Tai Chi Hero de Stephen Fung : le retour du Wu Xia Steampunk !

Posté le 3 octobre 2013 par

Le diptyque Tai Chi/Tai Chi Hero avait grandement marqué et amusé les spectateurs du BIFFF. Wild Side, après avoir distribué l’excellent Tai Chi en début de l’été, revient donc avec cette suite (disponible en coffret avec Tai Chi), l’occasion de se replonger dans ce wu xia pian steampunk empli de références vidéoludiques.

Après l’excellente surprise que nous a offert Tai Chi, que peut receler Tai Chi Hero ? Le premier avait laissé un mariage en devenir, un méchant (toujours incarné par le réalisateur) avide de vengeance, et d’autres armes de destruction massive s’approchant du village (les terribles canons d’Allemagne). Le village Cheng pourra-t-il survivre ?

La surprise n’étant plus au rendez-vous, cette suite aurait pu décevoir, et pourtant ce n’est pas le cas. Pour éviter de verser dans la routine, le réalisateur opte d’une part, de continuer son histoire, qui reprend où le premier s’était arrêté. Il peut ainsi développer ses personnages (Stephen Fung devenant un méchant très très méchant mais, par bien des côtés, torturé et pathétique dans sa quête de vengeance confinant à la bêtise), et son héros, d’abord stupide à cause de sa corne, finit par s’élever et gagner en intelligence et en subtilité – trouvant par là même l’amour.

Mais ce récit est aussi le moyen d’expliquer pourquoi le kung-fu chen est interdit aux étrangers, et de finalement justifier le titre de ses métrages. Pour autant, le spectateur qui découvrirait ce Tai Chi Hero sans avoir vu le film précédant ne serait pas perdu, car une voix off, après une introduction qui n’a que peu avoir – pour l’instant d’après elle – avec les événements qui nous intéresse, raconte, sur un ton décalé et humoristique et sur fond musical – ce qui s’est produit dans Tai Chi.

Stephen Fung pratique aussi la technique classique mais agréable de la surenchère. Ici, pas de char d’assaut, mais d’énormes canons – hélas peu utilisés – et une aile volante, permettant des séquences steampunk absolument magnifiques, avec largage de bombes et autres délires propres à enflammer l’imagination. Les rouages, capables d’imiter le kung-fu, sont eux-aussi amenés avec intelligence et offrent un fun de tous les instants, ce qui permet, outre de jolies séquences, d’amener les thématiques du films, plus profond qu’il n’y parait de prime abord. Stephen Fung, avec son scénario, oppose ainsi philosophie séculaire et technologie – certes pas forcément de manière très subtile – et pose les limites de chaque camp. Si la technologie est bruyante et potentiellement dangereuse si mal utilisée, la philosophie passéiste empêche parfois de voir les qualités d’un homme ne rentrant pas dans ce moule, comme le grand maitre et son fils, qui n’a jamais aimé le kung-fu mais a toujours rêvé d’être un inventeur, et son père incapable de voir le talent de son fils hors du cadre du kung-fu. Bien sur, Stephen Fung résoudra tout cela avec plein de bons sentiments lors d’une fin un peu trop happy-end, mais les thématiques attirent l’oeil et font sourire. De plus, le réalisateur, en plongeant dans le lien vers la nature, semble dire que la technologie est néfaste, mais force ses héros à l’utiliser au final pour vaincre, ce qui crée une dichotomie des plus intéressante.

taichi hero 2

Outre le fils du grand maitre, un nouveau méchant voit le jour, joué par Peter Stormare, qui incarne un mélange de mentor et de savant fou, et qui semble s’amuser comme un fou. Hélas, il n’est pas assez présent à l’écran, mais toutes ses apparitions restent inoubliables. Les combats (chorégraphiés par Sammo Hung) et la réalisation, délaissent quelque peu le côté jeu vidéo (sauf lors d’un final sous forme de duels vidéoludiques délirants) mais sont toujours aussi bien chorégraphiés et diversifiés. Des effets digitaux et des séquences complètement too-much ne peuvent que séduire l’amateur, avec l’ajout de petits délires, comme les reflets des combattants dans l’oeil d’un autre, certes très classique mais excellent, ou la bande-son metal lors de la seule séquence où notre héros se retrouve à nouveau possédé par sa corne. A cela s’ajoute de l’humour, des manigances et des trahisons, qui forment un ensemble des plus digeste, qui, hélas, se termine un peu plus brutalement.

L’histoire, en effet, emmène nos personnages à lutter contre l’armée pour défendre le village, et à aller quérir des alliés officiels. Cependant, le final, bien que brutal, est franchement surprenant, et laisse envisager un épisode 3 inspiré de Frankenstein ! L’idée laisse rêveur.

Comme souvent chez Wild Side, les bonus offrent un côté promotionnel des plus dérangeant (et inutile, le spectateur les regardant ayant en général vu le film). Le documentaire « écrire une suite » n’apporte ainsi rien d’autre que des extraits du métrage entrecoupés d’interventions des acteurs disant à quel point le diptyque est génial, inédit, fabuleux. Filmer les combats n’est qu’une suite d’extraits de films, entrecoupés de courts intermèdes des participants, expliquant soit la différence entre le tai chi et d’autres arts-martiaux, soit à quel point ils se sont entrainés. Sammo Hung, le chorégraphe, explique que ce qu’il filme est parfait. Encore une fois, aucun point de vue objectif, mais juste un document promotionnel du genre à donner envie d’acheter le DVD. Le making of (en trois parties, complétant celui du premier film) est, par certains côtés, des plus intéressants. La conception des objets steampunk, certains extraits d’interviews, et d’autres petites choses, nous apprennent beaucoup sur le film, mais l’auto-congratulation constante reste des plus agaçante. Ainsi, si au final les bonus agacent beaucoup, il reste quelques moments intéressants pour rattraper le tout.

Tai Chi Hero est disponible chez Wild Side depuis 28 aout.