BIFFF 2017 – Antiporno de Sono Sion : Guilty Of Porno

Posté le 5 avril 2017 par

Cette année encore, le Brussels International Fantastic Film Festival nous régale avec la programmation du dernier Sono Sion, Antiporno, un pink-punk halluciné qui repousse toujours plus loin les expérimentations formelles et les questionnements de son auteur.

Roman porno revival ou roman porno final

Coup d’envoi de la résurrection du genre roman porno par la Nikkatsu. Un budget limité, quelques passage « ero » pour le cahier des charges, et pour le reste, carte blanche à l’auteur. Comme à l’époque. Sauf qu’il n’en fallait pas plus pour permettre à Sono de dynamiter le genre. C’est que le gars est un peu féministe, voyez-vous, et c’est une raison suffisante pour cracher un gros mollard à la figure de ses employeurs.

Ce qui n’aurait pu être qu’un huis-clos quasi-féminin va rapidement basculer dans un labyrinthe sexosophique. Satyrique, le film l’est. Envers les hommes déjà (qui s’en prenaient déjà plein la figure dans ses films précédents), mais aussi envers le milieu du porno, réduit à une bande de sadiques phallocrates et d’actrices dominatrices.

C’est qu’Antiporno est un film qui se dévoile par couches, démarrant de manière relativement limpide avant de verser dans un torrent de niveaux de réalités capables de perdre son spectateur.

Antiporno

Inland Blueception

Au commencement, il y a Kyoko (Tomite Ami), seule dans son univers de couleurs primaires (un appartement : un mur jaune, un mur rouge, un lit bleu… et le goût de Sono Sion pour la peinture), assise sur sa lunette royale, regard perdu dans le vide, mais qui a déjà un penchant pour les monologues profonds. La voilà rejointe par son assistante, dans l’attente d’une rédactrice en chef venue jeter un œil aux œuvres artistiques de la première. Ceci n’est qu’un point d’entrée simple au dédale qui suit.

Passé la première demi-heure, le film bascule dans une remise en question permanente (que l’on se gardera de révéler ici), inversant les rapports de force pour mieux sonder les questionnement sexuels des personnages. Passant du sadisme à la soumission, de l’humiliation à la folie, Sono observe les paradoxes du sexe en société (l’image virginale et la sexualité débridé) qui aboutissent à une vision destructrice des codes moraux et pressions sociales sur la question.

Peut-être le réalisateur livre-t-il ici son film le plus radical depuis sa période indépendante. A la fois objet théorique et puzzle filmique, Sono Sion parvient avec une commande à livrer un film totalement personnel, ambitieux dans sa narration et terriblement obsédant.

Anel Dragic.

Antiporno de Sono Sion. Japon. 2016. Présenté au Brussels International Fantastic Film Festival.