NIFFF 2021 – The Tag Along de Cheng Wei-hao

Posté le 8 juillet 2021 par

Le Neuchâtel International Fantastic Film Festival (NIFFF) ressort le film d’horreur taïwanais The Tag Along de Cheng Wei-hao, initialement produit en 2015.

The Tag Along est l’adaptation cinématographique d’une légende urbaine taïwanaise dans laquelle un mosien, une créature surnaturelle mi-fillette mi-singe, traque des proies humaines en se nourrissant de leurs faiblesses et aspirations. Une fois la victime ensorcelée, elle se fait emmener jusque dans la montagne pour ensuite être « plantée » comme un arbre. Nous suivons donc l’histoire de l’entourage d’un jeune agent immobilier, Ho Chih-wei (River Huang) pris pour cible par l’esprit malfaisant. Le film débute sur la disparition mystérieuse de la grand-tante de Ho Chih-wei et, tour à tour, sa grand-mère (Liu Yin-shang). Lui-même et sa petite-amie présentatrice radio Yi-Chun (Hsu Wei-ning) se retrouvent tourmentés par une étrange petite fille spectrale habillée en rouge et en proie à des hallucinations. La seule différence vis-à-vis de la légende urbaine que Cheng Wei-hao instaure dès le début du film est que le mosien en question se nourrit non pas de la cupidité des gens mais de leur culpabilité et regrets.

The Tag Along est de prime abord très intriguant. Les personnages semblent vivre une existence paisible et banale mais une tension demeure très palpable, suggérant que quelque chose se cache sous cette apparente tranquillité et pousse le spectateur à vouloir en savoir davantage. De même, les premières apparitions du mosien, bien qu’assez classiques pour un film du genre, en jouant sur des plans extrêmement rapides qui ne permettent pas de distinguer les traits de la créature, attisent la curiosité. Il est également intéressant d’assister aux retours successifs des personnages disparus dans un état radicalement différent de celui du début du film, davantage que si Cheng Wei-hao avait décidé de ne plus les montrer ou de les tuer. Ce principe permet également de susciter l’angoisse de façon assez habile en plongeant les humains encore épargnés dans des situations d’inquiétante étrangeté plutôt bien maniées, comme dans la séquence du repas composé d’insectes vivants. Il y a aussi de très bonnes idées visuelles dans The Tag Along, comme la scène où le sang qui se répand sur le lit de Yi-chun prend la forme de racines ou encore l’esthétique des humains-arbres capturés par le mosien.

Malheureusement, on assiste à une baisse de la qualité progressive du film jusqu’à la fin de celui-ci. Les défauts évidents de CGI, notamment, contribuent à faire passer la créature de mystérieuse et plutôt effrayante à purement ridicule dès lors que l’on commence à la filmer de près ou plus longtemps qu’en simple coup de vent. Les quelques explications que l’on glane sur les motivations de l’esprit malfaisant ou bien la raison pour laquelle elle s’en prend à la famille de Ho Chih-wei sont trop expéditives pour être convaincantes mais également trop terre-à-terre pour être mystérieuses. Enfin, l’aspect le plus dérangeant du film se trouve être le traitement du personnage de Yi-chun. Lorsque l’on nous présente cette femme indépendante qui le revendique et qui assume favoriser sa carrière aux attentes sociales qu’on tente de lui imposer, on envisage un propos politique et social intéressant à approfondir dans une œuvre qui traite ainsi de la culpabilité. Or, la complétion de son parcours se trouve être que la raison pour laquelle Yi-chun refuse de se fiancer à Ho Chih-wei ou de devenir femme au foyer est qu’elle souffre du regret d’avoir avorté avant de se mettre en couple avec lui. Nous assistons alors à une scène extrêmement dérangeante où le fœtus avorté prend la forme d’un enfant couvert de sang qui reproche à sa mère de l’avoir tué, tandis qu’elle répète qu’elle est désolée. Une telle scène suffit pour faire grincer des dents dans quelque film que ce soit mais, au vu des ambitions féministes mises en scène dans la présentation du personnage de Yi-chun, il est encore plus gênant d’assister à une telle séquence. Par ailleurs, la fin est amenée de façon extrêmement brusque et le cliffhanger final est si attendu et réchauffé qu’il ne produit rien de l’effet escompté sur le spectateur.

The Tag Along laisse donc cette impression amère d’avoir assisté à l’effondrement d’un château de cartes. La première moitié du film, aussi prometteuse soit-elle, ne contrebalance pas la chute de qualité qui la succède, tant dans la narration que dans le visuel.

Elie Gardel. 

The Tag Along de Cheng Wei-hao. Taïwan. 2015. Sélectionné au NIFFF 2021

Imprimer


Laissez un commentaire


*