Film inédit en salles en France, Map of the sound of Tokyo est sorti au Japon le 11 septembre 2010. L’occasion est idéale pour revenir sur cette œuvre, présentée cet été dans le cadre du festival Paris-Cinéma.
Isabel Coixet, réalisatrice Espagnole rend hommage à cette cité sensuelle, et livre son interprétation sensible de cette ville aussi troublante que singulière.
« Ce que vous allez voir n’est pas une théorie sur le Japon. J’ai filmé un Tokyo imaginaire : mon Tokyo, le Tokyo que j’aime… »Propos de la réalisatrice durant le Festival Paris Cinéma, juillet 2010.
L’Histoire : Le film nous conte le quotidien de Ryu, jeune femme mystérieuse qui travaille de jour dans une halle à marée et qui la nuit devient occasionnellement une tueuse à gage. Elle est engagée un jour par Ishida, bras droit de monsieur Nagara, homme d’affaire influent dont la vie s’écroule à la suite du suicide de sa fille, pour assassiner son petit ami David, que le businessman tient pour responsable. Le tout se déroule sous les yeux d’un vieil ingénieur du son qui, fasciné par la belle, enregistre ses moindres faits et gestes et devient ainsi le témoin discret de cette fable urbaine mélancolique.
Oui, mais…
L’histoire passée en revue, que reste du film ? Malgré la jolie rencontre entre la sublime (sa beauté crève l’écran) et touchante Kikuchi Rinko – révélée dans le film Babel d’ Alejandro González Iñárritu par son rôle de sourde-muette – et le ténébreux Sergi Lopez, on reste en final assez dubitatif.
Isabel Coixet traite certes, avec beaucoup de sensibilité la complexité des sentiments amoureux à travers les destins croisés des protagonistes, mais malgré cela le film de la barcelonaise peine à convaincre : en effet, mis à part quelques scènes d’une grande intensité, comme celle de la halle à marée vers la fin, l’émotion n’est pas vraiment au rendez-vous. Une chose est certaine le Tokyo traditionnel est très bien retranscrit. Ce n’est pas celui de Shibuya, mais plutôt celui du Golden Gai au sein de Shinjuku.
Elle présente avec justesse de nombreuses scènes de la vie quotidienne tokyoïte (dont certaines très drôles comme celle des baisers gratuits donnés dans la rue).
L’ Europe à Tokyo
Cependant, on a du mal à cerner les motivations des personnages, et plus particulièrement celle de l’héroïne : sa personnalité et ses mécanismes de réflexions sont bien trop occidentalisés pour une japonaise de pur souche. Quand à Sergi Lopez, il semble un peu perdu dans le film et on se demande bien comment il a atterrit à Tokyo. Égal à lui-même dans son interprétation (plutôt réussie par conséquent), il semble en revanche complètement hors cadre. Malgré un certain onirisme que semble rechercher l’auteur, la réalisation trop plate ne permet pas d’atteindre l’objectif escompté. On est loin de l’atmosphère envoutante d’un magnifique Fallen Angels de Wong Kar Wai par exemple.
Au final, ce film, tourné au Japon avec des Japonais, aurait pu être exactement le même dans n’importe quelle autre ville du monde: la réalisatrice a manifestement une vision très “Vieille Dame” de Tokyo. Alors, certes, on s’évade un peu pendant le film, mais sitôt terminé, il ne reste pas grand-chose de ce voyage. Il n’y a maintenant plus qu’à espérer qu’un distributeur lui fasse l’honneur d’une sortie nationale, car même si le film n’est pas inoubliable, quelques jolies scènes, l’interprétation touchante des acteurs et la qualité de la photo valent le détour.
Olivier Smach.
Verdict :
Également Map of the Sounds of Tokyo, Fiche film