Le Maître intrépide de Sammo Hung (DVD)

Posté le 5 avril 2011 par

On peut attendre de chaque film de Sammo Hung une générosité au moins égale à la sympathie que dégage le bonhomme. Celui qui malheureusement, n’est pour le français moyen, que Sammo Law, le flic de Shanghai (combien de fois aie-je entendu “Sammo ? Le flic de Shanghai?”, j’en pleurerais presque), est pourtant l’un des réalisateurs les plus intéressants de l’histoire du cinéma hongkongais. Le film du jour: Knockabout aka le Maître intrépide, réalisé en 1979, avec Yuen Biao, Leung Kar Yan, Lau Kar Wing et Sammo Hung. Si ces noms de vous disent rien, rassurez-vous, c’est le bon moment de faire un petit cours de rattrapage. Par Anel Dragic.

Confucianisme en crise

Quatrième film de Sammo Hung, succédant aux magnifiques The Iron Fisted Monk et Warriors Two, mais aussi au sympathique Enter the Fat Dragon, Knockabout (si subtilement traduit Le Maître intrépide, mélange du Maître chinois et La Hyène intrépide) marque l’un des premiers grands rôle de Yuen Biao à l’écran. Le petit frère de Sammo et Jackie trouve en effet ici un moyen de montrer la plénitude de son talent à la fois martial et comique (donc très opéra de Pékin) en interprétant Yi Pao, un petit escroc, affublé d’un frère, Dai Pao, incarné par Leung Kar Yan, qui avait déjà participé aux deux précédents films de Sammo. Nos deux frangins montent différents coups pour soutirer de l’argent à de pauvres malheureux, mais un beau jour, ils tombent sur Lau Kar Wing (le petit frère de Lau Kar Leung), qui ne tombe pas dans le panneau. Puisque celui-ci est en plus un maître d’arts martiaux, nos héros le supplient de les prendre pour disciples, ce qui arrive, fort heureusement pour nous.

!!! SPOILERS !!!

Difficile de parler du film sans entrer un peu dans les révélations. Si vous ne souhaitez pas en savoir plus, achetez le film, de toute façon c’est un indispensable ! Sinon, continuez votre lecture paisiblement. Là où le scénario se montre original, c’est lorsque le dispositif maître-élève commence à prendre une tournure finalement peu commune dans le genre. Nous ne sommes pas chez Liu Chia Liang, loin de là, et le cinéma de Sammo, bien que très attaché à montrer l’apprentissage, n’est pas le seul but du réalisateur. Le “sifu” (le maître quoi!) se révèle être une véritable raclure et tue rapidement son propre disciple. Pour venger son frère, Yi Pao trouve l’aide d’un mendiant, joué par Sammo Hung, qui lui apprendra différentes boxes animales (le singe, la mante religieuse) pour vaincre son adversaire. Une violence assez fourbe finalement, qui met à mal la relation maître-élève et en particulier la figure inébranlable du sifu. De plus la structure étonne : ici, l’entrainement ne se fait pas dans un premier temps en prévision d’une vengeance, mais détourne ces thèmes grâce à son rebondissement central. Loin de s’appuyer sur un rapport sacré du maître au disciple, le film nous montre deux figures liées qui vont ici devoir s’entredéchirer.

!!! FIN DE SPOILERS !!!

La kung fu comedy selon Sammo

Le genre dans lequel Sammo Hung s’avère être l’un des véritables maîtres est bien évidemment la kung fu comedy. Son passé dans l’opéra de Pékin l’a tout naturellement formé à impressionner et faire rire à la fois, et l’homme (acteur, directeur des combats, réalisateur) s’est toujours montré doué dans le domaine. Si un jour, une cinémathèque en France offre l’opportunité de voir Seven Little Valiant Fighters, avec le Yuen Clan encore enfant à l’époque, vous pourrez constater par vous même qu’en 1962, Sammo Hung baignait déjà dans le genre. C’est habilement que le chorégraphe entremêle les enjeux de l’histoire (comme des scènes de vols) aux chorégraphies faisant usage des arts martiaux. Il faut aussi souligner la qualité du casting, comme toujours dans le cinéma de Sammo, notamment un “sherif” local interprété par Karl Maka (ultra cabotin, as usual!) et un adversaire incarné par Lee Hoi San, toujours affublé de maquillage et postiches les plus débiles.

Si le film se montre très réussi du point de vue comique, il s’agit tout simplement d’un chef d’œuvre dès qu’il touche au kung fu. Les combats multiplient les styles tout comme les chorégraphies complexes et millimétrées. Le style à la fois brut et acrobatique de Sammo brille et fait étalage notamment dans certaines séquences de Choy Lee Fut (un style de combat hybride originaire du sud de la Chine), exécutées par un Yuen Biao tout bonnement impressionnant. L’homme fait une démonstration de ses capacités sur tout le film (combats, saltos, cabrioles, tout y passe), et le final, opposant Biao et Sammo à leur principal ennemi nous montre nos deux compères usant de différentes boxes animales. Une séquence dans laquelle Yuen Biao laisse entrevoir tout son talent, qui est grand.

Knockabout est donc un chef d’œuvre, une perle comme Sammo Hung en réalisera encore bien d’autres (et dire que le meilleur reste à venir). Un classique que tout fan de cinéma de Hong Kong se doit d’avoir vu. Enfin, notons la présence d’une interview de Leung Kar Yan (tiens, tiens…) évoquant ses débuts dans le cinéma et sa collaboration avec Sammo, l’homme se plaignant qu’à l’époque, les tournages étaient vraiment difficiles. Certes, mais si c’est à ce prix qu’on récolte un chef d’œuvre, peut-être faudrait-il redonner un coup de fouet à l’industrie cinématographique hongkongaise.

Anel Dragic.

Verdict :

7 SENS copier

 

Le Maître intrépide de Sammo Hung, édité en DVD par Métropolitan, disponible depuis le 01/03/2011.

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