Sorte de cluedo amusant mais assez raté signé par un jeune cinéaste, The Blue Mansion stigmatise la société de son pays à travers une critique légère d’une famille fortunée de Singapour… Par Victor Lopez.
Qui a tué ce riche patriarche d’une famille de Singapour, qui règne en maître sur le marché de l’ananas, et que l’on retrouve mort dans son salon ? Cette question n’intéresse finalement pas grand monde. Pas même le mort en question, qui va hanter les lieux sous la forme d’un fantôme le temps de son enterrement. On le voit bien plus tourmenté par l’avenir de son entreprise familiale que par les circonstances de son décès. Et il a peut-être raison : alors que sa dépouille orne encore la devanture de sa demeure, sa famille commence déjà à se déchirer.
Le côté très ludique du film, sorte de cluedo fantastique et comique est rapidement perçu comme un prétexte à la description d’une famille en crise et dont chaque membre cache un secret que la mort de l’imposante figure paternelle va faire éclore. Du fils homosexuel à la fille alcoolique, chacun trimbale ses valises et se voit obligé de les ouvrir à cause de cet événement traumatique, mais aussi libérateur. A travers cette série de portraits aux multiples secrets, le réalisateur affiche l’ambition de peindre les travers de la société et l’envers du miracle économique asiatique.
Las, The Blue Mansion échoue à actualiser ses prétentions critiques et sociales, et se présente comme une bien classique variation des films de familles occidentaux. On a déjà suffisamment en France de mauvais drames familiaux pour ne pas avoir à s’imposer également des copies de Singapour, d’autant plus que Glen Goei n’a pas la subtilité d’un Edward Yang (Yi Yi) ou d’un Ishii Katsuhito (The taste of Tea) pour tordre le coup aux clichés du genre. L’exotisme qu’apporte la provenance du film ne remplace pas le talent et la mise en place d’un univers original.
Reste alors l’aspect comédie fantastique qui fait parfois mouche : l’arrivé d’un inspecteur indien suspicieux et à côté de la plaque rappelle le Peter Sellers de La panthère Rose, alors que l’émotion arrive à éclore entre les clichés grâce à l’implication et la croyance sincère que Goei leur accorde. Mais de bonnes intentions ne suffisent pas forcément à faire un bon film…
Victor Lopez
Verdict :