Cette troisième journée fut riche en surprises. Entrecoupé d’un Community hélas sans intérêt (et non asiatique), le BIFFF dévoila l’adaptation du manga Rurouni Kenshin en film live, et un film de zombie philippin au titre plein de promesses. Alors, bonnes surprises ou pas ? Par Yannik Vanesse
Un manga live
Rurouni Kenshin d’Ohtomo Keishi
Derrière ce titre mystérieux se cache d’abord un célèbre manga écrit par Watsuki Nobuhiro, qui fut adapté en série animée puis en métrage d’animation, ainsi que deux séries d’OAV, racontant entre autres le passé du personnage principal. Voici qu’arrive à présent, grâce à Ohtomo Keishi, le film live. Etant donné la difficulté d’adapter un manga en film, il est logique que le réalisateur, qui a beaucoup œuvré dans le domaine de la série télévisée avant de se lancer dans cette aventure, soit attendu au tournant.
L’histoire qui nous est racontée est des plus classique dans l’univers codé du chanbara. Notre héros, Kenshin, est joué par Takeru Sato, qui parvient à donner à son personnage la profondeur qui lui est nécessaire, avec un mélange de jeunesse, d’innocence, et de culpabilité étouffante. Il pourrait être un compatriote de Zatoichi car il est un ancien assassin (effroyablement doué) qui, au passage à l’ère moderne (en 1868), a disparu pour devenir un vagabond, ayant décidé de ne plus jamais tuer, et utilisant pour se faire un « sabre inversé », dont le côté tranchant est dirigé vers son porteur, et non vers son adversaire. Dix ans plus tard, il arrive à Tokyo, ville dirigée par un puissant criminel rêvant d’inonder le Japon d’opium surpuissant (« aujourd’hui le Japon, et demain le monde ! » ricane-t-il devant ses subordonnés) et, en voulant défendre une jeune femme essayant tant bien que mal de protéger le dojo que lui a légué son père, Kenshin va devoir contrecarrer le vil mécréant.
Derrière cette histoire simple, le film délivre une critique intéressante du passage à l’ère moderne au Japon, et de la déchéance des samouraïs qui, incapables de pouvoir s’adapter à ce nouveau monde, rempli de paix et d’armes à feux, doivent mendier, devenir brigands ou hommes de mains pour survivre. Certes, nous sommes loin d’Hara-Kiri, mais le traitement est intéressant, grâce à une histoire très bien écrite. Le message, bien que prévisible et plein de bons sentiments, est passionnant, et empli d’une certaine philosophie, la plupart des personnages ayant une manière bien à eux d’appréhender la vraie nature d’un sabre, l’utilité de se battre, et la manière de le faire.
Mais Rurouni Kenshin est aussi l’adaptation d’un manga plein de bruits et de fureur. Les affrontements sont ainsi passionnants et très bien chorégraphiés (et les acteurs, d’excellents artistes martiaux), et le final délicieusement outrancier (on pense facilement à Azumi). À cela s’ajoutent une superbe photographie et des méchants délicieux. Entre leur chef, qui frise le ridicule malsain, et ses lieutenants, sadiques, sauvages et utilisant des techniques très différentes, le spectateur découvre des combats très variés mais passionnants. Et il ne faut pas oublier une touche d’humour bienvenue (deux protagonistes, combattant à mains nues dans une cuisine, s’arrêtent le temps de casser une petite graine), des bons sentiments, de l’amitié, de l’amour, et Rurouni Kenshin se révèle être un film de haute volée, dénué d’ennui malgré sa longueur.
Verdict : Rurouni Kenshin réjouira les amateurs de chanbara. Des personnages bien écrits, des dialogues intéressants, une histoire certes prévisible mais passionnante, et des combats dantesques. Une réussite.
Rurouni Kenshin est diffusé dans le cadre de la 31ème édition du BIFFF
Gare aux Zombadings
Remington and the Curse of the Zombadings de Jade Castro
Autant dire que tout spectateur découvrant l’affiche et le titre de ce métrage se rend dans la salle en se demandant ce qu’il va découvrir. Et pour être honnête, au sortir de la séance, il se demande à quoi il vient d’assister. Remington (joué par un Mart Escudero tout simplement irrésistible) était un enfant insupportable, qui, dès qu’il voyait un homosexuel, se moquait de lui, criant « homo ! » jusqu’à ce que quelqu’un le fasse taire. Malheureusement pour lui, une de ses victimes était un sorcier qui le maudit, annonçant que quand il serait grand, il serait lui-même homosexuel. Une fois jeune adulte, Remington remarque la charmante Hannah (Lauren Young, superbe), qu’il a bien du mal à séduire, alors qu’il s’ « homosexualise » progressivement, se mettant à parler et à s’habiller d’étrange manière (ces séquences sont irrésistibles de portnawak assumé) alors qu’un foulard mystique le poursuit. Et, alors qu’en ville sévit un tueur en série équipé d’une arme capable de tuer les homosexuels (tout en les transformant lors de séquences à hurler de rire), Remington, son meilleur ami et Hannah, partent à la recherche du sorcier responsable de la malédiction. Et, tandis que les homosexuels tués se relèvent, devenant des zombies merveilleusement atypiques, Remington n’est pas sûr de vouloir perdre sa malédiction qui le pousse à aimer son meilleur ami (incarné par Kerbie Zamora).
Remington and the Curse of the Zombadings distille certes un message sur l’homosexuel qui se cache en nous, et sur l’intérêt d’accepter les autres, peu importe ses penchants sexuels, mais il s’agit surtout d’une comédie particulièrement folle. Partant dans de nombreuses directions, avec des personnages tous plus décalés les uns que les autres, il est difficile de savoir où va nous mener le film ou ce qui va s’y passer. Les rires fusent devant l’incongruité des situations et le résultat franchement portnawak. Dialogues irrésistibles, séquences gorgées de folies, Remington and the Curse of the Zombadings est un film qui marque. Certes, les zombies mettent un peu de temps à apparaître, mais le métrage n’a pas besoin d’eux pour intriguer, surprendre, halluciner.
Yannik Vanesse
Verdict : Remington and the Curse of the Zombadings est un film empli de folie qu’apprécieront tous les amateurs de cinéma portnawak. Sans longueur, il nous emmène dans un univers surprenant et unique, qu’on quitte à regret quand le générique de fin s’installe.
Remington and the Curse of the Zombadings est diffusé dans le cadre de la 31ème édition du BIFFF