Coffret : Le Bras armé de la loi 1 et 2 (Long Arm of the Law) de Johnny et Michael Mak (DVD)

Posté le 14 juin 2011 par

Lorsque les frères Mak se lancent dans le polar social, ça donne une magistrale tétralogie dont HK Video nous offre les deux premiers opus en coffret ! Par Tony F.


S’il y a bien un genre qui aura marqué le cinéma Hongkongais des 80’s, c’est le polar. Nerveux, déjanté, barré, héroïque et même épique, bref, à toutes les sauces. Parmi ce lot monumental de films sortis, Johnny et Michael Mak ont marqué la décennie au fer rouge avec les Long Arm of the Law . Et par bonheur, ils font partie du lot “sorties asiatiques du mois” de Metropolitan. Enfin, pas tous, non, juste les deux premiers. Deux films d’une même saga à la fois assez semblables et pourtant bien différents, pour la simple raison qu’un changement majeur est venu bouleverser le cinéma de l’ancienne colonie entre 1984 (date du premier film ) et 1987 (date du second). Et si vous ne voyez pas de quoi je veux parler, nous l’évoquerons de toute façon dans ces lignes!

Long Arm of the Law de Johnny Mak : To Live and Die in H.K.

Produit par Sammo Hung, Long Arm of the Law, première (et dernière) réalisation cinématographique de Johnny Mak , se présente comme une œuvre sociale, viscéralement sombre et pessimiste. Filmée caméra à l’épaule, l’intrigue suit la destinée d’un groupe d’amis, tous continentaux, qui tentent le tout pour le tout : entrer clandestinement à Hong Kong et braquer les bijouteries puis repartir assez riches pour être tranquille le restant de leurs jours. On le devine très vite, leur parcours sera semé d’embûches et de violence. Une telle recherche du “rêve hongkongais” ancrée dans le contexte politique et financier de l’époque (la signature de la rétrocession survenait à la fin de cette même année) ne pouvait être heureuse, et le regard que porte Mak sur sa ville est emprunt d’une noirceur qui imprègne jusqu’au cœur des personnages.

Ceux-ci, bien loin de l’ Heroic Bloodshed de John Woo (la vague “Mark Gor” ne sévira que deux ans plus tard) ne sont motivé par aucune forme d’honneur ou de vengeance. Pire, ce ne sont même pas des truands mais de simples clandestins motivés par l’appât du gain et par le seul espoir de vie heureuse que représente le pactole. A ce titre ils ne reculeront devant rien et n’hésiteront pas à plonger tête la première dans la violence la plus totale. Le réalisateur, par les protagonistes et par leurs motivations, met ainsi en avant plusieurs éléments : d’une part le contraste saisissant entre d’un côté la Chine, ses habitations de fortunes et ses chemins boueux, où il fait sombre et où il pleut, et Hong Kong, mégalopole vivante et séduisante, terre de toutes leurs opportunités les plus folles. Ironie flagrante, c’est dans l’endroit aux attraits les plus visibles et séduisants que les protagonistes connaîtront les pires déboires. Ainsi, avant même de montrer le casse à proprement parler, Johnny Mak prends soin de laisser ses personnages se noyer dans les milieux du jeu, de l’alcool et de la prostitution, et si toute la première partie du film (la préparation de l’entrée clandestine à HK) ne s’embarrasse pas de présentations, la seconde partie, elle, nous montre comment l’être humain peut se laisser galvaniser par les illusions qu’on lui montre, tout en laissant se profiler pour certains d’entre eux des motivations secondaires : un amour de jeunesse retrouvé, la nécessité de disparaître, ou simplement le fait de subvenir aux besoins de sa famille, autant de raisons qui rendent les personnages plus humains aux yeux du spectateur, et donc forcément plus attachants, d’autant plus lorsque les premières scènes du film nous les montre sous un mauvais jour.

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La mise en scène est à la fois crue et endiablée, et nous offre une photographie crade et réaliste, ne nous épargnant pas grand chose. Désespérée et sous une tension permanente, le réalisateur parvient à nous laisser constamment sur la défensive, à l’image des braqueurs, prêt à assister à tout moment à un carnage. Mêlant polar, politique et documentaire, le film arrive à faire cohabiter discours social (et donc habituellement bavard) et gunfights viscéralement prenants, et difficilement oubliables. Car il est impossible de ne pas mentionner la fin du film, véritable apothéose cinématographique qui voit tous les éléments, explicites et implicites du film converger vers le point final, l’explosion de violence, en une course poursuite effrénée au cœur de la Walled City.
Long Arm of the Law est donc une réussite totale, un chef d’œuvre d’action et de polar intelligent, abordant le genre comme peu ont su le faire. Simplement culte.

