L’année dernière, Cannes avait fait plaisir aux amateurs de cinéma asiatique avec une consécration (Weerasethakul), une résurrection (Kitano), une découverte (Jang Cheol-so) et un bon paquet de confirmation (Hong Sang-soo, Lee Chang-dong, Im Sang-soo, Jia Zang-ke). Et s’il est encore trop tôt pour dire ce que va donner la sélection asiatique cette année, on peut déjà se réjouir de pouvoir miser sur au moins dix films attendus ! Passage en revu de nos favoris, en sachant que la surprise peut venir d’ailleurs (des courts, des inconnus, du marché du film…), et qu’ East Asia guettera cela avec attention durant toute la durée de la quinzaine en ces pages ! Par Victor Lopez.
10. Bollywood, The Greatest Love Story Ever Told
de Rakeysh Omprakash Mehra (Sélection Officielle – Hors Compétition)
S’il y a un pays scandaleusement sous-représenté à Cannes, c’est bien l’Inde ! Seules quelques productions indépendantes y ont occasionnellement le droit de citer (on a pu découvrir Udaan l’année passé…) et Bollywwod se résume au seul nom respectable de Sanjay leela Bhansali (Devdas ). C’est donc avec joie que l’on découvre la sélection (hors-compétition) de ce documentaire qui revient sur l’histoire de la plus grosse industrie cinématographique du monde. Donnant la parole aux plus grands acteurs de Bollywood, d’ Amitabh Bachchan à la belle Aishwarya Rai (toujours présente à Cannes, mais plus parce qu’elle le vaut bien que par son statut de star en Inde…), Rakeysh Omprakash Mehra, le réalisateur de Delhi-6 , semble surtout avoir compilé nombres d’images d’archives afin de montrer la richesse et la splendeur de ce cinéma. On espère que le but va être atteint et que les spectateurs de la Croisette se mettront à danser sur les classiques des chorégraphies bollywoodiennes, notamment lors d’une projection au cinéma à la plage qui s’annonce animée.
9. Hanezu no Tsuki
de Kawase Naomi (Sélection Officielle – Compétition)
Alors que l’année dernière, nombres de pays étaient représentés (la Thaïlande, La Corée, le Japon), cette année, le pays du soleil levant est le seul asiatique à être présent en compétition. Et sans vouloir faire les Cassandre, on voit mal De Niro donner une palme d’or à Miike Takeshi (enfin, on aimerait bien, hein !). Reste alors en lice pour la récompense suprême Kawase Naomi, qui avait reçu la Caméra d’or pour son premier film de fiction ( Suzaku ) à 27 ans et le grand prix pour La Fôret de Mogari. Depuis, la réalisatrice a signé deux films non-présentés à Cannes et donc non distribués en France, Nonoya , tournés avec des français (dont Grégoire Colin comme acteur et Caroline Champetier pour l’image) en Thaïlande, et Genpin , un doc sur l’accouchement naturel. Hanezu no Tsuki marque un retour à sa ville natale, Nara, mais aussi une nouveauté, puisque la réalisatrice se frotte pour la première fois au film en costume.
8. Arigang
de Kim Ki-duk (Sélection Officielle – Un certain regard)
On n’est jamais mieux servi que par soi même. C’est ce qu’a dû se dire Kim Ki-duk lorsqu’il a envisagé de faire un documentaire sur… lui-même. Arigang se présente en effet comme un retour sur la filmographie du prolifique cinéaste coréen qui a signé 16 films entre 1996 et 2008, avant de se faire plus discret, vraisemblablement pour raisons de santé. C’est aussi sur cette période creuse que revient sa dernière œuvre, qui s’annonce volontiers mystérieuse selon son énigmatique bande-annonce…
7. Dutch, le maître des forges de l’enfer
de Rithy Panh ((Sélection Officielle – Un certain regard)
Le réalisateur franco-cambodgien revient, après une adaptation ratée de Marguerite Duras avec le plombant Barrage contre le Pacifique , au documentaire sur la mémoire du génocide Khmer. Après le définitif S-21 , Dutch, le maître des forges de l’enfer dresse le portrait de Dutch, le chef de la police politique de Pol Pot.
