Black Movie : note sur les films : Outrage Beyond, Pieta, Dead Sushi, Walker…

Posté le 22 janvier 2013 par

Le premier week-end du Black Movie, du vendredi 18 au dimanche 21 janvier 2013, fut dense en expériences cinématographiques fortes et aventureuses. Petit tour d’horizon des 11 films asiatiques vus par nos envoyés spéciaux à Genève : Julien Thialon et Victor Lopez.

Pietà de Kim Ki-duk (Corée, 2012)

Un évanouissement lors de la première projection, un spectateur pris de malaise et vomissant lors de la seconde : Pietà ne laisse pas son public indifférent. Et il faut bien avouer que Kim Ki-duk cherche avant tout les réactions extrêmes en créant des situations à la limite du soutenable, car même s’il laisse la violence physique hors-champs, l’impact psychologique s’abat sur le spectateur avec  brutalité. Misère sexuelle, humiliation physique, extrême pauvreté, viol incestueux : Kim décrit un univers nihiliste dans lequel l’amour et l’affection n’ont plus leur place. Le geste manque souvent de subtilité, mais la sincérité désarmante avec laquelle toute cette souffrance est décrite touche parfois profondément juste.

Verdict : 3/5

VL.

Terriblement sombre, Kim déshumanise ses personnages, les enfermant eux et la société dans un cercle vicieux de sévisses physiques et moraux dont personne ne sort indemne. Verdict 3.5/5. JT.

OutrageBeyondPoster

Outrage Beyond de Kitano Takeshi (Japon, 2012)

En 2010, Outrage voyait Kitano revenir au cinéma de genre avec un Yakuza Eiga nihiliste, dans lequel le désenchantement avait pris du terrain sur la mélancolie de ses grandes œuvres des années 90. Outrage Beyond pousse la logique encore plus loin, mais avec une précision inédite dans la mise en scène et une profondeur renouvelée.

Lire la suite ici !

Verdict : 4/5

VL.

Kitano revient avec force et honneur dans cette suite où il gomme les défauts du premier opus. Une étape importante pour le cinéaste dont on suivra avec attention les prochaines réalisations. Verdict : 3.5/5. JT.

Prochaines diffusions : les 23 et 27 janvier 2013, toutes les informations ici !

 

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Walker de Tsai Ming-liang (Taïwan, 2012)

Dans la droite lignée de récentes expérimentations artistiques comme Madame Butterfly (2010), qui voyait un personnage de fiction chercher un ticket de bus dans une gare routière, Walker a autant sa place dans les musées d’art contemporain qu’au cinéma. Le dernier court-métrage de Tsai s’amuse à propulser un moine marchant au ralenti incarné par l’indispensable Lee Kang-sheng dans la très agitée métropole de Hong Kong afin de voir ce que ce ralentissement extrême provoque chez les passants pressés de la ville. Le résultat est très beau, Tsai soignant chacun de ses cadrages comme un tableau vivant, mais laisse un goût d’inachevé. Sans doute l’œuvre prendra-t-elle toute son ampleur lorsqu’elle sera présentée avec les trois autres segments du projet Beautiful  au sein de l’installation dont Walker fait partie.

Verdict : 2/5

VL

Le contraste est saisissant entre le monde extérieur ne s’arrêtant jamais, obnubilé par la technologie et le marketing, et la marche méditative en pleine conscience de ce moine transportant son sandwich. Les plans fixes soulignent ce décalage de vitesse entre ces deux conceptions de vivre, une réussite. Verdict : 3.5/5. JT.

Year Without A Summer

Year Without A Summer de Tan Chui Mui (Malaisie, 2010)

Year Without A Summer est un double retour aux sources. Tout d’abord, pour la réalisatrice, qui filme avec attention et simplicité son village natal de Sungai Olar, dont elle montre avec tranquillité l’inquiétante beauté malaisienne. Mais c’est aussi un retour à une forme cinématographique épurée, où le merveilleux s’installe paisiblement dans la vie quotidienne, dans la lignée des œuvres d’Apichatpong Weerasethakul, mais aussi de Miguel  Gomes, dont le magnifique Tabou est présenté au Black Movie. Year Without A Summer partage avec ces films une structure binaire et un réalisme qui laisse aussi entrer en son sein l’imaginaire. Une manière cinématographique de confronter son regard au monde sans oublier de rêver, mais sans l’idéaliser non plus. Toutes ces choses nous ont donnés envie de rencontrer la réalisatrice Tan Chui Mui, de passage à Genève pour présenter son film au public helvète.

Lire notre entretien ici.

Verdict : 3/5

VL.

À la fois atmosphérique et profondément ancré dans les souvenirs de la cinéaste, le long métrage se savoure dans la première partie mais redescend sur Terre dans sa seconde moitié. Verdict : 3/5. JT.

