfaitement les codes contemporains. Nous regrettons seulement que le film peine à les rafraîchir, à sortir de sa feuille de route.
Rohan Geslouin
A Man d’Ishikawa Kei. 2023. Japon. En salles le 31/01/2023