Ip Man – La Légende est née de Herman Yau (DVD)

Posté le 29 juin 2012 par

Préquelle/Spin-off officieux au dyptique de Wilson Yip (et en attendant un troisième opus qui ne saurait trop tarder), IP Man : The Legend is Born est une nouvelle preuve que l’on peut sortir une oeuvre honorable tout en surfant sur les tendances cinématographiques. A l’occasion de sa sortie DVD, un retour sur le film d’Herman Yau s’impose. Par Tony F.

Inutile de se perdre en conjecture sur le synopsis ou le bien-fondé (opportuniste, mais pas inintéressante, pourvu qu’elle soit bien menée) de la préquelle, le film étant déjà sorti en salles – et disponible par toute sorte de moyens détournés ou non – depuis maintenant deux ans, vous savez probablement déjà tout ce qu’il y a à savoir sur Ip Man : The Legend is Born, dans le bon comme dans le moins bon. Intéressons-nous donc à la structure même du récit, et à sa mise en scène. Car s’il y a un domaine dans lequel Herman Yau n’a plus rien à prouver, c’est celui de l’image. Là où Wilson Yip opte pour un rendu opposé d’un film à l’autre (les couleurs froides, ternes de la Chine occupée du premier opus contrastant avec les couleurs chaudes et vives du second), le réalisateur de The Legend is Born reste sobre, préférant une image lisse. épurée, qui ne s’interdit pourtant pas de nombreux écarts stylistiques. Entre nuances de couleurs et de gris sur les différents flashbacks et images d’archives, nous retiendrons la longue séquence d’introduction, voyant Ip Man et son frère adoptif arriver dans l’école d’arts martiaux. Entièrement filmée dans les tons sépia, la séquence révèle un choix de mise en scène à la fois old school et esthétique, en harmonie avec un prologue qui prend le temps d’installer clairement le contexte et les enjeux, et n’hésite pas à passer sur un brutal noir et blanc saturé le temps d’un plan crucial pour l’intrigue.

Cette limpidité de l’action sera au coeur de la mise en scène, et se retrouvera dans chaque aspect du métrage. En tant que préquelle, The Legend is Born se devait d’exposer les évènements qui conduirent le jeune Ip Man à devenir le maître (re)connu de tous. Ceci expliquant cela, les scènes de dialogues seront nombreuses et s’attarderont en détail sur chaque protagoniste, développant les intrigues amoureuses, les machinations politiques et martiales en filigrane (où, on en a l’habitude, l’étranger est le méchant) et les points de vues/thèmes abordés par les personnages et le récit. Si l’on peut reprocher au métrage de trop faire traîner ces séquences (d’autant que Dennis To, ici dans son premier grand rôle, brille plus par ses performances martiales que par son jeu d’acteur, encore trop superficiel), on appréciera la place donnée à chaque acteur du récit, d’autant plus que celui-ci jouit d’un casting des plus plaisants, de Yuen Biao à Lam Suet en passant par Fan Siu Wong, Betty Huang, ou encore même les caméos de Sammo Hung et Yip Chun, fils du véritable Yip Man au détour d’une scène de combat mémorable.

Les combats, d’ailleurs, ne manquent ni d’intensité, ni de talents martiaux (L’inverse, vu les acteurs, aurait été incompréhensible, surtout lorsque le chorégraphe s’avère être Tony Leung Siu Hung), et surtout pas de mise en scène. Lisible,, dynamique et survoltée, celle-ci reprend à la lettre les codes classiques des enjeux du genre pour mieux sublimer la forme. Herman Yau maîtrise ses décors (variés) et la gestion de son espace. La caméra n’embrouille jamais le spectateur, et si l’utilisation des câbles se fait parfois sentir, celle-ci se révèle finalement peu dommageable car plutôt discrète. Dans un tel contexte de réalisation, on regrette finalement que le supposé combat final ait plus des allures d’épilogue vite expédié, décevant le spectateur et faisant de cette séquence l’affrontement le moins épique du film.

Finalement, que retenir de Ip Man – The Legend Is Born ? Si l’on était en droit de redouter l’opus d’exploitation opportuniste et commercial, on est soulagé de voir que le réalisateur a finalement tiré du matériau d’origine une œuvre plus qu’appréciable, témoignant tout le talent de son auteur pour l’image et la mise en scène. Si la trame se perd parfois en conjectures au point d’ennuyer, les combats rattrapent largement la sauce, et on ressort du film agréablement satisfait, voir dans mon cas, surpris. Les éditions DVD/BR nous offrent le « packaging standard » en terme de bonus, à savoir le trailer et un making of de dix minutes certes pas inintéressant, mais que l’on aurait tout de même souhaité plus étoffé. Ceci dit, pour tous les amateurs du genre, du réalisateur et de Ip Man, la galette vaut largement sa vingtaine de deniers.

Tony F.

Verdict :

Ip Man : La Légende est née de Herman Yau, disponible en DVD et Blu-Ray, édité par France Télévisions Distribution, depuis le 29/06/2012.