La Maison de la Culture du Japon a reçu début décembre Kanamori Jo et Noism, qui ont fait danser les morts dans Nina – Sacrifice Matérialisé (VER. BLACK). Compte rendu de la représentation ! Par Dorian Sa.
«Un chef-d’œuvre aux multiples interprétations.»
Asahi Shinbun (grand quotidien japonais).
À propos de Kanamori Jô
Élève de Maurice Béjart en 1992 à l’École-Atelier Rudra de Lausanne, Kanamori marie ensuite techniques classiques et diversité contemporaine aux Pays Bas dans Theater II de Jiri Kylián, avant de se perfectionner au ballet de l’Opéra national de Lyon et au Gothenburg Ballet de Suède…
En 2004, il réunit dix danseurs et danseuses talentueux pour fonder NOISM, une compagnie multi-genre acclamée dans son pays et à Paris avec Work in Progress.
Après avoir parcouru le globe, il nous revient plus polymorphe que jamais à travers Nina, un spectacle sans faille qui a fait vibrer le public de la Maison de la Culture du Japon.
Nina
Entre mort et vie, quelque part sur un plateau de scène, des mannequins en peau de chair servent d’objets cérémonieux à de sombres danseurs en costume d’ombre. Raides et légers, les fantoches sont déplacés au rythme des jours/nuits que sont les noirs et clairs de ce monde de pénombre.
Jour. Soudain, les poupées relâchent leurs têtes, leurs membres s’articulent. Nuit. Des pas de deux se mettent en place. Jour. Les hommes sont des marionnettistes planifiant les gestes de leurs pantins. Les ballerines apprennent patiemment, passant entre les mains agiles de leurs créateurs, et portées au firmament des doigts comme le prolongement des bras.
Nuit. Les femmes savent danser d’elles-mêmes. Jour. Leur ballet débute côté cour, d’abord par saccades d’automates, puis par singeries « zombiesques », avant de glisser côté jardin avec la grâce d’un cygne.
Les corps beaux ont pour eux la puissante maîtrise, les courbes sveltes ont pour elles la fine précision. Les danseuses découvrent leur liberté dans les airs. Il est maintenant impossible de leur imposer la moindre arabesque, le moindre balancé qu’elles n’aient pas programmés. Chacun s’entremêle en refusant le maintien de l’autre. La guerre des sexes est déclarée…
Entre rigueur classique, figures quasi hip hop et complexité des enchaînements à plusieurs, Noism sublime une chorégraphie calculée au millimètre. Pour l’originalité, un rien de mime ponctue une mise en scène théâtrale audacieuse, tandis qu’un bref clin d’œil aux zombies de Michaël Jackson dans Thriller amuse beaucoup. Un moment de bonheur limpide auquel on repense longtemps.
Dorian Sa.