Coffret Sonny Chiba – Ninja + Samurais (Samourai Reincarnation, Ninja Wars) (DVD)

Posté le 17 janvier 2012 par

Au programme de ce coffret au titre très inspiré de « Ninja & Samurai »… des ninjas et des samuraïs. Et Sonny Chiba, aussi. Son nom est également signalé comme argument de vente après tout… Par Tony F.

Loin de moi l’idée de remettre en question les politiques d’édition des plus étranges de Metropolitan/HK Video. Mais lorsqu’on voit l’exploitation sans queue ni tête que fait le distributeur de son catalogue, le spectateur lambda est tout de même en droit de se poser quelques questions. Enfin, qu’importe le marketing ou les soixante sorties hasardeuses en quelques mois… Le tout, c’est que le passionné du genre (ou de genre, cela ne tient qu’à vous) y trouve son compte. Au programme donc de ce coffret : « deux films avec Sonny Chiba« . Au final, on pourrait dire un et demi, parce que si le monsieur a un rôle de choix dans Samurai Reincarnation, sa place dans Ninja Wars se révèle des plus anecdotiques… mais nous y reviendrons plus bas.

Ninja Wars par Saito Mitsumasa

J’emprunte, en guise de prélude et si vous le permettez, le synopsis énoncé sur Cinemasie.

« Une prédiction désignerait comme maître du pays celui qui se ferait aimer par la belle Ukio, la fille du Shogun. Un sorcier, travaillant pour un seigneur avide de pouvoir, enlève une élève ninja ressemblant étrangement à Ukio pour fabriquer une potion d’amour. Seul un autre ninja semble capable de contrer leur projet. »

Cela vous semble simple, classique et efficace ? Eh bien il m’aura fallu trois visionnages pour le comprendre…

La faute à la réalisation ? Au spectateur ? Allez savoir. Ce qui est sûr, c’est que la pellicule est brouillonne. Oui, c’est un euphémisme. On ne parle pas ici du petit brouillon qui se suit en nous faisant passer un gentil moment confus, non non. Il s’agit bien là d’un gros bordel, où les scènes s’enchaînent avec un cheap plus ou moins prononcé mais omniprésent, donnant naissance à certaines batailles originales, mais un brin chaotiques. Ceux qui l’ont vu se souviendront à jamais du combat aquatique filmé depuis la surface qui ne laisse transparaître que les mares de fluides d’un des combattants. Fluides qui s’avèrent par ailleurs être des sortes de diarrhées gluantes… C’est beau le Japon. Et pourtant, au milieu de ce fatras ahurissant, on peut se prendre au jeu, surtout si l’on est amateur du genre.

L’œuvre ne manque pas de qualités : jolis plans, photographie aguicheuse et personnages forts (en gueule, mais pas seulement), sans oublier la petite scène de viol au milieu, histoire de capter l’attention des trois au fond qui somnolent, avec une double paire de seins un peu plus loin. On retient le chalant comme on peut, et même si la séquence d’ouverture, une bataille sur fond de réflexion profonde (« Pourquoi les hommes se battent-ils ? », vous avez trois heures pour méditer là-dessus) ainsi que les temps forts viennent dynamiter le récit, et tout et tout, on se demandera quand même bien où est passé Sonny Chiba.

Certes, on ne nous ment pourtant pas. L’homme est bien dans le film. Son temps de présence se comptera sur une poignée de minutes, ses répliques sur une poignée de doigts, et son charisme sur la somme de tous les autres personnages (sauf le héros, parce que c’est Sanada Hiroyuki, quand même). Alors « deux films de Sonny Chiba », simple argument marketing ou bien volonté de glisser une péloche à la fois généreuse et attachante aux côtés d’un « vrai » Chiba ? La question reste entière. Dans tous les cas, une chose demeure : Ninja Wars est de ces films « Wtf? » qui ne laissent pas indifférents. Embrumé et fauché autant qu’il s’avère être barré, original et burné, le métrage ne sera pas du goût de tous, mais pour peu que l’on y entre… c’est de la bonne !

