Un chef d’œuvre absolu vient éclairer la « Nuit catégorie III » que le festival Paris Cinéma, qui pense à tous les types de cinéphiles, a le courage d’organiser au Forum des Images le vendredi 29 juin 2012, de 21h30 au petit matin dans le cadre de son hommage à Hong Kong. Au programme : The Untold story (1993) d’Herman Yau, Crazy love (1993) de Roman Cheung, Sex and zen II (1996) de Chin Man-kei, et surtout Ricky Oh, signé par le Kubrick du nawak made in HK : Nam Nai Choi. Par Jérémy Coifman.
Ricky Oh (Fan Siu Wong) est un gars qui n’a pas de chance. Condamné à 10 ans de prison pour avoir tué un membre des triades responsable de la mort de sa dulcinée, il tombe dans la pire des prisons possibles. La prison d’Emerald City dans la série Oz ? C’est la petite maison dans la prairie à coté de ça ! Pourtant, il vivait une vie bien tranquille, le pauvre Ricky. Il était amoureux, avait une force surhumaine, une musculature impressionnante, une garde robe superbe et un brushing à toute épreuve. La belle vie en somme, que son arrivée dans ladite prison va bouleverser ! Découvrant l’horrible traitement réservé aux prisonniers et le trafic d’opium qui sévit entre les murs du terrible endroit , Ricky décide de changer les choses… à sa manière.
Story of Ricky est l’adaptation du Manga Ricky Oh de Masahiko Takakumi. Il est important de le préciser tant ce facteur est déterminant pour l’appréhension d’un tel OFNI (Objet Filmique non identifié). C’est aussi un film de catégorie III, donc absolument tout est permis, et Nam Nai Choi ne se prive pas ! Dans ce film, tout est Over The Top. Des costumes des gardiens au jeu tout en nuance (ironie inside) de Fan Siu Wong. C’est pourquoi dans un premier temps, le film fonctionne pleinement si on le voit entre amis, pour le fun. Car oui, Story of Ricky est drôle. Pas volontairement, certes, mais les fous rire furent quand même nombreux.
Story of Ricky, c’est un peu la passion du Christ revu et corrigé par Nam Nai Choi. Ricky Oh est le sauveur. Il va délivrer toutes ses pauvres âmes qui subissent la loi du directeur et de son adjoint (interprété par Fan Mei Sheng, le propre père de l’interprète principal). Enfermés dans un système injuste, l’arrivée du messie au Brushing de Fer va leur être salutaire. Car Ricky, il subit tout pour ses frères de galère, avec un aplomb incroyable. Il sera enterré vivant, se fera transpercer la main avec un crochet, sera forcé de manger des lames de rasoir… Non vraiment, Ricky c’est un brave type ! Mais il sait rendre la monnaie de sa pièce à tous ses infâmes. Et puis il sait se soigner (la preuve il noue deux de ses veines pour « réparer » son bras !).
Nam Nai Choi va loin, très loin dans la violence. C’est d’ailleurs l’un des films les plus gores de l’histoire. Ce serait même étonnant que Peter Jackson ne se soit pas inspiré de ce Story of Ricky pour réaliser son très gore Braindead un an plus tard. Heureusement pour nos petits estomacs fragiles, tout cela est désamorcé par un total manque de budget (comme d’habitude chez le réalisateur). Nam Nai Choi utilise des mannequins apparents, des masques en latex, rendant le tout peu ragoutant mais aussi à mourir de rire. Tout cela donne au film, un capital sympathie incroyable. C’est ce qu’on appelle communément un nanar. Terme souvent plus affectueux que méchant. En prenant le film au second degré (ou au millième), on passe 1h28 de folie, dégoûté mais aussi hilare.
Pourtant, à bien y regarder, le film fonctionne sur tous les tableaux. Même en appréhendant Story of Ricky au premier degré, le film fonctionne parfaitement. Le film est une adaptation de manga et toutes les situations complètement folles peuvent trouver une explication par ce fait. Mais l’histoire en elle-même reste assez touchante de naïveté. Ce récit d’un homme brisé voulant sauver les hommes d’une prison, c’est émouvant, non ? Les flashbacks, aussi risibles soient-ils dans leur aspect kitschissime, fonctionnent également au premier degré. Nous sommes malgré nous pris dans le film. On s’intéresse aux personnages. Et finalement, si on est dans de bonnes dispositions, Story of Ricky fonctionne au premier comme au second degré. Soit on est pris dans l’histoire et on savoure, soit le film déclenche fous rires sur fous rires, que demander de plus ?
Story of Ricky est le nanar ultime. Grand n’importe quoi méga attachant, film d’arts martiaux aux accents grand-guignolesques, c’est un peu le 2001, L’odyssée de l’espace (d’ailleurs le film se passe en 2001… coïncidence ?) du nanar. C’est dans son genre, un chef d’œuvre, n’ayons pas peur des mots.
Un conseil, si vous n’avez pas vu Story of Ricky, c’est le moment de réparer l’hérésie !
Jérémy Coifman.
Verdict :
Story of Ricky de Nam Nai Choi est présenté le vendredi 29 juin à partir de 21h30 au Forum des Images dans le cadre de la « Nuit Catégorie III » du Festival Paris Cinéma.