NETFLIX – Kingdom : Ashin of the North de Kim Seong-hun

Posté le 7 août 2021 par

Après deux saisons diffusées sur Netflix, la série Kingdom s’offre une pause avant une hypothétique troisième salve en creusant un peu plus profondément sa mythologie et en proposant un épisode spécial, petit cadeau fait aux fans pour leur permettre de patienter en attendant le retour des zombies dans les campagnes coréennes.

Autant le préciser tout de suite, cet épisode n’est ni une suite ni un spin off de la série originale, puisqu’il s ‘agit d’un prequel aux évènements survenus dans les deux premières saisons de la série. N’espérez donc pas y retrouver les deux comédiens phares de la série (Ju Ji-hoon et Bae Doona), le script développera ici les origines de la mystérieuse plante qui fait revenir les morts. Une fois le contexte (inutilement confus, il faut bien l’avouer) présenté en introduction, on découvre un pays en proie à des guerres de clans, renégats, mercenaires et armées impériales, et au milieu des paysans qui tentent de survivre, massacrés de tous les côtés. Parmi eux, la jeune Ashin, qui va voir sa famille sauvagement décimée, mais qui va découvrir au détour d’une forêt une plante mystérieuse, la fameuse plante des morts, et au passage, un outil précieux pour venger sa famille.

Si le résumé ci dessus est assez prometteur, il faut le reconnaître, le résultat final n’arrive jamais à être à la hauteur de son scénario. A cela plusieurs raisons.

Ce qui saute au yeux une fois l’épisode terminé, c’est qu’Ashin of the North est pourvu d’une structure scénaristique qui ressemble beaucoup trop à la saison 1 de Kingdom, à savoir une première moitié de récit qui ronronne gentiment, et une deuxième partie beaucoup plus mouvementée et offrant ce que le spectateur est venu chercher, c’est à dire des morts-vivants. L’épisode dure 90 minutes, le vrai premier zombie arrive à la 65e minute. Avant cela, pas grand chose à signaler, si ce n’est une tentative vite torpillée d’élargir les possibilités qu’offre la plante des morts (les effets marchent aussi sur les animaux, en l’occurrence un tigre), au détour d’une scène trop rapide pour être appréciable. Comme évoqué plus haut, il est fait état d’un contexte politico-dramatico-feuilletonnesque assez lourd, et lorsqu’arrive le fameux twist, ou plutôt la révélation de l’identité de la personne à l’origine du retour des morts, la première réaction est « tout ça pour ça ? ». Car au final, on retombe sur une simple histoire de vengeance, celle d’une enfant devenue adulte surentraînée et qui s’est mis en tête de se servir des morts pour tuer les vivants. Les 50 minutes qui ont précédé n’ont servi à rien, sachant que la petite fille doit apparaître 10 minutes grand maximum dans la première partie, et que le plus gros du script est consacré à des guerres qui ne servent finalement que de cadre à l’histoire. Par contre, dès que le premier zombie commence à grogner, le récit s’emballe et offre au spectateur ce qu’il est venu voir, à savoir de l’action, du gore (et encore pas tant que ça) et quelques bonnes idées de mise en scène. Mieux vaut tard que jamais.

En parlant de la mise en scène, on retrouve le réalisateur Kim Seong-hun, déjà à l’œuvre sur la série originale et metteur en scène des films Tunnel ou bien encore Hard Day. Et il faut reconnaître que, si sur le fond, Ashin of the North n’est pas forcément réussi, pour ce qui est de la forme, le talent de son réalisateur est toujours là et le spectacle est assuré. Bien aidé par une photo magnifique et une direction artistique irréprochable (il y a du budget et cela se voit à l’écran), Kim Seong-hun emballe un honnête épisode dans la moyenne haute de la série, autant capable de rendre effrayant le premier réveil d’un zombie à la lumière de la lune qu’une dangereuse chasse au tigre-zombie dans les hautes herbes d’un village, séquence qui n’est pas sans rappeler le massacre des raptors dans Le Monde perdu de Spielberg.  On regrettera juste que dès qu’il est question de mettre un peu d’action dans son récit, le film n’offre que de très courtes séquences, ce qui en amenuise quelque peu l’effet (la scène du tigre ne doit pas dépasser les trois minutes, et elle n’est là au final que pour relancer une sous-intrigue à base de conspiration et calomnies). Cependant Kim Seong-hun prend dans son dernier quart d’heure un plaisir presque sadique à filmer la vengeance sanglante de son héroïne et le déferlement des zombies venus dévorer les vivants dans des scènes gores à souhait, sans oublier de magnifier Ashin à chacune de ses apparitions, devenue aussi tordue et impitoyable que ses tortionnaires.

Au final, Ashin of the North ne se démarque pas de l’ensemble de la série dont il est tiré, et de par son statut de prequel, il n’aura aucun impact particulier sur la suite de la série, mais en l’état, il demeure une honnête série B zombiesque, rattrapée par sa mise en scène énergique mais plombé par un scénario inutilement confus.

Romain Leclercq.

Kingdom : Ashin of the North de Kim Seong-hun. Corée. 2021. Disponible sur Netflix le 23/07/2021