Critique de Headshot de Pen-Ek Ratanaruang : une balle dans la tête

Posté le 30 octobre 2012 par

Découvert à Deauville Asia 2012, Headshot sort en salles le 31 octobre pour montrer les limites du cinéma exigeant et doué du thaïlandais Pen-ek Ratanaruang, qui se tire une balle dans le pied à force de formalisme plutôt que de nous donner l’impression de nous mettre une balle dans la tête. Par Victor lopez.

Fatigué des turpitudes qui lui tombent sans cesse dessus et qui s’accumulent calmement mais surement depuis le début du film, le héros de Headshot finit par avouer sa lassitude. A ce moment, on ne sait si cette démission, alors même qu’il reste encore une bonne partie du métrage à parcourir, est celle du personnage ou du cinéaste, à moins que celui-ci n’envisage là l’abandon du spectateur face à un imbroglio d’intrigues dont il ne verra jamais la finalité. Entre zenitude plaquée sur une action cotonneuse et karma vide et forcé, le dernier film de Pen-ek Ratanaruang ne semble aller nulle part, n’avoir rien à dire.

Cela ne veut cependant pas signifier que le réalisateur ne remplit pas ce néant d’une bien belle façon. La maîtrise technique de Ratanaruang magnifie chaque scène, qui baigne dans une photographie mélancolique et aérienne. Le tout est doublé d’une mise en scène symbolique, qui accumule effets et métaphores sans que l’on soit sûr d’en comprendre le référent, voir qu’il y ait un référent tout court. Où nous mène en effet cette histoire de flic intègre, qui, devenu tueur pour une organisation mystérieuse ayant pour but de restaurer la moralité en Thaïlande, voit le monde à l’envers depuis qu’il s’est pris une balle dans la tête ? Que lui apporte ce changement de perspective ? Cela lui permet-il d’y voir plus clair dans un monde sans dessus-dessous ?

A vrai dire, on n’en sait rien, et on n’est pas sûr que le réalisateur en sache plus que nous. Elliptique, la narration nous promet de belles révélations sans jamais les tenir. Quid de la mystérieuse organisation dont on nous annonce des ramifications complexes sans que l’on en voit jamais plus de trois membres ? Sans doute l’intrigue policière n’est-elle qu’un McGuffin élégant, un emballage de film noir cachant un profond voyage intérieur. Les effets de mise en scènes insistant, la voix-off en mode acceptation du destin semble l’indiquer, mais le parcours en lui-même n’offre guère d’intérêt.

Headshot n’est ni une quête car il n’y a rien à trouver, ni une histoire de rédemption car il n’y a pas de faute. En fait, il ne peut même pas s’agir de voyage intérieur puisqu’il n’y a pas vraiment de mouvement, d’évolution concernant notre protagoniste en mode upside down. Bref, loin de nous retourner le cerveau, Headshot nous l’enfume juste un peu.

Victor Lopez.

Verdict :

 

 Headshot de Pen-Ek Ranaturuang, en salle le 31 octobre 2012.