DVD – Battlestar Rebellion (Prisonner Of Power), version intégrale de Fedor Bondarchuk : La faucille et le marteau dans l’espace

Posté le 29 novembre 2013 par

Voilà quelques temps, East Asia s’était penché sur le cut international de Battlestar Rebellion (à lire ici), qui n’avait pas vraiment convaincu. Faisant fi de toute réserve, votre serviteur se devait de faire preuve d’abnégation et de découvrir la version intégrale d’un peu plus de 5 heures de ce métrage martial russe, qui nous parvient dans une édition dénuée de bonus chez Factoris Films.

Battlestar Rebellion Prisonner of Power est tout d’abord un livre, porté à l’écran par le réalisateur Fedor Bondarchuk qui décide d’incarner un des personnages principaux. Ce film, dans sa version intégrale, dresse pourtant, malgré ses scories, un panorama fascinant.

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Il est clair que le réalisateur a voulu créer sa propre fresque de science-fiction, capable de rivaliser avec l’étranger, le genre de métrage à l’ambition intense, et possédant les moyens d’y parvenir. Le vaisseau lui-même possède un design fascinant, avec des tentacules se déroulant derrière lui (qui disparaissent dans sa version raccourcie) dans l’espace. Le héros se veut l’archétype du héros, à la longue chevelure blonde, au sourire brillant semblant sortir d’une publicité pour dentifrice, un héros capable d’affronter toutes les difficultés, grâce à ses capacités spéciales et à sa volonté sans faille – et bien sûr à l’amour et à l’amitié, qu’il découvrira sur cette planète inconnue. Mais surtout, Battlestar Rebellion dresse le panorama d’une planète extrêmement construit. Le lieu où se déroule l’action principale possède ainsi un passé, une cosmologie, une politique complexe, avec luttes de pouvoirs internes, conflits externes, et nombre de détails faisant de cette planète un endroit semblant exister, avec même des expressions propres au lieu.

En quelques phrase de voix off posant le récit, et en un court échange avec sa grand-mère, le réalisateur pose son décor, expliquant la situation de la Terre, et en même temps montre sa volonté d’esthétisation outrancière, avec des mouvements de caméra aussi tapageurs qu’inutiles mais qui ne laissent pas de marbre par le peu de subtilité un peu niais de Fedor Bondarchuk. Ce dernier déploie sa caméra avec une fraîcheur et un désir d’impressionner qui laissent sans voix. Le choix de son héros, seul blond ou presque dans un monde de bruns, seul personnage portant du blanc alors que tout le monde s’habille en sombre, est d’un seul coup plus compréhensible.

Le monde lui-même, malgré sa construction recherchée, est édifiant par son côté patchwork, patriotique, et référentiel. Niveau géographie, le spectateur découvre du désert, de la mer et ses plages, et une ville sale et tentaculaire ressemblant à un copié/collé maladroit mais d’un naturel presque niais, de Blade Runner. La populace est donc divisée entre de pauvres types manipulés, des déviants pathétiques pourchassés (les seuls capables de résister aux ondes annihilant leur volonté), des habitants du désert encore plus pathétiques (mais dirigés par un enfant sorcier sans bouche permettant une séquence à la lisière du film d’horreur aussi inutile qu’intéressante par son côté mystique), et bien sûr de nombreux soldats, qui luttent contre les déviants et contre les peuples hors des frontières, peuples dont on ne saura peu de choses.

Maxim, qui sera appelé officiellement Mak Sim par les autochtones, débarque donc là-dedans et, avec une naïveté confondante, va faire bouger les choses au gré de ses découvertes. Il se laisse au début faire, répondant aux questions, subissant interrogatoires et expériences, mais sa rencontre avec Bai, militaire devenant son ami, et sa sœur Rada, dont il va tomber amoureux (séquence édifiante à base de sourires niais et de propos maladroits) vont lui donner envie de s’impliquer et de leur faire ouvrir les yeux, entre autres sur leur perception de l’univers.

Acceptant de devenir militaire, il va en apprendre plus sur les déviants et sur les ondes, et se rebeller, cherchant à faire tomber les Pères Inconnus, étranges dirigeants aux tenues plus ou moins martiales et aux objectifs divergents. Pourtant, les raisons de cette appellation donnent lieu à quelques explications intéressantes et à quelques bonnes idées.

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Le monde dépeint est, par certain côtés, fouillé et cohérent. Mais, par son idéologie communiste sauvage, il ne peut que déranger. De plus, les personnages sont traités de manière étrange, et la quête initiatique du héros manque cruellement de subtilité. Il avance en ligne droite, oubliant la plupart du temps de réfléchir (quand, à la fin, un personnage pointe du doigt une de ses erreurs, l’autre criera qu’il a oublié, mais ne se remettra pas en question pour autant).

De plus, la réalisation est tellement tapageuse, bourrine, entre propos patriotiques, mouvements de caméra et combats au corps à corps stylisés sans grand talent et sans recul, que le spectateur ne peut qu’être fasciné par le résultat premier degré, copiant le cinéma tapageur hollywoodien de manière quasi caricaturale tout en y ajoutant un propos communiste effarant. Il faut cependant admettre que plus de cinq heures de ce traitement peuvent se révéler difficiles à supporter.

La version intégrale, cependant, permet une cohérence des environnements et du scénario, et, bien que les personnages restent assez caricaturaux, la version originale diminue quelque peu le traitement qui leur est infligé, les doubleurs français n’y ayant pas été avec le dos de la cuillère. De plus, si scénario comme réalisation manquent sévèrement de subtilité, Battlestar Rebellion est traité avec une fraîcheur premier degré des plus naturelle, une naïveté dans le propos qui ne peut que fasciner par sa tentative aussi louable que bancale de traiter cinéma populaire international et russe, avec une envie de dépeindre un univers vivant, une science-fiction crédible avec les moyens nécessaires pour y parvenir.

Battlestar Rebellion – Prisonner Of Power, disponible en DVD chez Factoris Films depuis le 2 juillet 2013.