C’était en 2009 : Kinotayo présentait Vacation de Kadoi Hajime et I Remember that Sky de Togashi Shin. Pour l’édition 2011, le festival rend hommage au second qui a reçu le Soleil d’or. Dommage, on aurait préféré l’inverse… Par Victor Lopez.
Vacation et I Remember that sky : Scènes de la vie quotidienne
Avec Vacation, on découvrait en 2009 à Kinotayo un beau film de prison à la tristesse diffuse et tranquille. Kadoi Hajime nous laisse le temps de pénétrer l’intériorité de ses personnages dans son drame intimiste carcéral, où l’annonce de la condamnation à mort d’un prisonnier bouleverse le monde des gardiens. On ressent alors la détresse qui se dégage de cet univers vide (les figurants sont absents d’un film, où les rues des villes sont aussi désertes que les couloirs de la prison) et silencieux. La solitude du condamné comme celle de ses geôliers est palpable grâce aux longs plans mélancoliques qui ancrent ce monde dans la rétine du spectateur. Mais une pointe d’espoir est aussi envisagée à travers le mariage, triste mais serein d’un des gardiens, et le rapprochement difficile de cet homme asocial avec sa future femme et son fils.
C’est justement cette sobriété qui fait défaut à I Remember that sky, mélo lacrymal et consensuel de Togashi Shin, Soleil d’Or 2009 au festival Kinotayo. Après l’accident qui a couté la vie à leur charmante petite fille, une famille essaye de surmonter le drame, surtout aidée par la force du jeune frère, d’une maturité proprement cinématographique pour un gamin de 10 ans. Effusion numérique (dont d’hideuses scènes de rêve voyant l’enfant sauter de nuages en nuages), structure prévisible en flashbacks reliant passé joyeux et coloré et présent triste et gris, mouvements incessants de caméra et discours explicatifs : le quotidien d’I remember that sky sonne faux malgré son épanchement de moyens pour nous faire pleurer. Et le traitement du sujet manque cruellement de personnalité, surtout face aux tentatives d’Ozon et son métaphorique Ricky ou de Lee Chang-Dong et son audacieux Secret Sunshine, qui datent tous deux de la même période.
En visant un public international (adaptation d’un ouvrage anglo-saxon, traitée avec une grammaire cinématographique “à l’américaine”), I remember that sky perd tout intérêt et devient un objet complètement impersonnel, ne nous montrant plus rien sur le quotidien de son pays. A l’inverse, Vacation, par son traitement épuré et contemplatif, arrive par sa description de personnages et d’un quotidien proprement japonais, à nous toucher profondément. Entre mondialisation tiède et découverte curieuse d’univers particuliers, puisque le festival nous laisse le choix, affirmons que le cinéphile choisit toujours le second !
Victor Lopez.