Cannes J-10 : Miike Takashi à Cannes ! Retour sur Hara-Kiri en attendant Wara No Tate (Shield of Straw)

Posté le 6 mai 2013 par

C’est la seconde fois que Miike Takashi a les honneurs de la compétition officielle à Cannes. Avant Shield of Straw, à découvrir dans une petite dizaine de jour, Hara-Kiri avait été accueilli dans une indiférence polie lors du 64ème Festival de Cannes. Et pourtant, le film n’était pas exempt de qualité. Retour sur un excellent film, en attendant de voir quel la croisette va reserver au suivant !  Par Jérémy Coifman.

hara kiri

Le Japon au XVIIème siècle. Le samouraï Hanshiro se rend dans la résidence du seigneur Li. Il demande au chambellan Kageyu l’autorisation de se faire hara-kiri en place publique pour laver son honneur et mourir dans la dignité. Craignant un « hara-kiri pantomime » de mendicité, Kageyu tente de le décourager.

L’introduction est belle : un générique superbe, des longs travellings nous introduisant dans le lieu du drame, et un Miike Takashi qui prend son temps. Les enjeux sont clairement posés et le respect du chef-d’œuvre de Kobayashi (la critique ici) transparaît à chaque plan. Comme pour 13 Assassins (la superbe critique de Antoine Benderitter ici) , Miike semble assagi, laissant sa frénésie formelle au vestiaire. Il invoque autant Kobayashi que Naruse ou Ozu dans des flashbacks emprunts de mélancolie et de poésie.

Au-delà de ce classicisme formel de tous les instants, Miike colle au plus près de l’esprit du film de Kobayashi. Tout est affaire de regards, de tensions palpables, de désespoir. Le film de Miike comme son aîné joue avec les temporalités, les points de vue, et même les genres. Tour à tour film social ou mélodrame, le film se vit et c’est là la plus grande réussite de ce remake. L’immersion est totale, l’émotion affleure. Le temps semble se figer, s’étirer lors des flashbacks comme dans le retour au présent.

Les effusions de sang sont peu nombreuses, mais les éclairs de violence sont terribles. On retrouve cette propension de Miike à faire durer le calvaire des personnages (douloureux premier flashback). Mais c’est le mélodrame social qui prend le pas. Miike filme le calvaire de ces petites gens, victimes et prisonniers d’un système féodal aux coutumes figées et cruelles. Même si le drame est appuyé, que le sort s’acharne, impossible de rester de marbre. Le temps passe, les drames se multiplient et le point de vue que l’on a des personnages est en constante évolution.

Même si on peut se poser la question de l’intérêt d’un tel remake, surtout quand on voit à quel point il épouse les traits de l’original, on ne peut nier toute la noblesse et la force qui se dégage du long métrage de Miike. Ichikawa Ebizô est superbe (difficile toutefois d’égaler le monument Nakadai Tatsuya). Sa beauté flamboyante (le combat final à tomber), son rythme lancinant, et son scénario toujours pertinent, font de Hara-Kiri une réussite indéniable. Miike ne s’est sûrement pas assagi, mais le classicisme lui sied à merveille.

Jérémy Coifman.

Verdict :

Hara-Kiri est disponible en DVD  : Bodega Films fait du bon boulot sur l’édition Blu-ray, un mixage DTS-HD MA 5.1 sublime, une image des plus soignée (malgré un petit grain dans les scènes d’intérieur), en somme des qualités optimales pour profiter du film. Pour les bonus, c’est du zéro pointé. Une bande-annonce et puis le néant. Dommage.

Wara No Tate (Shield of Straw) sera projeté au 66ème Festival de Cannes.

Retrouvez notre critique dès mercredi prochain !