Au Festival du Film Hongkongais de Paris (FFHKP), il était possible de voir Vital Signs de la réalisatrice et personnalité publique Vincci Cheuk, un drame sous tension sur une petite équipe d’ambulanciers paramédics dans leur quotidien plus « urgent » que la normale à Hong Kong.
Dans le sillage du film Black Flies sorti en 2023, mettant en scène Sean Penn et Tye Sheridan dans leur métier d’urgentiste à New York, Vital Signs utilise cette activité au plus proche de la réalité pour traduire certains phénomènes sociaux inhérents à leur géographie, dans le cas présent, à Hong Kong. Le personnage interprété par Louis Koo, Chef Ma, membre invétéré de la caserne où il exerce sans pour autant aspirer à monter en grade, est amené à faire équipe avec un jeune prodige de la profession, Wong Wai, incarné par Neo Yau, qui franchit les échelons à une vitesse fulgurante. Ce sont deux mondes qui s’entrechoquent. L’ancienne et la nouvelle génération, déjà, mais aussi une conception bien différente de la carrière professionnelle. La sagesse de l’un, l’arrogance de l’autre, qui témoignent d’une progression à deux vitesses, parfois incompatible avec la réussite sociale traditionnelle à la hongkongaise à laquelle Ma ne s’identifie pas. Malgré son mal de dos et ses problèmes médicaux, rester sur le « terrain », c’est servir au mieux les exigences de son métier.
Premier paradoxe qui donne lieu au dilemme existentiel de Ma : nous apprenons que sa femme est décédée d’une crise cardiaque quelques années plus tôt, le laissant lui et sa petite fille à la merci d’un avenir pas toujours très radieux. Sans doute que cet évènement tragique le conditionne à exercer avec une obsession qui s’apparente au syndrome du sauveur, mais sans besoin d’en recevoir la reconnaissance. Effacé, Ma le devient aussi aux yeux de sa fille lors de scènes de tendresse brusquement interrompues par l’appel du devoir ou bien la réapparition de cette fissure qui les sépare depuis le départ de sa femme. Le vrai sujet du film, néanmoins, est l’émigration. Inattendue dans un tel contexte, cette thématique se greffe naturellement au drame familial et aux interventions de secours en interrogeant frontalement la question hongkongaise dans une perspective future. La responsabilité de Ma est engagée : il souhaite s’installer au Canada avec sa fille mais son visa lui est refusé à cause de ses antécédents médicaux. Plus que jamais dans l’actualité, le film se demande si un avenir à Hong Kong est encore possible. « Il n’y a rien pour nous ici », cette réplique résonne de toute part. Entre l’unique dessein d’une réussite sociale bureaucratique, les problèmes de chaque personne secourue par Ma et son équipe, Vital Signs dresse un portait hongkongais peu reluisant. Mais comme beaucoup d’autres films sortis ces dernières années (The Way We Keep Dancing, Weeds on Fire, ou même Fight for Tomorrow projeté au FFHKP 2025), l’heure est à la résilience et à sa célébration. Avec pour message celui d’un Hong Kong que l’on préfère encore changer et améliorer que d’abandonner. Difficile de dire si le cahier des charges politique commande ce discours ou s’il est le fait d’une conviction profonde de la part de Vincci Cheuk. La réponse se trouve peut-être dans les paroles de la chanson 珍重 de Sally Yeh, que l’on entend par dessus ces plans aériens mélancoliques de la skyline hongkongaise. « Just can’t losing you, you can always hope for things to take a better turn […] Even if I could, I would just never want to leave you ».

Richard Guerry.
Vital Signs de Vincci Cheuk. 2025. Hong Kong. Projeté au FFHKP 2025.




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