6. Tatsumi
d’Éric Khoo (Sélection Officielle – Un Certain regard)
Voilà une rencontre qui s’annonce passionnante : celle du réalisateur Singapourien Éric Khoo et du mangaka japonais Tatsumi Yoshihiro. Le premier colle ses fictions au plus près du réel dans des films mélangeant cruauté documentaire et fable des récits ( Be with me ; My Magic ), le second se raconte dans Une vie dans les marges , qui relate aussi un demi siècle d’histoire du Japon. Le cinéaste met donc en mouvement les cases du dessinateur dans ce Tatsumi , qui fait d’ors et déjà figure d’Ovni dans la compétition cannoise…
5. The Day he Arrives
de Hong Sang-soo (Sélection Officielle – Un Certain regard)
On a à peine eu le temps de se remettre du réjouissant Hahaha et de digérer Oki’s Movie que Hong Sang-soo revient avec un nouveau film. La bande-annonce laisse deviner un conte de cinéma tout à fait dans le ton des deux précédents, avec un nouvel artifice inventif (le retour en arrière). C’est toujours la même chose ? Hé bien tant mieux, car c’est excellent !
4. Koi no Tsumi
de Sono Sion (Quinzaine des réalisateurs)
A peine remis du carnage Cold Fish , l’amateur de Sono Sion est prêt à un nouvel opus du maître, avec ce Guilty of romance , toujours inspiré de faits réels. A noter qu’il s’agit du seul film asiatique de la Quinzaine ! On retrouve cette sous-représentation à la Semaine de la critique, qui ne présente que le chinois Sauna on the Moon de Zou Peng. Pour des compétitions censées être aventureuses et défricheuses, c’est un peu léger… A moins que rien ne mérite les honneurs de ces sélections parallèles en Asie cette année. On répondra à cette inquiétante question en écumant le marché du film !
3. Wu Xia
de Peter Chan (Sélection Officielle – Hors Compétition)
Après le très sombre (et très réussit) Seigneurs de la guerre , Peter Chan revient avec un Wu Xia en apparence plus léger avec Donnie Yen et le fidèle Takeshi Kaneshiro. Voilà une projection de minuit qui risque d’être animée !
2. The Murderer
de Na Hong-jin (Sélection Officielle – Un Certain regard)
Il y a deux ans, Na Hong-jin signait son premier film. Il s’appelait The Chaser. Cela suffit à faire de son deuxième opus, The Murderer (aka The Yellow sea ) un des films les plus attendus de Cannes cette année !
1. Hara-Kiri: Death of a Samurai
de Miike Takeshi (Sélection Officielle – Compétition)
C’est quand même la grosse (la seule ? avec à la rigueur la présence, tout aussi réjouissante, de Nicolas Winding Refn) surprise de la compétition officielle : la sélection du salle gosse du cinéma japonais, Miike Takeshi. Il est vrai que l’époque du V-Cinéma et des délires surréalistes / trash de Gozu , Ichi ou Visitor Q semble maintenant bien loin mais les œuvres récentes du cinéastes, de Yatterman à God’s Puzzle en passant par Zebraman 2 n’appellent pas forcément à la respectabilité cannoise. Mais il semblerait qu’après une période pop décomplexée, 13 Assassins, découvert à Venise l’an passé, ait ouvert la voie à une nouvelle période pour le réalisateur, celle des remakes pour les festivals. On attend en tout cas de voir ce que va donner cette relecture en 3D du classique de Kobayashi de 1962 avec une grande impatience.
Retrouvez les critiques de ces films la semaine prochaine sur East Asia dans nos comptes-rendus en direct du Festival de Cannes !
See You in Cannes, Space Cowboy !
Victor Lopez.