Deauville 2011 : Hong Sangsoo et Kim Jeewoon, les deux Corées

Posté le 10 mars 2011 par

Riche idée que d’organiser un double hommage aux cinéastes coréens Hong Sangsoo et Kim Jeewoon cette année à Deauville. Si tout semble opposer le parcours et les films des réalisateurs, ils sont à eux deux représentatifs de la variété et diversité du cinéma coréen. Portraits croisés. Par Victor Lopez.


Passionnant geste cinéphilique que nous permet Deauville cette année en proposant les intégrales des œuvres de Hong Sangsoo et de Kim Jeewoon, comme si le festival, en réunissant ces deux noms, cherchait à abolir la distinction entre cinéma d’auteur intello et films populaires de genre. Pourtant, dans les faits, tout oppose Hong et Kim. Le premier va chercher ses maîtres dans les classiques européens ( Rohmer, Resnais), le second dans le cinéma américains le plus récent ( Tarantino en tête). Et quand ils croisent leurs influences, c’est pour les inverser. Avec Ha Ha Ha, Hong fait penser à un contemporain américain qui regarde la vieille Europe, Woody Allen, alors que Kim se tourne avec Le Bon, la brute et le cinglé vers un classique européen qui a le goût de l’Amérique ( Sergio Leone).

Au niveau du mode de diffusion, l’écart se fait encore plus ressentir. Hong Sangsoo a du mal à financer ses films et reste confidentiel partout, tout en étant plus connu en France qu’en Corée, Kim voit depuis son premier film The Quiet family ses budgets sans cesse gonfler et sa popularité grimper. Et si Hong Sangsoo approfondit depuis Le jour où le cochon est tombé dans le puits inlassablement les mêmes motifs , comme un peintre obsessionnel, sur les relations hommes-femmes, Kim change de registre à chaque film, passant de la comédie à l’horreur, du thriller au western.

Ce dernier point les rapproche au final, car il cristallise les critiques de leurs détracteurs. Hong Sangsoo, à force de travailler les même figures, ferait ainsi toujours le même film et se répéterait. Kim Jeewoon, au contraire, en passant d’un style à l’autre, n’aurait pas vraiment de personnalité et ses films sous influences s’en ressentiraient ( A Bitersweet life est calqué sur Park Chanwook, Le Bon… sur Tarantino, etc.) .

Redécouvrir ainsi leurs filmographies côte à côte fait alors d’autant plus plaisir car cela permet de dépasser ces vieux clivages critiques un peu stériles en naviguant d’un univers à l’autre et en permettant de prendre autant de plaisir à un western loufoque friqué qu’à un drame sentimental alcoolisé et sans le sous. Et le cinéma est autant l’un que l’autre, sans frontière artificielle entre les deux. Merci donc à ce double hommage de nous le rappeler.

Victor Lopez.

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