Summer Wars de Hosoda Mamoru (DVD)

Posté le 27 octobre 2010 par

C’est comme une sorte de symbole. Alors que Kon Satoshi émettait à la stupeur générale son dernier souffle, parallèlement Hosoda Mamoru s’affirme définitivement comme un réalisateur majeur au sein de la japanimation actuelle, voire du cinéma mondial.


Après avoir longtemps rongé son frein au sein de la Tôei dans des productions de séries impersonnelles, Hosoda Mamoru s’est révélé avec sa merveilleuse adaptation du roman de Tsuitsui Yasutaka La traversée du temps. On retrouve dans ce Summer Wars toutes les qualités de ce coup de maître de manière approfondie et amplifiée. Sous les points de départ et les grands sujets de science fiction, Hosoda prouve tout d’abord qu’il est avant tout un cinéaste de l‘intime. La thématique si vaste du voyage dans le temps se trouvait réduite dans La traversée du temps à l’évocation drôle et touchante des émois d’une adolescente. La démarche est similaire mais amplifiée dans Summer Wars où la menace mondiale provoquée par le piratage d’un réseau social informatique amène à un beau récit familial.

Le cadre contemporain et la nature de la menace amènent à une collision entre modernité et tradition puisque les Jinnouchi sont une très vieille famille japonaise ayant autrefois compté dans la politique du Japon. Tout comme les sauts dans le temps amenaient à la maturité de la jeune Makoto dans La traversée du temps, le virus rongeant le monde virtuel de Oz servira ici de catalyseur à la réunion des Jinnouchi, à nouveau unie et prête à reprendre son rôle héroïque pour le pays. Loin de se réduire à une bête opposition entre passé et présent, ces facettes ne sont que les déclencheurs d’un récit profondément humain.

L’inventivité visuelle fascinante de l’univers de Oz répond donc constamment à un scénario remarquablement équilibré, parvenant à gérer brillamment une vingtaine de personnages fouillés, dont la bienveillante et autoritaire grand-mère du clan (dont la disparition donne l’instant le plus poignant du film), le timide héros Kenji, ou encore le fils rebelle Wabisuke. Si l’équilibre et la perfection narrative de La traversée du temps ne sont pas totalement atteints, la portée émotionnelle et l’ambition emportent complètement l’adhésion. Hosoda fait d’ailleurs preuve d’une remarquable cohérence en osant ce qui est ordinairement proscrit dans ce type de récit. Contrairement à tous les Matrix, Existenz et autres Paprika qui se plaisent tant à nous noyer et égarer dans leurs univers virtuels aux possibilités infinies, le réalisateur nous ramène constamment au réel lorsque les actions extravagantes exécutées dans Oz trouvent toujours leurs réactions chez les personnages manœuvrant dans la réalité devant leur écran. Contre toute attente le procédé (qui aura plombé nombre de films) fonctionne à merveille et ce grâce à ce traitement en profondeur et intimiste des protagonistes.

Le clou est atteint lors du final, résumant ainsi toute la démarche de Hosoda lorsque la famille enfin réunie soutenu par la terre entière défie l’indestructible adversaire à une partie de Hanafuda (jeu de carte traditionnel japonais). Toute notion de réalité, virtualité, passé ou présent se font dans une belle communion pour le bien collectif.

Bonus : Dvd plutôt bien garni par Kazé (l’image est somptueuse) dont on retiendra surtout l’excellente et trop courte interview de Hosoda au festival de Locarno. On y décèle l’ancrage profondément japonais de ses histoires dont les valeurs universelles ont pourtant réussi à faire traverser les frontières. Il s’en montre en toute modestie le premier étonné et cette ouverture sur l’extérieur influera sans doutes ses œuvres à venir (avec nettement moins de personnages, il semble qu’on ne l’y reprendra plus !).

Justin Kwedi.

Verdict :

Sugoicopier1

 

DVD et Blu-Ray édité par Kazé disponible depuis le 27/10/2010.