EN SALLES – La Femme qui s’est enfuie de Hong Sang-soo (en salles le 30/09/2020)

Posté le 30 septembre 2020 par

Aujourd’hui sort le nouveau film de Hong Sang-soo, La Femme qui s’est enfuie. Retour sur un Hong Sang-soo plaisant mais très mineur. Encore un.

Pendant que son mari est en voyage d’affaires, Gamhee rend visite à trois de ses anciennes amies. A trois reprises, un homme surgit de manière inattendue et interrompt le fil tranquille de leurs conversations…

Depuis quelques films, disons Seule sur la plage la nuit (2017), le cinéma de Hong Sang-soo me semble privilégier l’univocité à l’ambivalence. Là où, par-delà la frontalité des plans, se cacha longtemps un double fond, celui par exemple d’une confusion entre rêve et réalité, expérience vécue et fantasme, le simple désir de filmer Kim Min-hee, compagne devenue aussi sa muse exclusive, dans diverses situations plutôt banales, semble désormais justifier un film. Non que celle-ci, toujours impeccable, nuise en elle-même à l’art du génie coréen, mais c’est peu dire que la familiarité professionnelle qui s’est instaurée entre l’auteur et l’actrice a tendance à rendre ce cinéma trop confortable, pour ne pas dire bénin. Y compris lorsque dans Grass (2018) ou ici même dans La Femme qui s’est enfuie, il perpétue son attrait pour le récit en plusieurs actes voués à rimer comme se contredire.

La femme qui s’est enfuie accompagne donc Gamhee (Kim Min-hee), mariée et pour la première fois éloignée durablement de son époux, lors de trois visites à de vieilles amies. Avec la première, Youngsoon, vivant en colocation avec la sympathique Youngji, il sera entre autres choses question de la culpabilité à manger de la viande en étant sensible à la souffrance animale. Comme toujours, il est assez savoureux de voir ces personnages converser des choses de la vie la bouche pleine, Hong Sang-soo filmant comme personne la trivialité bonhomme d’un repas. Il consacrerait l’entièreté d’un film à ce type de situation soustractive, n’appelant aucune fiction, aucune extériorité particulière, sinon celle des banalités évoquées entre un verre de soju et deux bouchées de viande de bœuf, que l’on resterait bon spectateur. Parmi les divers sujets évoqués, se distingue celui d’une jeune femme enfuie (celle du titre) que Youngsoon a prise sous son aile mais dont la présence restera périphérique. Autrefois, Hong Sang-soo aurait creusé un peu plus autour du flou de cette histoire, mais pas là.

Les deux autres femmes que retrouve Gamhee, Suyoung et Woojin, si leurs relations avec notre amie sont très différentes (elle est en très bon terme avec la première et finit par se réconcilier avec la seconde, qui, alors qu’elles furent très proches, lui a joué autrefois un mauvais tour), précisent un peu plus, quant à elles, la place particulière des hommes. Ces derniers, dans les trois actes, apparaissent en dernière instance, en guise de ponctuation. Nul rejet ici de la gente masculine mais le choix narratif et formel d’en faire avant tout un motif de conversation parmi d’autres, leur manifestation physique ne faisant que valider in fine leur évocation purement verbale. D’où sans doute que cet opus, de tous ceux du cinéaste, soit le plus porté sur l’anecdote, l’essentiel des passions humaines, à l’exception notable de l’intervention insistante du jeune amant de Suyoung, étant la grande affaire d’autres films déjà connus ou, on l’espère, à venir.

Sidy Sakho.

La Femme qui s’est enfuie de Hong Sang-soo. Corée. 2020. En salles le 30/09/2020

Imprimer


Laissez un commentaire


*