VIDEO – Yakuza Apocalypse de Miike Takashi

Posté le 15 mars 2024 par

Le coffret Miike Takashi, sorti récemment chez Spectrum Films, est l’occasion de découvrir quelques-uns des films peu vus de ce réalisateur fou et stakhanoviste. Jetons un œil à Yakuza Apocalypse, sorti sous les latitudes japonaises en 2015.

Kageyama est un homme de main du gang de yakuzas dirigé par Genyo Kamiura. Un jour, Kageyama voit son parrain assassiné par un étrange prêtre-exorciste et un pratiquant des arts martiaux étranger. Au moment de son dernier soupir, la tête décapitée de Kamiura mord Kageyama, et ce dernier devient ainsi l’un de ses semblables : un yakuza-vampire. Dès lors, Kageyama devra lutter contre sa pulsion de boire du sans de citoyen, réputé bien meilleur que le sang des yakuzas.

Yakuza Apocalypse est un métrage doté de l’excellente qualité des techniciens du cinéma japonais des années 2010. Sa photographie léchée, son montage rythmé qui donne de la masse aux coups que se portent ces yakuzas-vampires, ainsi que la technique martiale des acteurs spécialisés en combats et cascades, font de ce film tardif de Miike Takashi un objet bis de pur divertissement. Mais si le début du film est prometteur, les péripéties s’enfonçant dans le non-sens finissent par faire perdre de la substance à l’ébauche de scénario et d’univers pour aboutir à un objet cinématographique finalement assez creux.

Le film se coupe en deux grands morceaux. La première moitié du film peut être perçue comme une proposition de films de vampires, teinte de l’imagerie du monde des yakuzas modernes. Pour ce faire, Miike s’amuse énormément avec le filmage de la violence et l’incursion du gore. À ce stade, le spectateur peut s’attendre à un film surnaturel mais à la diégèse solide. Or Miike décide d’un tout autre choix narratif dans sa seconde moitié, en faisant apparaître des protagonistes improbables et caricaturaux, à l’image de l’homme-grenouille tueur, qui va parasiter l’attention en obligeant tous les protagonistes qui se faisaient face dans le milieu des yakuzas à abandonner leurs motivations pour l’affronter. Cette trame narrative relève de l’humour régressif, car le personnage est aussi fort et violent qu’absolument enfantin – concrètement, il s’agit d’un artiste martial sous une tenue de carnaval à la texture de peluche. Il est cependant dommage que la limite de ce choix, à la base non-disqualifiant pour juger une fiction dans sa visée comique, soit très vite atteinte puisque le film devient un couloir de combats sans aucun motifs pour les personnages, délestant l’univers de toute épaisseur.

Yakuza Apocalypse se veut donc un film d’action foutraque où des yakuzas, des vampires, des hommes-peluches, des exorcistes et des kappas se mettent sur la tronche. Mais comme disait Jean-Pierre Dionnet en rapportant les propos de Miike lui-même, le cinéaste japonais enchaîne les films en proposant des idées, en en réussissant certaines et en ratant d’autres. Yakuza Apocalypse fait plutôt partie de la deuxième catégorie. Finalement, la technique irréprochable du film dessert sa volonté d’offrir un monde baroque. La belle photo numérique et le scope bien stable ne sont pas vraiment compatibles avec la folie d’un tel univers. Miike veut s’amuser avec ces personnages hauts en couleur, mais n’a pas tellement l’intention de les pousser à bout. Il en résulte un film trop sage et faible, si l’intention réelle était de montrer du sang, des vampires et des figures issues du folklore japonais se taper dessus avec entrain.

Maxime Bauer.

Yakuza Apocalypse de Miike Takashi. Japon. 2015. Disponible dans le coffret Blu-Ray Miike Takashi sorti chez Spectrum Films en décembre 2023.

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