LE FILM DE LA SEMAINE – La Comédie humaine de Fukada Koji

Posté le 18 octobre 2023 par

Premier film de Fukada Koji, La Comédie humaine, avec son dispositif et ses intentions, esquisse brillamment ce que sera le cœur de l’œuvre de l’auteur de Harmonium et Au revoir l’été. C’est à découvrir en salles !

Une rencontre fortuite née d’une déception, un vernissage où personne ne vient et un nouveau membre dans la famille : trois histoires s’entrecroisent et révèlent des vérités jusque-là bien enfouies.

Un dispositif rappelant La Ronde d’Arthur Schnitzler, un titre citant Balzac, des citations de Nietzsche : trois éléments qui résument parfaitement l’essence du premier film de Fukada Koji. Des influences très littéraire donc, dont l’écriture précise révèle des trésors de justesse.

Le cinéma de Fukada semble toujours irrigué d’une colère sourde, larvée, qui n’éclate qu’à de très rares occasions. Il filme des impasses, toujours, tout en montrant dans le même temps tout un champ des possibles. Il pousse les curseurs de l’acidité au maximum, se parant d’une méchanceté qui fait sa marque de fabrique. Ici, les personnages sont dépeint dans toute leur humanité. Fukada n’hésite jamais à mettre en lumière la médiocrité, la faiblesse et l’égoïsme. Une écriture pouvant rappeler le cinéaste coréen Hong Sang-soo, tant les personnages semblent être en total décalage.

Fukada semble obsédé par cette idée de double, de ce que les personnages montrent et ce qu’ils sont véritablement. La radiographie de la société japonaise n’a rien de flatteuse, les conflits sont larvés, les désirs et la violence réprimés. Ce décalage malaisant que cherche et trouve le film illustre une rage qui ne demande qu’à éclater, une médiocrité qui a besoin d’être passée au crible.

Le cinéaste choisit de ne jamais détourner le regard, de malmener ses personnages. Il commence par les filmer dans leur apparent bien-être, en mouvement, avec un sourire de façade, puis finit par les figer, exposer leur monstruosité, laisser les corps s’exprimer, les voix porter plus loin.

La Comédie humaine se révèle une véritable réussite. Une œuvre fondatrice, finalement parfaite porte d’entrée à l’œuvre de son cinéaste, cristallisant à peu près toutes les obsessions de son auteur. Fukada reste l’un des cinéastes japonais contemporains le plus passionnant. Sa voix est immédiatement reconnaissable et les réflexions que ses films ouvrent paraissent aujourd’hui essentielles, que ce soit au Japon ou en France.

Jeremy Coifman.

La comédie Humaine de Fukada Koji. Japon. 2008. En salles le 18/10/2023.

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