Ce n’est pas tous les jours que l’on peut voir un film népalais. Le Festival du Film d’Asie du Sud Transgressif (FFAST) en a justement projeté lors de sa dernière édition. Loot de Nischal Basnet est apparemment un des films qui ont marqué l’année 2012 au Népal, devenant rapidement « culte ». Ce film de gangsters vaut-il le détour ? Par Marc L’Helgoualc’h.
Résumé : Katmandou, Népal. Haku Kale, un cuisinier ex-taulard, décide de s’enrichir en braquant une banque. Pour ce faire, il recrute, au hasard des rues et des rencontres, quatre têtes brûlées – et désespérées de gagner de l’argent. Pendant plusieurs semaines, Haku Kale et sa bande vont préparer le casse parfait pour rafler plusieurs millions de roupies. Plan foireux ou idée géniale ?
Loot – Bande annonce – VOST FR par FestivalduFilmdAsieduSud
Loot commence par une chanson où l’on voit les acteurs vanter l’argent tout puissant, seul source de bonheur sur terre. Tout le film tournera autour de ce thème, ce qui est plutôt drôle (et sûrement provocateur) venant d’un pays dirigé par un parti communiste maoïste. Pour résumer, Loot, c’est un peu la philosophie de 50 Cent (« Get rich or die tryin’ ») développée dans un pays sous-développé et largement féodal. Un mélange qui a tout pour détonner : filmer des scènes d’action (braquage de banque, course-poursuite à moto) dans un contexte politique et social particulier (un Katmandou pauvre où le jeu clandestin et le trafic d’armes et de drogues sont monnaie courante) sous la surveillance de forces de l’ordre zélées. Sauf que… ce n’est pas du tout ce qui se passe dans Loot.
L’essentiel du film raconte le parcours des quatre braqueurs recrutés par Haku Kale, dans une mise en scène ultra-répétitive : quelques semaines avant le braquage, les cinq hommes sont réunis sur le toit d’un immeuble en construction. Chaque gros plan et arrêt sur image sur l’un des personnages amène un flashback. La présentation des personnages prend une bonne heure. Par la suite, on voit au moins cinq fois les braqueurs réunis sur le toit de l’immeuble, faisant semblant de regarder une carte de la ville ou les plans de la banque. Pourquoi se réunir sur le toit d’un immeuble en construction ? A part trouver un décor qui permet de filmer sans autorisation à coût réduit et donner à voir un panorama de la ville, aucun. Mais le réalisateur a vraiment l’air de se plaire sur ce toit. Même quand le vent manque de faire s’envoler les précieux documents des braqueurs.
On passera sur la mise en scène approximative : post-synchronisation souvent à l’ouest, faux raccords, ralentis inutiles et surtout les trop nombreux flashbacks (parfois moins de cinq minutes après la scène initiale !) qui plombent le rythme du film. Un film qui dure pourtant deux heures, soit une bonne demi-heure de trop.
Au programme du film : beaucoup de bastons où les coups de pied et poing sonnent comme des bruits de porte qui claquent. Un peu comme si DJ Vadim recréait les bruitages de Street Fighter sur Super Nes. La bagarre fait parfois place à une bluette sentimentale. Intrigue secondaire du film : l’un des braqueurs est amoureux d’une jeune fille riche promise en mariage avec un homme de sa condition sociale. Les scènes de badinage entre les deux tourtereaux ressemblent aux nombreux téléfilms indiens à l’eau de rose. Les amateurs de Bollywood apprécieront. Les autres soupireront de consternation.
Tout n’est pas non plus à jeter dans Loot. Les scènes filmées dans le tripot clandestin et le restaurant de Haku Kale tiennent la route. La fin du film est bien amenée. Enfin, la vision donnée de Katmandou tranche avec l’idée que l’on se fait de la capitale du Népal (un repère de hippies accros à l’encens et à l’héroïne). Nischal Basnet montre ici un Katmandou pauvre où seules la rapine et l’arnaque permettent de survivre. Un avenir peu radieux pour la jeunesse népalaise.
Verdict : Loot est un film décevant. Le budget limité ne justifie pas une mise en scène bâclée et trop répétitive. Espérons que Nischal Basnet rectifie le tir pour ses éventuels prochains films.