Critique de Destination Himalaya – Le pays d’où vient le vent de Jeon Soo-il (Vesoul)

Posté le 9 février 2013 par

Lent et radical, Destination Himalaya développe l’univers à la croisée du documentaire et de la fiction de Jeon Soo-il. L’invitation au voyage n’est cependant pas d’un accès facile. Par Victor Lopez.

L’histoire : Choi, entrepreneur coréen à la morne vie, part au Népal. Un long périple l’attend sous la forme d’une marche insoutenable vers le village d’où Dorgy, ouvrier dont il doit annoncer la mort à la famille, est originaire. Victime du mal des montagnes, il tombe, épuisé, en cours de route. Lorsqu’il se réveille, il est accueilli par la femme de Dorgy…

Himalaya

Destination Finale

On découvrait il y a deux ans l’univers singulier de Jeon Soo-il avec La petite fille de la terre noire, drame néo-réaliste, mixant la précision d’un regard documentaire avec une construction esthétique fictionnelle et formelle assez forte. Le résultat était cependant au final peu convaincant : la radicalité du processus empêchait le spectateur de gouter au drame comme à l’univers décrit. On retrouve la même exigence et, malheureusement, la même sensation de rester en dehors du film dans ce Destination : Himalaya, sixième long métrage du cinéaste et premier qui a le luxe d’afficher une star : l’impressionnant Old Boy Choi Min-sik.

photo-2-du-film-destination-himalaya

L’homme qui marche

Le début de l’œuvre reste cependant plus qu’intrigante, et développe une sublime radicalité, qui ne manque pas d’éveiller la curiosité du spectateur quand à l’orientation du métrage. Partant de Corée, notre héros se retrouve au Népal lors d’une marche mutique et interminable, qui nous promet un voyage mental ahurissant dans des paysages d’une fascinante beauté aride digne des visions de Jodorowsky. Cependant, le film ne va pas plus loin que son titre et s’arrête comme en cours de route. On retrouve certes dans la suite des bribes de cette ouverture, notamment dans la temporalité hypnotique dans laquelle sont filmées certaines actions (la mise à mort d’une chèvre, la toilette mortuaire d’une vieille femme) ou les incursions poétiques (l’arrivée d’un cheval blanc, l’enfant jouant de la flûte)… Mais le spectateur, invité au voyage, a rapidement l’impression d’être laissé à quai.

photo-Destination-Himalaya-Himalayaeui-sonyowa-2008-4

Dès que le vent soufflera
On comprend bien la double volonté du cinéaste, qui est d’un côté de nous faire découvrir un mode de vie en décrivant le quotidien des népalais dans un soucis documentaire, et de l’autre, de nous offrir le voyage plus intérieur du personnage du Coréen, observateur léthargique de l’action et d’inspiration autobiographique. Malheureusement, les deux versants du cinéma de Jeon Soo-il ne se rencontrent jamais dans un film qui pâtit alors d’un manque d’unité. Poussé à épouser le regard toujours extérieur de Choi, le spectateur ne pénètre jamais l’intimité des gens dont le film décrit le mode de vie. A l’inverse, le film refusant la facilité de l’identification en laissant les motivations de son personnage assez obscures, le voyage intérieur n’a pas non plus lieu . L’attache documentaire rend de toute façon impossible le décrochage subjectif, que semblait pourtant annoncer la première partie. Sur les deux plans, faute de rencontres, le film échoue donc à emporter l’attention de son spectateur.

En résumé : Radical et offrant une réelle proposition de cinéma, Destination Himalaya ne tient cependant pas ses promesses, et finit par ennuyer plutôt que d’amener son spectateur à la destination espérée.

Victor Lopez.

Verdict :

Mouais copier

Destination : Himalaya de Jeon Soo-il est projeté au Fica de Vesoul du 5 au 12 Fevrier 2013.

Imprimer


Laissez un commentaire


*