BIFFF 2016 – Ghost Theatre, de Nakata Hideo

Posté le 27 mars 2016 par

Le Brussels International Films Festival programme, pour sa 3ème édition, Ghost Theatre, le nouveau film de Nakata Hideo, le réalisateur qui a effrayé des millions de personnes avec Ring. Un retour gagnant pour Nakata après une série de films insignifiants ou ratés ?

Qui attend encore quelque chose de Nakata ? Ses coups d’éclat cinématographiques sont lointains : les films d’épouvante Ring et Dark Water, le thriller Chaos et le documentaire Sadistic and Masochistic (consacré à Konuma Masaru, maître du roman porno tendance SM). À vrai dire, le réalisateur n’a rien proposé de convaincant depuis 2002. Il a même touché le fond en 2014 avec Monsterz, adaptation inepte d’un film coréen déjà peu reluisant. Malgré une ovation debout un peu forcée en début de séance, l’ambiance était bien morne lors de l’avant-première mondiale organisée par L’Etrange Festival. La présence de Nakata et de la chanteuse actrice Shimazaki Haruka (AKB48), idol au Japon mais inconnue au pays d’Amel Bent, n’a pas réchauffé les cœurs…

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Ghost Theatre reprend dans les grandes lignes l’idée de départ de Ghost Actress un des premiers longs métrages de Nakata (1996) : un être surnaturel parasite le tournage d’un film / les répétitions d’une pièce de théâtre. Dans Ghost Actress, le fantôme d’une actrice morte sur un plateau de tournage revient hanter et dézinguer les actrices. Dans Ghost Theatre, une poupée machiavélique, simple accessoire de théâtre, hypnotise et vampirise les actrices lors des répétitions d’une pièce inspirée du mythe d’Elisabeth Bathory. Une référence occidentale plutôt intéressante quand on sait que selon la légende, la comtesse Bathory se baignait dans le sang de vierges pour garder sa jeunesse. Nakata met donc ici en abîme la légende de Bathory et le désir vital de la poupée machiavélique… Mais Nakata en reste là, pour un film qui manque d’épaisseur et de folie.

Ghost Theatre frappe avant tout par son classicisme (une histoire de fantôme nippon avec des touches impressionnistes de giallo – pour la poupée et les éclairages criards du théâtre) et son manque de rebondissements. L’aspect « coulisses de théâtre » est peu exploité : les actrices se tirent dans les pattes pour avoir le premier rôle et le metteur en scène drague ses actrices. Il n’y a ni suspens ni évolution des personnages : à peine s’étonnent-ils des accidents et des morts autour d’eux. La police n’est pas non plus du genre à enquêter. On touche à l’encéphalogramme narratif plat. Pourtant Nakata doit bien filmer quelque chose… ou quelqu’un ! Shimazaki Haruka (dont c’est le premier grand rôle) est donc de presque tous les plans. L’idol est probablement ce qui a permis à Nakata de financer son film – et lui assurer un nombre suffisant d’entrées au Japon. Si elle n’est assurément pas une actrice née, Haruka est tellement agréable à regarder qu’on en oublie le manque de rebondissements, l’absence de scènes d’épouvante et les crises existentielles de la poupée (également agréable à regarder).

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De nombreux spectateurs lâcheront le film en cours de projection, terrassés par l’ennui, exaspérés par le ridicule de la poupée ou frustrés de ne pas avoir peur une seule seconde. Le joli minois de Shimazaki Hiraku ne peut pas faire de miracle. Malgré tout, Ghost Theatre n’est pas un naufrage total. Les scènes de répétitions théâtrales – même répétitives – sont bien filmées, mettant en valeur les beaux décors et les éclairages rouge vif ou teintés de bleu. Un point positif qui n’est pas sans rappeler Over your dead body de Miike Takashi, autre film ennuyeux sur une pièce de théâtre maudite. Surtout, quand on n’attend rien d’un film, il est difficile d’être déçu : ceux qui ont abandonné tout espoir en Nakata depuis dix ans pourront donc trouver un certain plaisir – et perdre plusieurs minutes sur « Google Images » à la requête Shimazaki Hiraku. On a connu pire.

Marc L’Helgoualc’h

Ghost Theatre de Nakata Hideo, projeté pour la 34ème édition du Brussels International Fantastic Films Festival