Samurai Reincarnation par Fukasaku Kinji

Le second DVD du coffret nous donne à voir un film à la fois moins barré, moins généreux, mais doté d’une richesse puisée dans le conventionnel doux-amer et les effets spéciaux de son temps… Samurai Reincarnation nous plonge au cœur des guerres féodales, lorsque le jeune Amakusa Shirō, leader d’un groupe de rebelles chrétiens massacrés, revient à la vie grâce à d’obscures puissances démoniaques dans une scène d’ouverture qui en dit long quant au niveau visuel de ce que nous offrira la suite, dans le bon (les décors et les divers jeux de couleurs) et dans le moins bon (les éclairs dessinés et les filtres divers…). Pas vraiment heureux à l’idée de voir les têtes de ses compagnons plantées au bout de piques, le jeune guerrier maléfique criera, vous vous en doutez (et moi aussi) vengeance contre le Shogun. Il va, pour se faire, s’entourer de puissants alliés, tous fraîchement recrutés dans l’au-delà. Ceci prendra tout de même une bonne demi-heure durant laquelle le spectateur, incrédule, assistera cinq fois à la même scène : un homme (ou une femme) arrive aux portes de la mort, et le méchant rebelle sort d’un buisson (c’est à la mode ces derniers temps) pour lui proposer une résurrection. Persuasif le gamin, puisqu’il va même se faire un allié de Musaishi Mutaito. Sur leur route, un seul homme peut se dresser : Yagyu Jubei, rôle ici endossé par un Sonny Chiba borgne et tout de noir vêtu. Le programme me fit d’ores et déjà baver.

Fukasaku Kinji nous signe ici un film aux allures de fresques, une histoire adaptée de la nouvelle Makai Tensho (depuis largement reprise sous divers supports) et qui, à mille lieues des adaptations de fin de carrière du réalisateur, est ici sublimée par la pellicule, nous rappelant si nécessaire qu’avant Battle Royale, l’homme avait à son arc de très belles cordes. Photographiquement irréprochable (au pire on pourra trouver un certain charme aux effets visuels depuis longtemps dépassés), l’œuvre préfère prendre son temps en distillant habilement l’action par de rapides touches, rares (compte tenu de la durée totale du métrage) mais toujours épiques. Le cœur du récit se situera donc plus sur les relations entre les personnages, plaçant Jubei dans la position reprise moult fois (avant, pendant, et après) dans la culture mondiale du héros devant traquer et affronter tour à tour les esprits démoniaques qui lui barrent la route, chacun présentant une étape de son parcours initiatique.

Seul film du coffret faisant honneur à Sonny Chiba, Samurai Reincarnation brille, surprend et se révèle un plaisir de tout instant. Au final, il s’agit là de deux très bons films… C’est peut-être tout ce qui importe après tout.

Verdict : Pour une trentaine de deniers, c’est un coffret très hétérogène que nous délivre HK Video. D’un côté, un Ninja Wars barré, dynamique et embrumé, qui sent le bis fauché bien bas. De l’autre, un Samurai Reincarnation plus posé, plus riche, plus épique, et par bien des aspects plus contemplatif. On appréciera donc l’un ou l’autre, voire même les deux si vous êtes chanceux, et l’on fera à ce coffret une jolie place dans une collection toujours trop peu chargée. Ceci étant, si c’est du Sonny Chiba que vous cherchez, je ne saurais trop vous conseiller que de vous rabattre sur la sortie de ce mois-ci, le coffret Guerriers de l’apocalypse/Dragon Princess, qui lui, pour le coup, est vraiment un duo Chiba…

Tony F.

Coffret Sonny Chiba – Ninja + Samurais (Samourai Reincarnation, Ninja Wars), disponible en DVD, édité par HK Video, depuis le 17/01/2012.