Blu-Ray – Godzilla de Honda Ishirô : Un film essentiel

Posté le 5 septembre 2015 par

Alors qu’Hollywood a offert il y a peu une nouvelle version de l’iconique créature qu’est Godzilla (après une première version particulièrement immonde en 1998, réalisée par Roland Emmerich), Metropolitan a eu la formidable idée d’éditer en blu-ray le film original, datant de 1954, permettant ainsi aux jeunes générations de ne pas oublier comment est né ce monstre mythique.

Parler de Godzilla sans évoquer le traumatisme que représente la Seconde Guerre Mondiale est impossible. Pour nous, ce traumatisme est né du massacre des Juifs par Hitler, de l’annexion de la France, de la résistance. Pour le Japon, par contre, il y a eu la reddition après que les Etats-Unis aient largué deux bombes atomiques sur les villes de Nagasaki et d’Hiroshima. Le Japon dut vivre avec le souvenir horrible, choquant, de ce jour qui vit la destruction de ces villes, la mort de milliers de civils, ainsi que le cataclysme que représentent les retombées nucléaires.

Godzilla

Autant dire qu’en 1954 le choc n’est pas encore passé, loin s’en faut, et Godzilla est porté par le souffle de l’horreur face à ce que représente, d’une part, le danger du nucléaire et d’autre part, le risque d’inventer une arme terrifiante. Godzilla apparaît donc après que des essais nucléaires aient dérangé son sommeil, le monstre étant une créature préhistorique enfouie au fond de l’eau. Ishirô Honda attend longuement avant de dévoiler la créature, nous montrant d’abord ses ravages, la panique après que plusieurs bateaux aient chaviré, ou l’enquête, sur une île, conduisant à découvrir des empreintes de pas gigantesques, dans lesquelles sont coincés des fossiles qu’on pensaient disparus, et surtout, des traces de radioactivité.

Quand Godzilla apparaît enfin, le spectateur est époustouflé. Pendant les séquences de naufrage ou d’effondrement des maisons de l’ile, les effets spéciaux étaient déjà impressionnants, mais la créature elle-même est superbe, magnifiquement faite, et les maquettes qu’elle détruit d’un réalisme saisissant (à ce  titre, voir Godzilla détruire un train en marche laisse sans voix). Ainsi ce film, datant de 1954, se révèle bien plus crédible que nombre d’effets digitaux actuels, et le travail sur l’image de cette édition rend véritablement hommage à Godzilla.

MCDGODZ EC052

Le film, après nous avoir longuement fait attendre l’apparition de la créature mythique, la dévoile dans toute sa fureur, alors qu’elle apparaît régulièrement pour faire des ravages, finissant par cracher un feu radioactif sur les bâtiments qui s’enflamment. Le pays est dépassé, malgré toutes les tentatives pour arrêter le monstre. Cependant, un scientifique pleure le désir de détruire Godzilla, qui devrait être analysé, étudié. En cela, le message est clair : Godzilla représente le traumatisme de Nagasaki et d’Hiroshima et pour ce scientifique, au lieu de le combattre, il est nécessaire pour se reconstruire d’apprendre à vivre avec.

Si le monstre représente le danger du nucléaire dans toute sa fureur brute, incontrôlable et destructrice, un scientifique, seul espoir de lutte contre Godzilla, représente le créateur de la bombe H. L’homme qui a mis au point l’arme ultime, mais se refuse à la dévoiler, de peur de ce que l’humanité en fera. Quand finalement il n’aura pas le choix, il fera en sorte que cette arme ne puisse jamais être réutilisée. Là encore, le message est clair, et signifie plus jamais, plus jamais l’horreur d’Hiroshima.

Godzilla

Godzilla est donc autant un film catharsis, montrant l’abomination et les risques liés au nucléaire, mais aussi face au danger d’une science incontrôlable, ne devant jamais prendre le pas sur la conscience et l’éthique, les hommes de science se devant de penser à ce qui sera fait de leurs créations. Il s’agit d’un film essentiel, mais aussi d’un prodigieux film catastrophe, époustouflant et passionnant d’un bout à l’autre, qui nous arrive dans une superbe édition.

Dommage que Metropolitan n’ait pas livré de bonus à la mesure d’un tel chef d’œuvre, quelques interviews, making of et commentaires audio auraient été les bienvenus. Cependant, l’édition contient tout de même un bonus de taille, puisqu’il s’agit du Retour de Godzilla.

Le film qui marque le retour du mythique monstre radioactif arrive l’année suivante, réalisé par Oda Motoyoshi. Cette deuxième oeuvre mettant en scène Godzilla est un mélange entre le premier, et ce que deviendra par la suite la créature, à savoir un être combattant d’autres monstres titanesques.

le retour de Godzilla

Car, si Godzilla apparaît très rapidement (découvert par deux pilotes d’hydravions échoués sur une île), le spectateur le découvre aux prises avec un autre dinosaure gigantesque, un Anguilausaurus (surnommé Anguila), censément encore plus agressif que le monstre fétiche. N’ayant plus d’arme secrète pour se défaire des monstres, les autorités japonaises mettent au point un plan pour détourner Godzilla des côtes du pays, un plan qui, bien entendu, ne fonctionnera qu’à moitié.

Le film, de courte durée (et à l’image restaurée magnifiquement) montre ainsi de nombreuses scènes de destructions, plusieurs combats entre Godzilla et son adversaire, ainsi que des personnages attachants cherchant à vivre malgré la menace de destruction. Et si Godzilla, premier du nom, voyait la menace du nucléaire s’abattre sur le Japon, ce deuxième opus est plutôt le titre de l’espoir, dévoilant l’envie des Japonais de se reconstruire après la catastrophe et de ne pas baisser les bras. A ce titre, le patron de l’usine ravagée en est un criant exemple, avec sa volonté de reconstruire ce qui a été détruit et en attendant, de se focaliser sur une autre de ses succursales.

Ce discours passionnant et optimiste est servi par d’excellents personnages qui, bien que caricaturaux, sont très intéressants à suivre. Cependant, le plus gros du Retour de Godzilla est réservé par son monstre éponyme et fascinant, et des effets spéciaux prodigieux. Encore une fois, le film est bien plus impressionnant que nombre d’effets digitaux actuels. Entre les maquettes et autres techniques, les duels des deux monstres et leur destruction du Japon se révèlent d’une puissance rare, jusqu’à un final certes un peu long, mais aussi épique que dramatique. Dans ce final, les pilotes de l’aviation japonaise retrouvent leur gloire et prennent leur revanche.

Ce sont donc deux œuvres essentielles que nous offre Metropolitan, même si l’on regrette l’absence de bonus et d’analyses qui auraient été de bons compléments à ces films sublimes.

Yannik Vanesse.

Godzilla, de Honda Ishirô, disponible en DVD et Blu-ray chez Metropolitan (HK Vidéo) depuis le 10 mars 2015.

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