FFCP 2023 – Ransomed de Kim Seong-hun

Posté le 16 novembre 2023 par

Dans la lignée du Escape from Mogadishu de Ryoo Seung-wan, Ransomed raconte le sauvetage d’un diplomate coréen, retenu en otage au Liban dans les années 80, par un de ses confrères envoyé sur place. Le nouveau film de Kim Seong-hun est surtout l’occasion des retrouvailles avec Ha Jung-woo, son acteur de Tunnel, qu’il associe à son complice Ju Ji-hoon dans un film d’action mâtiné de buddy movie. Ransomed ne rebattra pas les cartes de la filmographie du cinéaste mais il s’avère tout à fait efficace.

Min-jun, diplomate sud-coréen, débarque au Liban en 1987, alors que le pays est en pleine guerre civile. Dans l’espoir d’obtenir un poste prestigieux, il s’est porté volontaire pour secourir l’un de ses confrères, porté disparu depuis des mois. Sur place, il rencontre Pan-su, un chauffeur de taxi qui va l’aider dans sa périlleuse mission.

Après une entrée fracassante dans le paysage du cinéma coréen avec A Hard Day, suivi de la confirmation Tunnel, Kim Seong-hun est désormais un cinéaste bien établi avec un indéniable sens de la mise en scène et une maitrise aiguisée de ses effets. Il met tout ceci à profit dans ce Ransomed, bien moins ambitieux dans sa proposition mais tout aussi dédié à fabriquer du divertissement bien troussé avec un fond socio-politique posant un regard, souvent ironique, sur la Corée du Sud (et son histoire récente). 

Ransomed parvient plutôt bien à poser ses enjeux et le contexte de la Corée du Sud de 1987. Il retranscrit bien cette période d’entre-deux politique (la démocratisation est en marche mais la dictature militaire est encore bien présente dans les arcanes du pouvoir) encore dominé par les luttes intestines entre le gouvernement et les services de renseignements, auxquelles s’ajoute une quête de légitimité à l’international qui nourrit tous les espoirs et influe sur toutes les décisions. L’affaire dont le film est tiré est une illustration assez édifiante de l’époque et Kim Seong-hun en prend la bonne mesure en mettant constamment dos à dos, l’histoire qu’il raconte et l’Histoire qui se déroule (la candidature des JO de 1988 en est une des toile de fond récurrente). Le réalisateur choisit néanmoins de ne pas creuser davantage cette veine du film, préférant embrayer sur l’angle de l’action pure, permettant d’enchainer les poursuites effrénées à travers les rues de Beyrouth ou les déserts du Liban, et de miser sur la dynamique straight man/escroc haut-en-couleur (au sens propre comme au figuré, les tenus de Pan-su pouvant aisément être classifiées comme une agression visuelle avérée) de ses protagonistes.

De nouveau réunis 6 ans après Along with the Gods, Ha Jung-woo et Ju Ji-hoon forment un duo charismatique à l’alchimie évidente. Ransomed cale alors rapidement son rythme sur leurs interactions, qui évoluent de la méfiance à la collaboration puis à l’amitié, au risque d’accuser un léger coup de mou à mi-parcours. En effet, si le film remplit son contrat et se suit sans déplaisir, il n’injecte pas assez de fun pour pleinement faire décoller le buddy movie et contient un peu trop de rebondissements pour se renouveler dans l’action. À la décharge du film et de son réalisateur, il pâtit malgré lui de la comparaison avec Mogadishu qui, sur un concept similaire, était bien plus en maitrise de son rythme et plus rigoureux dans sa construction. 

Ransomed fonctionne néanmoins sur de nombreux points, notamment la bonne utilisation de son cadre (quelques séquences sont assez spectaculaires et les personnages des locaux sont davantage que des caricatures, ce qui est assez rare pour être mentionné) et à l’abattage de son casting, Ha Jung-woo en tête. Creusant sa partition de héros ordinaire, le comédien infuse sa coolitude innée à son personnage de Min-jun, diplomate frustré à la mesquinerie plutôt réjouissante qui se voit métamorphosé par l’expérience et révèle un courage insoupçonné, jusqu’à sérieusement chatouiller notre corde sensible dans une intense scène d’aéroport. 

Sur un mode mineur, Ransomed reste tout de même un solide film à grand spectacle. Il ne restera pas forcément longtemps en mémoire à l’issue de la séance mais il nous fait passer un très bon moment au visionnage. 

Claire Lalaut.

Ransomed de Kim Seong-hun. 2023. Corée du Sud. Présenté à la 18ème édition du Festival du Film Coréen à Paris.

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