Long Arm of the Law 2 de Michael Mak : Police on Fire

Le cinéma hongkongais n’a jamais eu de difficultés (ni de scrupules) à exploiter un filon, quitte à faire des suites à outrances, même quand l’intrigue du film originel ne laissait aucune place à une continuité. C’est ainsi que les frères Mak lancent le projet Long Arm of the Law 2 , Michael prenant place derrière la caméra, et Johnny restant cette fois-ci simple producteur.

Toujours dans la logique d’un discours politico-social à la sauce polar, l’intrigue suivra cette fois-ci le parcours de trois continentaux ( Ben Lam, Yuen Yat Chor et le très reconnaissable Elvis Tsui) qui se verront proposer un marché par la police : s’infiltrer dans le milieu des gangs chinois en échange de leurs liberté et papiers hongkongais. Il seront aidés, dans cette tâche, par Alex Man , ici dans le rôle d’un flic infiltré.

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Changement de contexte dans ce second opus, puisque les héros ne seront plus des criminels, mais du côté de la loi. Un élément qui va permettre de dégager un nouvel angle de réflexion politique en nous montrant une police peu scrupuleuse, aux méthodes moralement très douteuses, n’hésitant pas à utiliser les trois prisonniers (aux méthodes par ailleurs tout aussi peu orthodoxes) comme de vulgaires outils, des pions sans importance. Moins antipathiques, voir même parfois carrément pathétiques et tragiques (la storyline de Yuen Yat Chor l’est, à plus d’un titre, et celle d’ Elvis Tsui lui en fera baver) ils seront pour le spectateur plus attachants que le gang du premier opus, puisque l’on se prends forcément au jeu de ces trois clandestins plus “victimes” de la situation que réels criminels. Moins enragés, moins furieux, leurs péripéties sont finalement plus calmes, du point de vue de la mise en scène en tout cas, qui se révèlent nettement moins riche en tension et en coup de sang.

Long Arm of the Law 2

Car oui, nous sommes en 1987, et c’est l’année précédente que John Woo jetait une pluie de pavés dans la baie avec A Better Tomorrow , influençant de façon irrémédiable et totale tous les polars d’action à venir. Ce Long Arm of the Law II ne fait pas exception. Les couleurs sont plus chaudes, la mise en scène moins “documentarisée”, les gunfights plus stylisés, et les trois protagonistes se retrouvent empreints d’une amitié et d’un honneur fraternel, de cette loyauté indéfectible les uns envers les autres, héritée (faut-il encore le rappeler?) des Heroic Bloodsheds si chèrement recyclés par John Woo. Pour autant, cette influence n’empêche pas Michael Mak d’apposer sa patte à son œuvre, en exacerbant, par exemple, la violence et le gore dans certaines séquences, que certains trouveront sans nul doute excessives, puisqu’elles ne servent pas franchement le propos, là où les scènes d’action, elles, sont bien plus rares que dans le premier film. Reste toutefois la scène finale, qui pour sa part renoue avec celle de son ainé en proposant une fusillade endiablée et désespérée, véritable conclusion/défouloir de haute volée.
Long Arm of the Law était un chef d’œuvre (et l’est d’ailleurs toujours); Long Arm of the Law II est un excellent film, un polar des plus réussis, au discours politique cinglant et aux scènes d’action détonantes. A noter également que Elvis Tsui crève littéralement l’écran dans ce film, et sera repris par le réalisateur pour les opus deux opus suivants (dans des rôles différents, toutefois.). Finalement, le seul véritable défaut de ce second film… c’est d’être le second.

En Bref :

Si l’on peut regretter qu’un coffret regroupant les quatre films ne soit toujours pas d’actualité, on ne boudera tout de même pas notre plaisir devant ces deux “Bras Armés de la Loi”, œuvres majeures du polar hongkongais. Deux galettes qui nous offrent le strict minimum côté bonus, mais dont les seuls métrages valent plus que le détour. Incontournables !

Tony F.

Coffret Le bras armé de la loi – Le bras armé de la loi 2 (Long Arm of the Law 1&2) de Johnny et Michael Mak ,édité par Metropolitan, Disponible depuis le 03/05/2011.