Mishima, une vie en quatre chapitres de Paul Schrader (DVD)

Posté le 8 décembre 2010 par

Wild Side édite le chef d’œuvre de Paul Schrader sur Mishima. Il n’est jamais trop tard pour en parler !


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On connait surtout Paul Schrader pour sa fructueuse collaboration avec Martin Scorsese. On lui doit les scénarios de Taxi Driver ou Raging Bull pour n’en citer que deux. Pourtant il est aussi un réalisateur accompli. Et même si tous ses films ne resteront pas dans les annales, certains méritent le coup d’œil. Ainsi, quand Wild Side sort une version restaurée de Mishima, une vie en quatre chapitres, son film de 1985, on ne se fait pas prier et on plonge dans le maelstrom. Yukio Mishima, de son vrai nom Kimitake Hiraoka, était un écrivain Japonais. Connu pour des ouvrages comme Le Pavillon d’or ou Le Tumulte des flots, il a marqué l’histoire du Japon par sa fin aussi spectaculaire que dramatique. Schrader lui portait une grande admiration, et lui consacrer un Biopic était important à ses yeux.


Mishima, une vie en quatre chapitres n’est pas un Biopic comme les autres. Le film surprend d’emblée par une construction incroyable. Le temps glisse, se superpose, se construit et détruit… Toute la vie de l’auteur est retranscrite dans un vrai tourbillon d’images. Cela peut sembler décousu, mais c’est purement et simplement passionnant. On est prit immédiatement dans la vie de cet homme hors du commun. Comme le titre l’indique, le film est découpé en quatre chapitres. Mais là où un Biopic classique choisirait de découper le film dans le temps, Schrader organise son film en prenant comme point d’entrée un thème ayant une relation avec un écrit de Mishima. Chacun apporte au spectateur des bribes de la vie de l’artiste, tout en éclaircissant au fur et à mesure sa manière de penser et ce qui va mener à cette journée du 25 novembre 1970, fil rouge du film.

Mais Schrader ne s’arrête pas là. Il va, durant les 1h55 du métrage (court pour un film de ce genre), imager ses écrits. Il insère dans la fiction, un récit des romans, en filigrane. Le film est partagé entre trois dimensions : le passé de Mishima, les représentations de ses écrits et la dernière journée de l’auteur. Ce qui peut paraitre assez foutraque va finalement être une idée de génie. Car ces passages, en plus d’être formellement réussit (des décors hallucinants), apportent une réflexion assez passionnante non plus seulement sur l’auteur lui-même, mais sur l’art et la beauté, obsession de Mishima. Grâce à cette forme ahurissante, l’œuvre prend tout de suite une autre dimension. L’esthétique des années 80 sied à merveille au film, et on retrouve aussi le style de Schrader (le plan avec le store et les ombres, les miroirs..;). Le réalisateur expérimente, joue entre le noir et blanc et la couleur. Sa passion et son profond respect pour Mishima transparait à chaque seconde.

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Que reste t-il au-delà de cette forme si impressionnante ? Et bien, à vrai dire, beaucoup de choses ! Le film est passionnant, comme le personnage que Schrader décrit. Mishima était un homme passionné, obsédé par la beauté, par la mort, par les traditions Japonaises. C’était un homme bouillonnant, entier. Mishima, une vie en quatre chapitres est un film fiévreux, toujours dans l’urgence. On plonge dans la tête de l’auteur et c’est assez incroyable. Bien que l’on ne comprenne pas toujours ses intentions ou qu’on ne les cautionne pas, l’homme inspire le respect. Il est droit dans ses bottes, déterminé, intelligent, charmant. Finalement, on parvient à ressentir de l’empathie. Car ce que nous montre Schrader, c’est avant tout un homme qui ne veut surtout pas vieillir. On en vient à se demander si son suicide n’était tout simplement pas un acte de nihilisme total sous couvert d’une volonté de coup d’état. Comme il le dit au début du film : « Dans mes plus jeunes années, j’ai réalisé que la vie se constituait en deux éléments contradictoires : l’un était les mots qui avaient le pouvoir de changer le monde. L’autre était le monde lui-même qui n’avait rien à voir avec les mots. » Il savait que les mots ne changeraient rien, plus dans cette société. La dernière partie est intitulée : Harmonie de la plume et du sabre: Mishima a trouvé le moyen d’allier l’action et les mots.

Mishima, une vie en quatre chapitres est un film exceptionnel, porté par une construction et un scénario vraiment prodigieux. La musique entêtante de Phillip Glass finit de rendre ce film monumental. La partition du compositeur au style identifiable entre mille est en parfaite adéquation avec le personnage de Mishima, elle est tout simplement fascinante. Assurément un chef d’œuvre !

Jérémy Coifman.

Verdict :

DVD édité par Wild Side disponible depuis le 08/12/2010

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