DVD – Metro Manila de Sean Ellis : Entre drame et thriller, il faut parfois choisir

Posté le 18 mars 2014 par

M6 permets aux spectateurs français de découvrir Metro Manila, co-production anglo-philippine, qui arrive chez nous dans une édition dénuée de tout bonus.

Réalisé par Sean Ellis, le métrage est clairement divisé en deux parties, hélas pas forcément bien équilibrées. En effet, le spectateur s’attache d’abord à un jeune fermier et sa famille. Désespéré de ne pas avoir d’argent, notre héros propose aux siens d’aller à Manille dans l’espoir d’y trouver du travail. Foncièrement bon et naïf, Oscar va aller de Charybde en Scylla et se retrouver au fond d’un bidonville, sa femme obligée de travailler dans un bar effroyablement glauque où elle est obligée de se dénuder pour que les clients lui payent à boire.

Le spectateur découvre ainsi Manille, sa pauvreté, ses lieux de perditions. La caméra suit les errances d’Oscar, ses désillusions, colle à la crasse qui s’écoule partout. Le message manque certes de subtilité, mais remplit son office, ne pouvant laisser de marbre. Dommage que Sean Ellis ait fait de son personnage un trop grand gentil, naïf, un personnage lisse et manipulable. Il crée ainsi une dichotomie compréhensible mais un peu lourde et bien trop remplie de pathos, alors qu’une plus grande subtilité aurait été requise, et finalement, les moments les plus intéressants – et les plus durs à supporter, aussi – sont ceux qu’affronte la femme de notre héros dans ce lieu effroyable où elle est obligée de travailler. L’endroit, abominable, hante ainsi le spectateur, jusqu’au point de rupture, quand la matriarche des lieux offre à son employée une proposition qui fait froid dans le dos.

metro manila

Metro Manila quitte ensuite les territoires du drame pour s’attacher à ceux du thriller, quand Oscar parvient à se faire embaucher comme convoyeur de fond. Il découvre cet univers, ce métier, épaulé par son nouveau coéquipier, certes trop gentil pour être honnête, mais prolixe en explications et en anecdotes sur ce travail. Quelques flash-backs rapides permettent de découvrir ce qu’a vécu le nouvel ami d’Oscar, des moments sanglants qui font comprendre la dangerosité inhérente au rôle. Ces séquences passionnantes, dénuées de dialogues, marquent l’esprit et permettent de comprendre où le héros met les pieds, et pourquoi son partenaire est ainsi, quelques géniales fulgurances qui font rêver sur ce qu’aurait pu être le film.

Cette deuxième partie aurait ainsi pu être passionnante, mais se révèle trop courte, et vire dans le thriller manipulateur en plein milieu, avant de transformer Oscar en Machiavel n’hésitant pas à se sacrifier, lors de quelques séquences finales, pour le bien des siens. Si la fin confirme ainsi la trop grande bonté de l’homme, elle font de lui un cerveau malin que rien ne laissait présager, créant un trop grand revirement dans la personnalité du héros, et rendant ce final peu crédible. Dommage, car en voulant finir son film sur une note positive, Sean Ellis contredit le propos tenu précédemment. De plus, les explorations de la ville en fourgon blindé, avec les risques inhérents, sont certes beaucoup évoquées, mais ne se ressentent que rarement à l’écran.

Si Metro Manila possède un grand potentiel, en essayant de mélanger plusieurs genres, le réalisateur les empêche d’aboutir et c’est finalement un sentiment d’inachevé qui prévaut. Dommage, car le métrage aurait pu être un drame traumatisant, violent et délicieusement tendu, avec une meilleure subtilité dans les personnages, et une plus grande exploitation du métier de convoyeur de fond, au lieu de se rabattre sur les sentiers vus et revus du thriller à twist.

Yannik Vanesse.

Metro Manila, de Sean Ellis, disponible en DVD chez M6 depuis le 10 février 2014.

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