Découvert lors de la dernière édition du PIFFF, le dernier film de Kitamura Ryuhei sort en DVD, Blu-Ray et VOD chez Wild Side. Plus discret ces dernières années chez nous, c’est l’occasion de se rendre compte de l’avancée d’un cinéaste que nous avions découvert il a bientôt 20 ans avec une série B horrifique délirante: Versus. Alors ce Downrange est il une sortie de route ?
On peut le reconnaître de suite, le film ne s’embarrasse pas d’exposition inutile et entre dans le vif du sujet. Des jeune gens en covoiturage s’arrêtent sur le bas côté d’une route déserte, suite à une crevaison, pas si accidentelle que cela. Ils sont pris pour cible par un tireur embusqué bien décidé à faire un carton.
Nous avons là clairement un bel exemple de films concept. Un film basé sur une bonne idée qui essaie de capitaliser dessus. Seulement, on a de bonnes raisons de craindre d’assister à un métrage aussi crevé qu’un pneu. Disons que Kitamura Ryuhei et son fidèle comparse Joey O Brian cherchent à exploiter au maximum un budget serré avec un projet qu’ils pensent viable sur une durée de 1h30.
Nous avons donc un survival minimaliste avec un lieu de tournage, une poignée d’acteurs, et quelques accessoires. Le talent de Kitamura est justement de faire passer cela pour une série B inventive et rythmée. Si le film ne se base que sur quelques éléments, il n’est pas moins généreux pour autant. On le sait déjà, le cinéaste japonais est un vrai virtuose de la caméra, et il sait aussi tenir un récit de bout en bout, rappelez-vous son excellent Midnight Meat Train adapté de Clive Barker. Downrange n’est pas en reste, la caméra fuse telle une balle, traverse les boites crâniennes, survole le champs de tir depuis un drone, expose le terrain stratégique et ses acteurs tout en orchestrant son jeu de massacre. Il a du métier le bougre, il enchaîne les séquences avec une réelle précision, laissant quelques respirations entre des salves de tir et donnant suffisamment d’espace à ses personnages pour donner corps à son récit. Il trouve un bon équilibre sur son stand de tirs, entre effets gores, humour noir avec un solide candidat pour les Darwyn Awards, de vrais moments de tension et une vision jusqu’au boutiste et une démonstration convaincante du danger des armes à feu. Et pourtant le fusil s’enraille en cours de route, les situations deviennent à mesure que l’histoire avance plus abracadabrantesques les unes que les autres, et dans son dernier tiers devient vraiment idiote. Les situations évoluent artificiellement pour tendre vers un dénouement qui verra affronter sans réel surprise la final girl et son boogey man. Ce n’est pas un reproche, surtout qu’il le fait avec style. On regrette les quelques facilités de traitement.
Downrange n’a rien de honteux bien au contraire, il s’agit d’un récit concis et efficace transcendé par la mise en scène précise et virevoltante de Kitamura Ryuhei. On est plutôt rassuré de voir que ce dernier n’a rien perdu de son mordant, et on apprécie à sa juste valeur cette parenthèse assez ludique. On espère juste le revoir très vite sur un projet digne de son talent.
Martin Debat.
Downrange de Kitamura Ryuhei. Etats-Unis. 2017. Disponible en DVD, Blu-Ray et VOD chez Wild Side le 25/07/2018.