Alors que le cinéaste est en plein tournage de Right Now, Wrong Then, Hill of Freedom sort dans les salles françaises le 8 juillet. Quelle délicieuse manière de débuter l’été que de découvrir le nouveau film de Hong Sang-soo !
On s’interroge toujours un peu, à la découverte d’un nouveau Hong Sang-soo, sur la réalité de nos attentes. Comme si son hyper-productivité nous privait finalement du temps nécessaire à la digestion du précédent film. Sunhi, sorti l’été dernier, laissait notamment craindre dans sa première demi-heure de n’être qu’une resucée à peine masquée d’Haewon et les hommes, sorti l’automne précédent. Avant de nous rappeler en cours de route, par la seule grâce de l’épanouissement et l’articulation de scènes bien autonomes, que décidément non, quelque chose d’autre, toujours, finit par prendre corps. Hill of Freedom, le film qui nous intéresse aujourd’hui, a cependant pour lui de se distinguer plus immédiatement.
Déjà, nous interpelle le choix tout sauf anodin, en droite ligne d’In another country (2012), de faire de l’anglais une langue prioritaire. Mori (Ryo Kase) est un Japonais espérant retrouver en Corée Kwon (Younghwa Seo), la femme qui le fit fondre quelques années plus tôt. Et si comme toujours l’objet de la quête se voudra fuyant, le moins conquis possible, le jeune homme aura par chance le loisir de se faire adopter par une poignée d’interlocuteurs : la responsable de son hôtel, le neveu de cette dernière mais aussi et surtout Youngsun (Sori Moon), serveuse et gérante dudit « Hill of Freedom », restaurant où il avait l’habitude de retrouver jadis son âme-sœur.
Le charme du film et bientôt sa force discrète tiennent dans cette manière de compenser un vide (l’absence, le manque de cette fille qui ne revient pas) par le plein de situations éminemment harnachées au présent. Mori pourrait n’être qu’une figure dépressive, progressivement dévitalisée à force d’attente et de frustration, mais non. Quelque chose, au contact des autochtones, en fait au contraire une figure bien incarnée et parfois même heureuse (il trinque, fait l’amour, existe tout simplement). Après ses beaux portraits de femmes, ce recentrement sur l’affectivité masculine rappelle alors à quel point Hong Sang-soo est un cinéaste foncièrement paritaire, en termes d’observation sentimentale.
Mineur en apparence (ne serait-ce que par sa durée extrêmement courte), Hill of Freedom apparaît pourtant, durant la projection et après-coup, comme l’un des films les plus francs et aboutis du cinéaste dans le dessin de ses enjeux. Nous n’avions pas encore précisé que c’est par l’œil de Kwon que se déroule l’aventure de Mori, celle-ci, fraîchement revenue d’une cure de santé, découvrant, peut-être trop tard, une longue lettre de ce dernier lui faisant partager ses jours de divagation. Franchise d’un dispositif de flash-back via le support épistolaire témoignant d’une velléité humblement romanesque de ce dernier film. Romanesque n’empêchant jamais chaque scène de reprendre le pouvoir à l’usure.
Sidy Sakho.
Hill of Freedom de Hong Sang-soo. Corée. 2014. En salles le 08/07/2015.