FICA 2015 : Bwaya de Francis Xavier Pasion (Compétition : Visages des Cinémas d’Asie Contemporains)

Posté le 12 février 2015 par

Grand vainqueur du Tokyo Filmex 2014, Crocodile (Bwaya) de Francis Xavier Pasion s’appuie tout à la fois sur une histoire vraie et sur des éléments issus de la mythologie philippine, tout en ouvrant sa fiction sur une portée documentaire. À découvrir en France au FICA de Vesoul.

Dans la province d’Augusan del Sur, dans le sud des Philippines, une famille fête la fin de l’enseignement primaire d’une jeune fille. Ayant reçu de bons résultats à l’école, celle-ci s’apprête à entrer au collège mais a besoin pour cela que ses parents, d’un milieu défavorisé, lui paient les frais d’inscription. Quoi qu’il en soit, tous les espoirs de la famille sont brisés le jour où la jeune fille, au cours d’une balade sur le fleuve, se fait dévorer par un crocodile géant dont l’espèce est courante dans la région.
Tourné en décors naturels, au bord d’un des plus grands fleuves du pays, réellement infesté de crocodiles, le film se concentre dans un premier temps sur les conditions de vie des habitants de la province pour se focaliser par la suite sur la douleur de la mère ayant perdu sa fille. Cette seconde partie est brillamment portée par l’actrice Angeli Bayani, qui a récemment interprété le personnage de l’immigrée philippine dans Ilo Ilo d’Anthony Chen.

Conçu comme un conte philosophique sur le thème de la douleur universelle – celle non seulement des hommes mais de toute créature vivante, le film s’appuie sur un mode de vie ancestral pour lequel les hommes, forcés de cohabiter avec toute sorte de créature, y compris les plus dangereuses, se perçoivent au même titre que tout ce qui vit, croît et respire. A la douleur de la mère répond ainsi la douleur du crocodile à qui les habitants de la région volent régulièrement les œufs pour pouvoir compléter leurs revenus.
Ce récit plein d’humilité est porté à l’écran par un remarquable travail sur la photographie. Le film est ponctué de séquences flottantes, purement descriptives, pour la plupart tournées à l’aide de drones, qui pour quelques instants fléchit le récit dans une visée onirique et contemplative. Tourné au bord de l’eau, voire sur le fleuve lui-même, le film fait la part belle à l’élément aquatique de sorte que les images semblent couler d’elles-mêmes dans un rythme débordant de sérénité.
L’essentiel du long-métrage consiste non seulement à donner une idée, mais à se fondre dans le mode de vie des individus dont il s’agit de brosser le portrait – vie pleine de mystères, mêlant le christianisme à une pratique religieuse d’ordre chamanique ; vie de misère essentiellement fondée sur des relations de confiance et d’entraide inchangées depuis des siècles. Il ressort en tout et pour tout de Crocodile le charme et la beauté fuyante qui ont su faire le succès des films d’Apichatpong Weerasethakul.

Nicolas Debarle.

Bwaya de Francis Xavier Pasioni. Philippinnes. 2014. À découvrit au FICA de Vesoul.

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