Découvrir un nouveau film de guerre russe est toujours une expérience en soit. Nombre d’entre eux, en effet, de part leurs thématiques patriotiques, leurs héros sans peur et sans reproche et leurs vils méchants, ressemblent aux films américains des années 80, quand Hollywood essayait au cinéma de gagner la guerre froide. Pourtant, parmi ce cinéma souvent déstabilisant, certains métrages essaient de se démarquer, comme ce War Zone, disponible chez Metropolitan dans une version hélas vierge de tout bonus. Par Yannik Vanesse.
Dzhanik Fayziev, réalisateur de ce War Zone, surprend son spectateur dès son introduction, en le plongeant dans une séquence de science-fiction pleine d’effets digitaux que n’aurait pas renié Robert Rodriguez dans son film Les Aventures de Sharkboy et Lavagirl. En effet, un enfant, vêtu d’une armure de combat, est aidé par un robot au comportement très humain, une sorte de démon. Les effets spéciaux, plutôt bons, permettent d’apprécier cette étrange séquence, bien qu’il soit permis de se demander quels sont les tenants et aboutissants de ce qui se déroule sous ses yeux. Le spectateur découvre cependant rapidement qu’il est dans l’imaginaire d’un jeune enfant. Fréquemment, le robot et le géant surgiront ainsi dans le quotidien de notre jeune héros, moyen pour les scénaristes de traiter des difficultés d’un enfant à accepter une réalité qui le dépasse, et sa fuite dans son imaginaire. Qui, en effet, n’a pas rêvé étant enfant que les difficultés du quotidien étaient des créatures dangereuses et que des alliés puissants étaient là pour nous défendre ? Le propos prend ainsi des dimensions tout autant universelles que nostalgiques. La réalité que notre jeune héros cherche à fuir, c’est d’abord son père, soldat parti assez loin et qu’il ne voit pas, et ensuite sa mère, qui s’attache à un adulte pédant et inintéressant, pour leur octroyer, son fils et elle, une sécurité nécessaire au vu des difficultés économiques russes. Plus tard, cette fuite mentale sera son seul moyen d’affronter les difficultés et les horreurs de la guerre. Plus le récit avance, plus cette thématique de l’imaginaire comme fuite de la réalité sera présente et, s’il faut avouer qu’elle est parfois amenée de manière maladroite et souvent un peu too much, War Zone a le mérite de tenter d’explorer des voies intéressantes.
L’autre thème de ce film, c’est la lutte d’une mère, prête à tout pour retrouver son fils. Car notre héroïne envoie son enfant auprès de son père, qui lui assure que les risques de guerre avec la Géorgie sont exagérés. Evidemment, cette fois-ci non, et la guerre surviendra, de manière brutale et sanglante. En apprenant cela, notre héroïne traverse le pays, terrifiée mais sans jamais faiblir, pour récupérer son petit. Là encore, War Zone met quelque peu de côté les chemins habituels des films de guerre russe lambda, en oubliant un peu le patriotisme, pour se concentrer sur cette femme qui ne veut que récupérer son fils. Bien sûr, sur sa route, elle rencontrera un soldat sans peur qui l’aidera au mieux, et le réalisateur montre parfois le premier ministre russe, qui refuse de laisser souffrir ses concitoyens, mais cela passe presque en second plan, comme des éléments nécessaires mais qui n’importent pas tant que cela au scénariste. L’héroïne est ainsi souvent prise entre deux feux, se faisant parfois même aider par « l’ennemi ». Les séquences de guerre sont brutales, violentes, et, survenant parfois sans prévenir, tétanisantes pour le spectateur qui ne peut que ressentir de l’empathie pour l’héroïne !
La réalisation, bien que parfois maladroite, permet ainsi d’apprécier ce film, aux séquences de guerre excellentes, et au scénario intéressant. Certaines intrusions de l’imaginaire dans la réalité sont superbes (le tunnel se transformant en monstre sur le passage du personnage principal) d’autres plus ratées, de même que les effets spéciaux, l’excellent côtoyant le laborieux. La tension ne faiblit jamais, une explosion, une attaque ou un missile venant toujours s’abattre sur les protagonistes, et la réalisation, en confrontant la beauté de la campagne bucolique à l’horreur de la guerre, crée une passionnante dichotomie et fait de ce War Zone un film certes imparfait, mais généreux et des plus intéressant.
War Zone, disponible en DVD chez Metropolitan depuis le 7 août 2013.