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Solution des frères Kim (Corée, 2012)

Les frères Kim continuent leur exploration des absurdités de la société coréenne sous une forme toujours expérimentale, mais ici plus potache que d’habitude. Plagiant les émissions de télé-réalité sensé régler les problèmes des gens, Solution bifurque rapidement vers le délire scatologique, souvent amusant, mais parfois un peu longuet. Très proche de l’esprit irrévérencieux de Trey Parker et Matt Stone, le film aurait gagné à être réduit à la durée d’un épisode de South Park plutôt que d’être étiré sur 52 minutes.

Verdict : 2/5

VL.

Parodie télévisuelle scatologique non sans quelques longueurs, les frères Kim font rire leur public comme ils rient de la société coréenne. Verdict : 3/5. JT.

Prochaines diffusions : le 27 janvier 2013, toutes les informations ici !

 

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Dead Sushi de Iguchi Noboru (Japon, 2012)

L’an passé, Nishimura, l’architecte des effets spéciaux des délires d’Iguchi et metteur en scène barré de Tokyo Gore Police, avait promis aux festivaliers du Black Movie de leur envoyer sa dernière œuvre : Dead Sushi. Et l’on se réjouit que la promesse ait été tenue. Si le film en lui-même est dans la droite lignée des récentes productions du genre, provoquant un vague sentiment de lassitude et de déjà-vu, les conditions sont réunies au Black Movie pour le voir dans le meilleur endroit possible : le Spoutnik remplit comme un œuf de fans hilares !

Verdict : 3/5

VL.

Un bon public, une bonne salle, une bonne bière, des barres de rires. Verdict : 3.5/5. JT.

Prochaines diffusions : les 22 et 26 janvier 2013, toutes les informations ici !

 

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Anton’s Right Here de Lyubov Arkus (Russie, 2012)

Difficile de dire du mal du documentaire de Lyubov Arkus, qui a suivi le parcours d’un jeune autiste de centres en centres pendant six ans, témoignant de l’effroyable traitement des malades psychiatriques en Russie, ainsi qu’une belle histoire personnelle. Malheureusement, les bonnes intentions ne font pas un bon film et, malgré l’indéniable intérêt extra-cinématographique du film et de belles scènes d’introspection, Anton’s Right Here ne parvient pas à dépasser le stade d’un long reportage assez pénible à suivre.

Verdict : 1/5

VL.

Le sujet est touchant mais ne fait pas office d’une bonne expérience cinématographique. Verdict 2/5. JT.

Prochaines diffusions : les 22 et 24 janvier 2013, toutes les informations ici !

 

All Apologies

All Apologies d’Emily Tang (Chine, 2012)

Voici un mélodrame familial typique des productions chinoises hérités des cinéastes de la cinquième génération, et dont les chefs de file comme Zhang Yimou, quand il n’est pas occupé par des projets plus spectaculaires, continuent de polluer les écrans, à l’instar de son récent Sous L’Aupepine. Portrait de la ruralité, des sacrifices des petites gens qui souffrent, et retour à l’ordre moral obligatoire à travers un édifiant panneau final qui vient clore de bien triste façon un film qui montre à quel point Emily Tang, que l’on a connu plus aventureuse, est rentrée dans le rang.

Verdict : 1/5

VL.

La forme est propre mais l’absence de prise de risques tend malheureusement vers l’ennui. Verdict : 2/5. JT.

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Black Dove de Roh Gyeong-tae (Corée, 2011)

Après le soporifique Land of Scarecrows, qui cumulait tout ce que le cinéma d’auteur coréen produit par la France peut produire de pire, on est soulagé de découvrir une œuvre forte émotionnellement et maîtrisée stylistiquement de l’auteur du Dernier Repas. À travers le portrait des protagonistes d’un accident de voiture qui a coûté la vie à une petite fille, Roh Gyeong-tae dresse un portrait d’une implacable noirceur sur les rapports humains, doublé d’une fable sur la fin du couple. Dommage cependant que l’impression que le cinéaste se regarde filmer domine et que le spectateur soit sans cesse mis à distance. L’autrichien Ulrich Seild s’est trouvé un cousin coréen, mais ce dernier n’a pas encore toute la maîtrise du réalisateur d’Import/Export.

Verdict : 2/5

VL.

Il faut s’accrocher de toutes ses forces pour ne pas trouver le temps long malgré quelques belles séquences. Verdict 1.5/5. JT.

Prochaines diffusions : les 24 et 25 janvier 2013, toutes les informations ici !

 

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Me and Doll-playing / A Cheonggyecheon Dog de Kim Kyung-mook (Corée, 2005-2008)

Les premiers courts de Kim impressionnent déjà par leur maîtrise formelle et leur maturité artistique. Après une première tentative introspective, Me and Doll-playing, le jeune cinéaste montre l’étendu de son talent dans A Cheonggyecheon Dog, virtuose exercice de style qui mélange les genres et provoque un état d’hypnose chez le spectateur, projeté au millieu des rêves fous et des visions cauchemardesques de Kim.

Verdict : 3/5

VL.

Kim propose une vision cinématographique avant-gardiste en mélangeant les genres dans sa quête d’identité sexuelle. Hypnotique. Verdict : 3.5/5. JT.

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