Silent Hill, premier du nom, reste à ce jour une des meilleures adaptation de jeu vidéo au cinéma grâce au talent de Christophe Gans, son réalisateur. Pour cette suite, Gans cède sa place à Michael J. Bassett. L’homme sera-t-il à la hauteur, capable de succéder au grand cinéphile qui nous a offert des films comme Crying Freeman ou Le Pacte des loups ? Metropolitan nous permet, à travers ce DVD, de juger par nous-mêmes. Par Yannik Vanesse.
Silent Hill est, à la base, une saga vidéoludique particulièrement flippante, une plongée dans un esprit torturé, une épopée à travers la ville sombre et malsaine qu’est Silent Hill. Très cinématographiques, les jeux ne pouvaient qu’attirer producteurs et réalisateurs en vue d’une adaptation. Si le nom de Christophe Gans n’avait pu, à l’époque, que provoquer l’engouement, difficile de ressentir autre chose que de l’appréhension en sachant Michael J. Bassett à la réalisation de cette suite. En effet, après avoir réalisé le très moyen La Tranchée, l’homme s’était attelé à un projet attendu au tournant, Solomon Kane. Le personnage torturé, sombre, âpre, de l’immense écrivain Robert Howard avait été transformé, sous les mains de Bassett, en un DTV basique d’heroïc fantasy, aussi caricatural que manichéen. Aussi, le savoir aux commandes de Silent Hill: Revelation ne peut que rendre méfiant, malgré son petit discours auto-congratulant qu’il débite en introduction du DVD.
Pourtant, le début s’avère intéressant. Après un menu déroulant gentiment malsain, le spectateur se retrouve plongé, avec son héroïne, dans une fête foraine de cauchemars qui fait immédiatement penser au troisième opus du jeu. Son héroïne y erre, hagarde. Elle est incarnée par Adelaide Clemens qui, si elle ne joue pas de manière particulièrement remarquable, possède le physique de l’emploi, ressemblant diablement au personnage du jeu. Les décors du rêve sont superbes, l’ambiance assez effroyable – exactement ce que nous pouvons espérer. Des créatures gentiment déviantes y errent (le manège avec des humains torturés au lieu des chevaux de bois est excellent) mais pourtant, quelque chose cloche. Le réalisateur ne cesse en effet de filmer en gros plan un lapin en peluche. Evidemment, au bout de plusieurs fois, l’animal tourne la tête vers la caméra… En agissant ainsi, Bassett ôte toute surprise. Et, hélas, tout le film sera plombé par la lourdeur de la réalisation, Michael J. Bassett n’étant définitivement pas très doué en matière de subtilité. Gros plan pour que le spectateur sache que quelque chose va se passer, des zombies qui mangent des burgers de chair au ralenti, rien ne sera épargné au spectateur en terme de poncifs et de prévisibilité. De plus, le film ayant été, à la base, tourné en 3D, Basset s’amuse régulièrement à lancer du sang ou des doigts en direction de l’écran (parfois, les trucages sont même très visibles) mais refuse d’utiliser la profondeur de champs de manière intelligente ou inédite (on est loin d’Avatar).
Le scénario, lui, essaie de coller au premier opus tout en racontant une histoire bourrée de poncifs allant à l’encontre de ce qui avait été fait. Sean Bean est ainsi de nouveau présent, fuyant en compagnie de sa fille (à présent adolescente) l’ordre qui cherche à récupérer Heather, pour qu’elle serve d’avatar à leur dieu. Ainsi, rapidement, l’histoire devient non seulement peu intéressante, mais prévisible en diable. Difficile, face à ce jeune homme qui plaque sa vie pour suivre Heather en direction de Silent Hill, de ne pas deviner que ses motifs dissimulent quelque chose. Difficile de ne pas sourire en découvrant que, si le père passe son temps à déménager et à fuir l’ordre, il ne s’éloigne pas plus de quelques heures de la ville maudite.
Une réalisation lourde, un scénario digne d’un nanar. Restent de très bons effets spéciaux, même s’ils sont souvent mal utilisés. Encore une fois, Bassett oublie de distiller ses effets par petites touches, et déverse des tonnes de feu chaque fois qu’il peut, ou encore transforme le démon Alessa, que Christophe Gans s’était attelé à créer en laissant une certaine innocence dans ses traits, en démon aux yeux noirs, à l’apparence purement maléfique. Même la Pyramide perd de son côté impressionnant. Certaines créatures sont intéressantes, comme l’araignée-mannequin, mais la transformation des hommes en mannequins est mal amenée, devenant ridicule. Malcolm McDowell y fait une apparition, semblant beaucoup s’amuser en roi de l’asile de Silent Hill. Et si sa séquence apporte un côté mystique et décalé intéressant, tout à coup, il se transforme en créature ricanante, et la séquence vire au ridicule. Dommage, encore une fois. Silent Hill: Revelation ose même se terminer par un happy end absolument inadapté.
De nombreux bonus s’ajoutent à cette édition. Tout d’abord, les scènes coupées n’apportent rien et ne font que confirmer le peu de compétences du réalisateur, encore accentué quand on écoute son commentaire de ces scènes. Il s’enfonce dans sa satisfaction, faisant naître un écart énorme entre ce que le spectateur regarde et ce que lui raconte. Le making of est certes long et complet, mais tellement dégoulinant d’auto-congratulation que c’en est dérangeant. Tout le monde passe son temps à dire à quel point le film est bon, respectueux de l’univers, que les créatures sont géniales, que le scénario est magnifique, et bien d’autres choses. Regarder ce documentaire après avoir vu ce film donne une impression de foutage de gueule assez hallucinant. Les coulisses de Silent Hill n’apportent pas grand chose, les techniciens décrivant comment ils réutilisent certains décors pour en faire d’autres, ou les costumes, donnant surtout une impression de remplissage. La découverte de l’atelier de création de monstres n’est pas dénuée d’intérêt, mais reste trop courte. Michael J. Bassett nous choisit ensuite trois scènes, dont il commente les différences entre le storyboard, la prévisualisation et la séquence finale. Si l’intention est intéressante, et certains propos instructifs, l’auto-satisfaction du réalisateur, persuadé d’avoir fait un film d’horreur terrifiant et rempli d’idées géniales, dérange et agace au plus haut point. La création du générique est intéressante. Les personnes interviewées expliquent très bien ce processus créatif et rendent cette partie passionnante, et pour le spectateur voulant tout savoir sur le film, et pour le néophyte qui en apprend plus sur la manière de faire un métrage. La présentation de l’attraction tirée du film – et, heureusement, des jeux – est totalement anecdotique mais permet à Michael J. Bassett de s’auto-congratuler encore un peu. Le commentaire audio, de son côté, alterne les informations intéressantes et instructives, avec des moments où Michael J. Bassett avoue avec lucidité avoir raté telle ou telle scène. Hélas, le réalisateur se félicite aussi bien souvent de séquences effroyablement ratées.
Yannik Vanesse
Verdict : Silent Hill: Revelation est un film raté, qui prouve encore une fois que Michael J. Bassett n’est pas capable d’adapter une franchise d’envergure. A nouveau, il tire le film vers le bas, usant de grosses ficelles et de poncifs. Triste constat.
Silent Hill: Revelation est disponible en DVD, Blu-Ray et Blu-Ray 3D chez Metropolitan, depuis le 28 mars.