Le cinéma mongol s’exporte assez difficilement dans nos contrées. East Asia se devait donc d’être là pour accueillir Les dix guerriers de Gengis Khan, réalisé par D. Zolbayar. Il arrive hélas dans une édition dénuée de tout bonus.
Un film mongol nous parlant de Gengis Khan ne peut qu’attirer l’oeil. Ici, cependant, le célèbre empereur ne sera jamais vu, mais son ombre plane sur tout le métrage. En effet, ses sujets sont d’une fidélité sans faille à son égard, et son nom provoque engouement chez ses alliés, et haine chez ses adversaires. Les dix guerriers du film sont membres d’une troupe d’élite (les Aravt, le titre original du film), et, alors qu’ils aspirent à rentrer chez eux, ils sont chargés de retourner dans le territoire ennemi qu’ils viennent de quitter, à la recherche d’un guérisseur, seule personne capable d’éradiquer une épidémie.
Aucun questionnement sur les ordres chez les hommes chargés de cette mission, et les voilà partis en quête. Le rythme est lent, les personnages loin des jeunes héros musculeux ou autre stéréotypes, et le spectateur comprend tout de suite que le but du réalisateur est de proposer un métrage réaliste. Nous découvrons ainsi ces hommes, qui viennent de recueillir un bébé, seul survivant du massacre d’un campement, et qui passent beaucoup de temps à chevaucher, discuter autour d’un feu de camp, se débrouiller pour nourrir l’enfant. L’un ne pense par exemple qu’à manger, l’autre est choisi pour être en charge de l’enfant et, bien que se vexant ouvertement car c’est un travail de femme, il ressent visiblement une vive affection pour le nourrisson. Le film parvient à présenter des personnages très différents, et réalistes, des guerriers certes valeureux et tout acquis à la cause de Gengis Khan, mais avec des défauts, des doutes, des hésitations.
Le père du bébé est, lui, un chef ennemi et, en rentrant au camp, décide de poursuivre les hommes qu’il croit responsables du massacre, nos héros. Mais Les dix guerriers de Gengis Khan ne se veut pas un survival en costume, et continue à distiller une certaine langueur des plus intéressante. Les paysages sont superbes, les costumes crédibles, la caméra s’attache aux hommes, pour nous plonger dans cette ambiance fascinante.
Le spectateur s’attendant à un film d’aventure épique peut être déçu, mais ce choix se révèle des plus intéressant, car se démarquant de nombre de films de ce genre, pour s’intéresser véritablement au souffle de l’ambiance qui s’étend sur tout le métrage, ainsi qu’à la personnalité des protagonistes.
Cependant, le film n’est pas parfait, et se rate hélas justement dans les affrontements. Le réalisateur en oublie son souci de réalisme pour essayer d’iconiser ses personnages, avec utilisation de ralentis, gerbes de sang, coups d’épées et de flèches, qui hélas sonnent de manière peu crédibles. Ainsi, si les combats sont peu nombreux, ils échouent à intéresser le spectateur.
Le dernier acte, qui voit les protagonistes lutter, le traître dévoiler ses motivations (des plus classiques, devenir chef à la place du chef, et récupérer la fille pour lui tout seul), et le scénario se positionner sur des rails plus classiques, rend le film un peu moyen, déconstruisant la fascination que sa première partie avait instaurée, et se terminant avec un message patriotique manquant sévèrement de subtilité, et un happy end peu approprié.
Les dix guerriers de Gengis Khan reste intéressant à découvrir, mais il est dommage que le réalisateur n’ait pas assumé jusqu’au bout les partis pris instaurés dans sa première partie.
Nous ne pouvons aussi que regretter l’absence de bonus, car un making of et une analyse historique auraient apporté beaucoup de choses à ce film. Reste que ce genre de cinématographie est rare, et que Les dix guerriers de Gengis Khan mérite d’être découvert.
Yannik Vanesse.
Les dix guerriers de Gengis Khan, disponible chez BQHL Diffusion depuis le 23 janvier 2013.