Du 5 novembre au 4 janvier, le Forum des Images propose un large programme autour de la musique dans les arts visuels, avec un axe notable sur la French Touch. C’est ainsi qu’on y a retrouvé en ouverture le mythique film Interstella 5555: The Story of the Secret Star System, réalisé par Takenouchi Kazuhisa chez Toei Animation en 2003. Il s’agit d’un récit de science-fiction sans dialogue qui met en images des personnages originaux designés par Matsumoto Leiji (Albator, Galaxy Express 999) sur les musiques de l’album Discovery de Daft Punk.

Le film de Takenouchi reprend un pitch écrit par les membres de Daft Punk, à savoir un groupe de musique formés d’extraterrestres à la peau bleue, enlevés en plein concert par un producteur terrien véreux, qui les hypnotise pour en faire un groupe à la mode, formaté pour le public. L’un de leurs fans va quitter son vaisseau spatial pour tenter de les sauver. De péripéties en péripéties sur une soixantaine de minutes, le film est rythmé par une animation endiablée et le son du duo de musique électronique français, dont chaque morceau est illustré par un clip qui correspond à un chapitre. Datant de 2003, Daft Punk tenait à apporter un commentaire critique sur l’industrie de la musique et de ses dérives financières, au détriment du respect des artistes et du public. Aujourd’hui, à travers l’existence de plateformes de streaming qui rémunèrent si peu les artistes, on ne peut que constater tristement que la critique de Daft Punk est toujours valable, même si le problème se déportent sur d’autres dimensions.
L’album Discovery est une merveille de musique électronique, qui trouve dans Interstella 5555 une caisse de résonance via l’animation japonaise, particulièrement adaptée pour décupler la sensation d’émotions. On vibre ainsi particulièrement lorsqu’à la venue du morceau Voyager, le groupe libéré de ses entraves enterre un ami venu les sauver, et depuis sous terre, son esprit s’envole, au son d’une musique cristalline et laissant des fleurs derrière lui. Quelle poésie ! Ou également, lorsque dans la séquence suivante, sur le son du morceau Veridis Quo (anagramme de Discovery), le groupe pénètre dans le manoir de ce producteur, portraituré tel un véritable sorcier. L’émotion se trouve aussi bien dans la musique de Daft Punk que cette narration à la japonaise, qui simplement nous fait vivre les émois profonds de ces personnages. Musique et image s’alimentent l’un et l’autre, comme rarement.

Il existe un bémol, pas des moindres et qui aurait largement pu être évité. En 2024, le film a été uspcalé en 4K via intelligence artificielle et on ne peut pas faire pire résultat. Le dessin s’en trouve passablement abîmé et enlaidi. Il est dommage que cette version, au jour où nous écrivons ces lignes, fasse autorité en tant que « version restaurée », et nous espérons qu’une nouvelle restauration verra le jour, travaillée avec un plus grand soin que celle-ci – qui pour le coup, ne respecte pas les animateurs qui ont œuvré sur le film !
Maxime Bauer.
Interstella 5555 de Takenouchi Kazuhisa. France, Japon. 2003. Projeté au Forum des Images dans le cadre du programme Musique !.




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